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Aux plus beaux lieux de cet empire? Et les moins travaillez des injures du sort Peuvent-ils pas justement dire

Qu'un homme dans la tombe est un navire au port?

Croy-moy, ton deuil a trop duré,

Tes plaintes ont trop murmuré;
Chasse l'ennuy qui te possede,

Sans t'irriter en vain contre une adversité
Que tu sçais bien qui n'a remede

Autre que d'obeïr à la necessité.

Rends à ton ame le repos

Qu'elle s'oste mal à propos

Jusqu'à te dégouster de vivre;

Et, si tu n'as l'amour que chacun a pour soy,
Aime ton Prince et le delivre

Du regret qu'il aura s'il est privé de toy.

Quelque jour ce jeune lion
Choquera la rebellion,

En sorte qu'il en sera maistre;
Mais quiconque voit clair ne cognoist-il pas bien
Que, pour l'empescher de renaistre,

Il faut que ton labeur accompagne le sien?

La Justice, le glaive en main,
Est un pouvoir autre qu'humain

Contre les revoltes civiles.

Elle seule fait l'ordre, et les sceptres des rois N'ont que des pompes inutiles,

S'ils ne sont appuyez de la force des lois.

XXXVI

PARAPHRASE DU PSEAUME CXLV

1626

N'esperons plus, mon ame, aux promesses du monde :
Sa lumiere est un verre, et sa faveur une onde
Que tousjours quelque vent empesche de calmer.
Quittons ces vanitez, lassons-nous de les suivre :
C'est Dieu qui nous fait vivre,

C'est Dieu qu'il faut aimer.

En vain, pour satisfaire à nos lasches envies,
Nous passons prés des rois tout le temps de nos vies
A souffrir des mépris et ployer les genoux :
Ce qu'ils peuvent n'est rien ; ils sont comme nous sommes,
Véritablement hommes,

Et meurent comme nous.

Ont-ils rendu l'esprit, ce n'est plus que poussiere
Que cette majesté si pompeuse et si fiere

Dont l'éclat orgueilleux étonnoit l'univers;

Et, dans ces grands tombeaux où leurs ames hautaines Font encore les vaines,

Ils sont mangez des vers.

Là se perdent ces noms de maistres de la terre, D'arbitres de la paix, de foudres de la guerre; Comme ils n'ont plus de sceptre, ils n'ont plus de flateurs, Et tombent avec eux d'une cheute commune

Tous ceux que leur fortune

Faisoit leurs serviteurs.

XXXVII

POUR UNE MASCARADE

Ceux-cy de qui vos yeux admirent la venuë,
Pour un fameux honneur qu'ils bruslent d'acquerir,
Partis des bords lointains d'une terre incognuë,
S'en vont au gré d'Amour tout le monde courir.
Ce grand demon, qui se déplaist
D'estre profané comme il est,
Par eux veut repurger son temple;
Et croy qu'ils auront ce pouvoir,
Que ce qu'on ne fait par devoir,
On le fera par leur exemple.

Ce ne sont point esprits qu'une vague licence
Porte inconsiderez à leurs contentemens :
L'or de cet âge vieil où regnoit l'innocence,
N'est pas moins en leurs mœurs qu'en leurs accoustremens
La foy, l'honneur et la raison

Gardent la clef de leur prison;
Malherbe.

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