SUR LES HEUREUX SUCCEZ DE SA REGENCE
Nymphe qui jamais ne sommeilles, Et dont les messagers divers
En un moment sont aux oreilles Des peuples de tout l'univers, Vole viste, et de la contrée Par où le jour fait son entrée Jusqu'au rivage de Calis,
Conte sur la terre et sur l'onde Que l'honneur unique du monde, C'est la Reine des fleurs de lys.
Quand son Henry, de qui la gloire Fut une merveille à nos yeux, Loin des hommes s'en alla boire Le nectar avecques les dieux,
En cette avanture effroyable, A qui ne sembloit-il croyable Qu'on alloit voir une saison Où nos brutales perfidies Feroient naistre des maladies Qui n'auroient jamais guerison?
Qui ne pensoit que les Furies Viendroient des abysmes d'enfer En de nouvelles barbaries
Employer la flamme et le fer? Qu'un débordement de licence Feroit souffrir à l'innocence Toute sorte de cruautez,
Et que nos malheurs seroient pires Que n'agueres, sous les Busires, Que cet Hercule avoit domtez?
Toutesfois, depuis l'infortune De cet abominable jour, A peine la quatriéme lune Acheve de faire son tour, Et la France a les destinées Pour elle tellement tournées
Contre les vents seditieux Qu'au lieu de craindre la tempeste, Il semble que jamais sa teste Ne fut plus voisine des cieux.
Au delà des bords de la Meuse, L'Alemagne a vu nos guerriers, Par une conqueste fameuse, Se couvrir le front de lauriers. Tout a fléchi sous leur menace; L'Aigle mesme leur a fait place, Et, les regardant approcher, Comme lyons à qui tout cede, N'a point eu de meilleur remede Que de fuïr et se cacher.
O Reine, qui, pleine de charmes Pour toute sorte d'accidents, As borné le flus de nos larmes En ces miracles evidents, Que peut la fortune publique Te voüer d'assez magnifique, Si, mise au rang des immortels Dont ta vertu suit les exemples, Tu n'as avec eux, dans nos temples, Des images et des autels?
Que sauroit enseigner aux princes Le grand demon qui les instruit, Dont ta sagesse en nos provinces Chaque jour n'épande le fruit? Et qui justement ne peut dire, A te voir regir cet empire,
Que, si ton heur estoit pareil A tes admirables merites,
Tu ferois dedans ses limites Lever et coucher le soleil?
Le soin qui reste à nos pensées, O bel astre, c'est que tousjours Nos felicitez commencées Puissent continuer leur cours. Tout nous rit, et nostre navire A la bonace qu'il desire; Mais, si quelque injure du sort Provoquoit l'ire de Neptune, Quel excez d'heureuse fortune Nous garantiroit de la mort?
Assez de funestes batailles Et de carnages inhumains
Ont fait en nos propres entrailles Rougir nos déloyales mains; Donne ordre que sous ton genie Se termine cette manie, Et que, las de perpetuer Une si longue mal-vueillance, Nous employons nostre vaillance
Ailleurs qu'à nous entre-tuer.
La Discorde, aux crins de couleuvres, Peste fatale aux potentats,
Ne finit ses tragiques œuvres Qu'en la fin mesme des Estats. D'elle nasquit la frenesie De la Grece contre l'Asie, Et d'elle prindrent le flambeau Dont ils desolerent leur terre Les deux freres de qui la guerre Ne cessa point dans le tombeau.
C'est en la paix que toutes choses Succedent selon nos desirs;
Comme au printemps naissent les roses, En la paix naissent les plaisirs;
Elle met les pompes aux villes, Donne aux champs les moissons fertilles, Et, de la majesté des lois Appuyant les pouvoirs suprémes,
Fait demeurer les diadémes
Fermes sur la teste des rois.
Ce sera dessous cette ægide Qu'invincible de tous costez Tu verras ces peuples sans bride Obeir à tes volontez;
Et, surmontant leur
Remettras en telle asseurance Leur salut, qui fut déploré, Que vivre au siecle de Marie
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