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Sans mensonge et sans flatterie,
Sera vivre au siecle doré.

Les Muses, les neuf belles fées,
Dont les bois suivent les chansons,
Rempliront de nouveaux Orphées
La troupe de leurs nourrissons;
Tous leurs vœux seront de te plaire;
Et, si ta faveur tutelaire

Fait signe de les avoüer,

Jamais ne partit de leurs veilles Rien qui se compare aux merveilles Qu'elles feront pour te loüer.

En cette hautaine entreprise,
Commune à tous les beaux esprits,
Plus ardent qu'un athlete à Pise,
Je me feray quitter le pris;

Et, quand j'auray peint ton image,
Quiconque verra mon ouvrage
Avoûra que Fontaine-bleau,
Le Louvre, ny les Tuileries,
En leurs superbes galeries,
N'ont point un si riche tableau.

Apollon, à portes ouvertes,
Laisse indifferemment cueillir

Les belles fueilles tousjours vertes

Qui gardent les noms de vieillir;
Mais l'art d'en faire des couronnes
N'est pas sceu de toutes personnes;
Et trois ou quatre seulement,
Au nombre desquels on me range,
Peuvent donner une loüange
Qui demeure eternellement.

ODE VIII

POUR LA REINE MERE DU ROY

[MARIE DE MEDICIS]

PENDANT SA REGENCE

1614

Si quelque avorton de l'Envie
Ose encore lever les yeux,
Je veux bander contre sa vie
L'ire de la terre et des cieux;
Et dans les savantes oreilles
Verser de si douces merveilles
Que ce miserable corbeau,
Comm' oiseau d'augure sinistre,

Et le plaisir, la decevant,
Tousjours l'emporte au gré de l'onde.
Bellegarde, les matelots

Jamais ne méprisent les flots,
Quelque phare qui les éclaire;
Je feray mieux de relascher,
Et borner le soin de te plaire
Par la crainte de te fascher.

L'unique but où mon attente
Croit avoir raison d'aspirer,
C'est que tu veuilles m'asseurer
Que mon offrande te contente.
Donne-m'en, d'un clin de tes yeux,
Un témoignage gracieux,

Et, si tu la trouves petite,
Ressouviens-toy qu'une action
Ne peut avoir peu de merite,
Ayant beaucoup d'affection.

Ainsi, de tant d'or et de

soye

Ton âge devide son cours
Que tu reçoives tous les jours
Nouvelles matieres de joye!
Ainsi tes honneurs fleurissants
De jour en jour aillent croissants
Malgré la fortune contraire!
Et ce qui les fait trébucher,

De toy ny de Termes, ton frere, Ne puisse jamais approcher!

Quand la faveur, à pleines voiles,
Tousjours compagne de vos pas,
Vous feroit devant le trépas
Avoir le front dans les estoilles,
Et remplir de votre grandeur
Ce que la terre a de rondeur,
Sans estre menteur, je puis dire
Que jamais vos prosperitez
N'iront jusques où je desire,
Ny jusques où vous meritez.

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