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>> par mes conseils qu'ils se sont » emparez du Gouvernement. Ce >> crime, Messieurs, ajoûta Ap>> pius en se tournant vers les prin>> cipaux du Senat, m'est commun » avec vous. Le Gouvernement >> vous appartient, & vous êtes >> trcp sages pour l'abandonner à >> une populace effrenée, à cette >> bête feroce qui n'écoute que ses >> flateurs, mais aussi dont les ef>> claves deviennent souvent les >>> tyrans : & c'est, Messieurs, ce que >>> nous avons à craindre de M. Va>> lerius, qui n'ayant de considera>> tion dans la République que par >> les Dignitez dont nous l'avons >> honoré, s'en fert aujourd'hui >>> pour ruiner nos Loix, pour chan>> ger la forme de notre Gouver>>>nement, & pour se frayer par ses >> bassesses un chemin à la tyrannie >>> Vous l'avez entendu, & vous >> avez pû appercevoir, qu'étant >> mieux instruit que nous des def>> seins pernicieux des rebelles, il >> vous prépare à de nouvelles pré>> tentions; & fous prétexte de de>> mander des garants de la liber>>>té du peuple, il ne cherche

qu'à opprimer celle du Sénat. «

Mais venons au principal sujet qui nous a assemblez aujourd'hui." Je dis donc que c'est ébranler les « fondemens d'un Etat que d'en « changer les Loix, & qu'on ne peut donner atteinte aux Con- sc trats des particuliers, sans blesser « la foi publique, & fans ruiner ce « Contrat original qui a formé les « premieres societez entre les hom-" mes. Accorderez-vous aujour. « d'hui à des séditieux qui sont à « la veille de tourner leurs armes « contre leur patrie; ce que vous « avez sagement refusé plusieurs « fois à des Citoyens soumis, & à « des foldats qui combattoient fous vos Enseignes ? Songez que vous" ne pouvez vous relâcher sur l'article des dettes, que vous n'ou- « vriez en même temps la porte à « de nouvelles prétentions. Bien- « tôt les chefs de la sédition, de « concert avec M. Valerius, vou- « dront être admis aux premieres « Dignitez de l'Etat. Fassent les « Dieux Tutelaires de Rome, que « son Gouvernement ne tombe pas " à la fin entre les mains d'une vile"

>> populace, qui vous punisse de >> votre foiblesse, & qui vous ban>> nisse vous-même de votre patrie! >> On veut vous faire peur des ar>>> mes des rebelles: mais n'avez>> vous pas pour ôtages leurs fem> mes & leurs enfans? Viendront >> ils attaquer à force ouverte une >> Ville qui renferme ce qu'ils ont >> de plus cher ? Mais je veux qu'ils >> n'ayent pas plus d'égards pour >> les liaisons du sang que pour les » Loix du Gouvernement: ont-ils >> des Generaux, des vivres, & l'ar>> gent necessaire pour se soutenir >> dans une pareille entreprise ? >> Que deviendront-ils pendant >> l'hyver qui est proche, fans pain, >> sans retraite, & fans pouvoir s'é>> carter, qu'ils ne tombent entre >> nos mains?S'ils se refugient chez » nos voisins, n'y trouveront-ils » pas, comme à Rome, le gouvernement entre les mains des " Grands ? Des rebelles & des >> transfuges en peuvent-ils esperer >> d'autre condition que celle >> de malheureux esclaves ? Mais >> peut-être qu'on craint qu'ils ne >> joignent leurs armes, & qu'ils ne

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viennent assieger Rome destituée d'habitans necessaires pour sa défense, comme si les forces de la « République consistoient dans les « seuls rebelles. Mais n'avez-vous « pas parmi les Patriciens une jeu-« nesse florissante & pleine de courage? Nos Cliens qui forment la plus faine partie de la Républi-« que, ne font-ils pas attachez comme nous à ses interêts ? Armons « même, s'il le faut, nos esclaves: « faisons en un peuple nouveau & « un peuple soumis. Ils ont appris" à notre service & par nos exemples à faire la guerre. Avec quel « courage ne combattront-ils pas c si la liberté est le prix de leur valeur? Mais si tous ces fecours ne vous paroiffent pas encore suffi- « fans, rappellez vos Colonies. Vous sçavez par le dernier dé- « nombrement du Cens, que la Ré-" publique nourit dans son sein « cent trente mille chefs de famille: P. 293. An. 246. à peine en trouvera-t-on la sep- « tiéme partie parmi les mécon- « tens. Enfin plutôt que de rece- « voir la loi de ces rebelles, accor-" dez aux Latins le droit de Ci- «

D. H. 1.

>> toyens de Rome qu'ils vous de >> mandent depuis si long-temps. >>> Vous les verrez accourir auffi>>tôt à votre secours, & vous ne >> manquerez ni de foldats ni de >> citoyens. Pour réduire mon sen>> timent en peu de paroles, je suis >> persuadé qu'il ne faut point en>> voyer de députez aux rebelles, >> ni rien faire qui marque de la >> frayeur ou de l'empressement. >> Que s'ils rentrent d'eux-mêmes >> dans leur devoir, on doit les >> traiter avec modération; mais il >> faut les poursuivre les armes à >> la main, s'ils persistent dans leur >> révolte.

Un avis si plein de fermeté fut suivi, quoi que par des vûës différentes, par la faction des riches, & par tous les jeunes Sénateurs. Les deux Confuls au contraire, Plébéïens d'inclination, & qui vouloient gagner l'affection de la multitude, & les Vieillards naturellement timides, foutenoient que la guerre civile étoit le plus grand malheur qui pût arriver dans un Etat. Ils étoient appuyez par ceux du Sénat, qui ne confi

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