C. 43. fur le Sénat & les Patriciens, en forte qu'ils formoient ordinairement le résultat des déliberations par préferènce au Sénat & aux Nobles. An de Ro. Servius Tullius, sixiéme Roí de me 175. Rome, Prince tout républicain D. H. 1. 4. malgré sa dignité; mais qui ne Tit. Liv, pouvoit pourtant souffrir que le Dec. 1. 1. 1. gouvernement dépendît souvent de la plus vile populace, résolut de faire passer toute l'autorité dans le Corps de la Noblesse & des Patriciens, où il esperoif trouver des vûës plus justes, & moins d'entêtement. L'entreprise n'étoit pas fans de grandes difficultez. Ce Prince avoit affaire au peuple de toute la terre le plus fier & le plus jaloux de ses droits: & pour l'obliger à en relâcher une partie il falloit le sçavoir tromper par l'appas d'un bien plus considérable. Les Romains payoient en ce temps là par tête un tribut au profit du tréfor public; & comme dans leur origine la fortune des particuliers étoit à peu près éga-' le, on les avoit afsujettis au même tribut, qu'ils continuerent de payer avec la même égalité, quoi que par la succession des temps il se trouvât beaucoup de difference entre les biens des uns & des autres. Servius, pour ébloüir le peuple, & pour connoître les forces de fon Etat, representa dans une assemblée, que le nombre des habitans de Rome & leurs richesses étant considérablement augmentez par cette foule d'étrangers qui s'étoient établis dans la ville, il ne lui paroissoit pas juste qu'un pauvre citoyen contribuât autant qu'un plus riche aux charges de l'Etat; qu'il falloit régler ces contributions suivant les facultez des particuliers; mais que pour en avoir une connoissance exacte, il falloit obliger tous les citoyens sous les plus grandes peines, à en donner une declaration fidele, & qui pût servir de regle pour faire cette répartition. Le peuple qui ne voyoit dans cette proposition que son propre foulagement, la reçut avec de grands applaudissemens, & toute P'Affemblée d'un mutuel confentement donna au Roi le pouvoir d'établir dans le gouvernement l'ordre qui lui paroîtroit le plus convenable au bien public. Ce Prince, pour parvenir à ses fins, divisa d'abord tous les habitans de la Ville, sans distinction de naissance ou de rang, en quatre Tribus, appellées les tribus de la Ville. Il rangea sous vingt-fix autres tribus les citoyens qui demeuroient à la campagne, & dans le territoire de Rome. Il institua ensuite le Cens, qui n'étoit autre chose qu'un rôle & un dénombrement de tous les Citoyens Romains, dans lequel on comprit leur âge, leurs facultez, leur profeffion, le nom de leur Tribu & de leur Cu rie, & le nombre de leurs enfans & de leurs esclaves. Il se trouva aFabius Pic lors dans Rome & aux environs plus de quatre vingt mille citoyens capables de porter les armes. tor. Servius partagea ce grand nomD. H. 1. 4. bre en fix classes, & il composa chaque classe de différentes CenTir. Liv. turies de gens de pied. Il mit dans Dec. 1. jl. 1. la premiere claffe entrer que des Senateurs, des Pa-triciens, ou des gens diftinguez par leurs richesses; & tous ne devoient pas avoir moins que cent mines ou dix mille dragmes de bien: ce qui pouvoit revenir en ces tems-là à un peu plus de mille écus de notre monnoye; ce que nous n'osons pas cependant affirmer bien positivement, à cause de la différence qui se trouve dans les opinions des Sçavans sur la valeur & la variation des monnoyes. On ne sçait pas plus précisément si chaque Centurie de cette premiere classe étoit composée de cent hommes effectifs. Il y a lieu de croire au contraire que Servius dans la vûë de multiplier les suffrages des Patriciens, avoit augmenté le nombre de leurs Centuries; & il cachoit ce dessein secret, sous le pretexte plausible que les Patriciens étant plus riches que les Plébéïens, une Centurie composée d'un petit nombre de ce premier Ordre devoit autant contribuer aux charges de l'Etat, qu'une Centurie complette de Plé béïens. Ces quatre-vingt Compagnies de la premiere classe, furent partagées en deux ordres. Le premier composé des plus âgez, & qui étoient au dessus de quarante-cinq ans, étoit destiné pour la garde & la défense de la ville; & les quarante autres Compagnies formées des plus jeunes depuis dix-sept ans jusqu'à quarante-cinq, devoient marcher en campagne, & aller à la guerre. Ils avoient tous pareilles armes offensives & défensives: les offensives étoient le javelot, la pique ou la halebarde, & l'épée, & ils avoient pour armes défensives le casque, la cui Araffe & les cuissarts d'airain. On rangea encore sous cette pre miere classe toute la cavalerie, dont on fit 18. Centuries, composées des plus riches & des principaux de la ville. On y ajouta deux autres Centuries d'artisans qui fuivoient le camp sans être armez; & leur emploi consistoit à conduire, & à dresser les machines de guerre. La seconde classe n'étoit composée que de vingt Centuries, & de ceux qui possedoient au moins C |