Imágenes de páginas
PDF
EPUB

choient des victimes à leur reffentiment, dont la punition pût intimider le Sénat, firent tomber l'accufation fur ceux qui étoient des D. H.I. 10. familles Pofthumia,Simpronia&Clelia. Tit. Liv. On les cita devant l'Affemblée Dec. 1. 1.3. prochaine du Peuple; mais quoique

ces jeunes Patriciens fe fiffent hon-
neur d'avoir empêché que la Loi
n'eût été publiée, le Sénat ne fut
pas d'avis qu'ils comparuffent, ni
queperfonne fechargeât de leur dé-
fenfe. Les plus habiles Sénateurs fe
flaterent qu'en les abandonnant au
peuple, cettemodération diminue-
roit fon reffentiment, ou qu'ayant,
pour ainsi dire, exhalé toute fa co-
lere par leur condamnation, cette
vangeance lui feroit oublier la
·pu-
blication de la Loi. Cependant
le jour de l'Affemblée étant arrivé,
les efprits les plus violens parmi le
peuple vouloient pouffer cette af-
faire à toute rigueur ; mais les plus
fages qui regardoient le filence du
Sénat comme un aveu tacite de la
faute des Accufez, contens qu'il
les abandonnât à la juftice du Peu-
ple, furent feulement d'avis de les
condamner à une amande: ce qui

fut approuvé à la pluralité des voix. Le Sénat ne s'y oppofa point; on vendit même publiquement les biens des condamnez pour y fatiffaire, & le prix en fut confacré à Cérés. Mais le Sénat fit racheter ces biens de fes propres deniers par des perfonnes interposées. On les rendit quelques temps après aux anciens proprietaires, & le Sénat ne fut pas fâché qu'il n'en eût couté que de l'argent pour arrêter la publication de la Loi. Mais les Tribuns ne prirent pas fi aisément le change. Ils revinrent bien-tôt au partage des terres. C'étoit le fujet le plus ordinaire de leurs harangues.

Pendant que le peuple paffoit les jours entiers fur la place à entendre ces déclamateurs, il arriva des couriers de Tufculum, qui dirent que les Eques s'étoient jettez fur le territoire de cette ville, alliée du Peuple Romain; qu'ils mettoient tout à feu & à fang dans la campagne; qu'il étoit même à craindre qu'ils n'emportaffent cette place s'ils en formoient le fiege : & les habitans demandoient du fecours

avec beaucoup d'inftance. Le Sénat ordonna auffi-tôt que les Confuls fe mettroient en campagne avec les forces de la République. Les Tribuns ne manquerent pas de s'y oppofer à leur ordinaire, & ils vouloient faire acheter leur confentement par la publication de la Loi. Mais le peuple plus genereux que ces Magiftrats, fe reffouvenant du fecours qu'il avoit reçu de Tufculum contre l'invafion d'Herdonius, offrit de bonne grace de prendre les armes. On leva promptement une Armée ; les deux Confuls fe mirent à la tête. Siccius Dentatus, ce Plébeïen qui venoit de haranguer fi vivement en faveur de la Loi Agraria, fe préfenta pour les fuivre avec huit cents veterans comme lui qui avoient tous achevé le temps de fervice prefcrit par les Loix, mais qui dans cette occafion voulurent encore aller à la guerre fous le commandement particulier de Siccius, qu'ils nommoient hautement l'A chille Romain.

L'Armée Romaine s'avança jufqu'à Algide qui étoit à feize milles

de Rome, & rencontra les en emis affez près de la ville d'Antium. Ils étoient retranchez fur le haut d'une montagne. Les Romains camperent fur une éminence opposée; ils fe fortifierent avec foin, & les Generaux retinrent les foldats dans le camp pour cacher leurs forces à l'ennemi. Les Eques prirent ces précautions pour un effet de la peur des Confuls. Ils defcendoient fouvent dans la plaine, & ils venoient quelquefois jufques fur les bords des retranchemens du camp reprocher aux Romains la timidité de leurs Generaux. Les deux Confuls, pour entretenir l'ennemi dans cette fauffe confiance, tenoient toujours les portes du camp fermées. Mais un jour queRomillius commandoit en chef, & que c'étoit à lui à donner les ordres, ce Conful ayant apperçu que toute l'Armée des Eques étoit fortie de fon camp, & que la plupart des foldats difperfez & répandus dans la campagne fourageoient impunément jufqu'au pied de fes retranchemens, il réfolut de les charger dans la plaine, & de

faire attaquer en même temps le camp qu'ils avoient fur la montagne, afin qu'ils ne fçuffent point de quel côté étoit la véritable attaque. Dans cette vûe il fit appeller Siccius Dentatus qui commandoit le corps de veterans dont nous venons de parler; & foit par eftime pour fa valeur, foit qu'il ne fût pas fâché d'expofer ce Plébeïen dans une occafion très-dangereufe, il le chargea de l'attaquedu camp ennemi: » Nous allons, lui dit-il, D.H. 1, 10, mon Collegue & moi, marcher » aux ennemis. Pendant que nous >> attirerons toutes les forces de »notre côté, jettez-vous avec le » corps que vous commandez dans » cette gorge & ce chemin détour»né qu'on découvre dans la mon

tagne,&qui conduit à leur camp. »Pouffez jufqu'aux retranchemens, » & tâchez de vous en rendre le » maître. En faifant en même temps » deux attaques differentes, nous » cauferons une diverfion utile, &

[ocr errors]
[ocr errors]

qui en partageant les forces de » nos ennemis, diminuera leur dé» fenfe. Siccius lui répondit qu'il étoit prêt d'obeïr aveuglement à

« AnteriorContinuar »