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fi vous prenez la défense de la religion catholique, & la protection de la juftice, & des loix qui font AN. 1555. les plus grandes forces, & les plus fermes appuis des Empires. Enfin il ne reste plus maintenant qu'à fouhaiter en votre faveur, que vos enfans arrivent heureusement à un âge auquel vous leur puiffiez transporter vos roïaumes, & votre puiffance, & que vous n'y foyez jamais contraint.

que

Sur la fin de ce difcours, Philippe se jetta aux genoux de fon pere, & lui demanda sa main pour fa La baifer. Mais Charles lui mettant cette même main fur la tête, demanda pour ce prince le fecours du ciel par une courte priere, après laquelle il demeura quelque tems fans s'exprimer autrement que par fes Tarmes. Ce fpectacle attendrit toute l'assemblée; & Philippe s'étant relevé au milieu des foupirs de tous ceux qui étoient préfens, & aprés avoir baisé avec refpect la main de fon pere, dit à l'assemblée, comme il ignoroit la langue Françoise, il n'étoit pas en état de leur parler, mais que Granvelle évêque d'Arras alloit le faire pour lui. Ce prélat harangua auffi-tôt l'assemblée, à qui il fit entendre que le roi étoit également reconnoiffant envers fon pere,& difpofé par les avis & par fon exemple à procurer le bien de la Flandre.Jacque Mafius orateur & jurisconsulte, répondit enfuite au nom des états ; & après toutes ces cérémonies, Marie reine de Hongrie ayant quitté le gouvernement dont elle joüiffoit depuis vingtcinq ans, Charles V. fe retira, en difant, Adieu, mes enfans, vous me percez le cœur, je vous quitte avec regret; & s'adressant à fon fils Philippe, il lui recommanda François d'Erafo, commandeur de

Moralez, en lui difant: Ce que je vous ai donné AN. 1555 aujourd'hui, ne vaut pas tant que ce ferviteur. Deux mois après il fe fit une affemblée beaucoup plus nombreufe que la premiere, où l'empereur fe dépoüillant tout-à-fait des royaumes, provinces,& ifles, tant de l'ancien que du nouveau monde, en donna encore à Philippe fon fils toute la poffeffion & la joüisfance.

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Pendant que tout cela fe paffoit à Bruxelles Ferdinand roi des Romains étoit à Ausbourg, où il présidoit à la diéte qui y avoit été convoquée. Il avoit fort preffé les princes de s'y rendre, entr'autres, Augufte électeur de Saxe, qui s'étoit excufé, fur ce que les états n'étoient pas affez tranquilles pour les quitter, & qu'il n'y avoit aucune apparence d'appaifer les differends de la religion, à cause de la prévention facheufe où l'on étoit contre la confeffion d'Ausbourg, qui étoit, difoit-il, pure & fainte, & conforme en tout à la doctrine & à la difcipline de l'églife primitive, & des quatre premiers conciles. Il ajoûtoit : que si dans cette diéte on n'éfi tablissoit point une paix ferme & durable, l'empereur & lui ne pourroient jamais affembler dans l'Allemagne un affez grand fecours qu'on pût opposer aux Turcs; mais qu'on devoit s'attendre que ceux qui étoient nez & élevez dans la confeffion d'Ausbourg, la retiendroient conftamment. Ce que pensoit Auguste arriva en partie : la diéte d'Ausbourg avança très-peu les affaires; on y disputa beaucoup & vivement, & l'on ne termina prefque rien. Les Catholiques firent un écrit pour juftifier leur religion, & faire voir que les Proteftans étoient obligez

de l'embraffer & de s'y foumettre. Ceux-ci ne manquerent pas d'y répliquer. Mais on ne fit usage ni AN. 1555. des uns ni des autres, & ils ne furent pas moins produits dans la diéte.

XX.

Articles fur

diéte d'Aus

Sleilan in com. lib. 26.

Pallav. hist. conc. trid. lib. 13.cap. 13.n.z.

De Thou in hift. Belear. in com. 16. n. 65.

lib. 16. n. 9.

lib.

Enfin après plufieurs féances, on concerta un decret, qui fut lû & prononcé le vingt-cinquième la religion dont de Septembre, & qui étoit fort peu propre à terter- on convint à la miner les differends. Il comprenoit dix-fept articles, bourg. dont voici les principaux. Que l'empereur, le roi Ferdinand, les autres Princes & Etats n'outrage.. roient en aucune maniere les fujets de l'Empire, à cause de la doctrine, religion, & foi de la confeffion d'Ausbourg; ni ne les contraindroient par mandemens ou autres voyes, de quitter la religion, de quitter la religion, les cérémonies & les loix que les alliez de la même confeffion avoient établies ou ci-après établiroient dans leurs états; ni ne les mépriferoient en aucune forte, mais leur laifferoient la liberté de confcience, avec joüiffance paisible de leurs biens, facultez, péages, poffeffions & droits. Que le differend de la religion ne feroit terminé que par des voyes douces & pacifiques, & par des députez choisis de l'un & l'autre parti. Que ceux de la confeffion d'Ausbourg fe comporteroient de même envers l'empereur, le roi Ferdinand, & les autres Princes & Etats de l'ancienne religion, leurs chapitres & colleges; les laissant pareillement jouir de la liberté de leur religion & de leurs cérémonies,comme auffi de leurs loix,poffeffions, péages; & que les differends& procès qui furviendroient, feroient décidés felon les loix & coûtumes de l'Empire. Que ceux qui ne feroient ni de l'une ni de l'autre religion, ne pourroient être com

pris dans cette paix. Que fi quelque archevêque, AN. 1555. évêque, prélat, ou quelqu'un de l'ordre ecclefiafti

que venoit à fe retirer de l'ancienne religion, il feroit obligé de fe déporter auffi-tôt de fon évêché, prélature, benefice, & de tous les fruits qu'il en auroit reçûs; fans toutefois que cela tournât en aucune maniere à son deshonneur ; & qu'il feroit libre aux chapitres ou colleges, ou à ceux qui avoient droit d'élire, de mettre en fa place un autre prélat de l'ancienne religion, afin qu'ils demeuraffent paifibles en la poffeffion de leurs droits de fondation, élection, présentation, postulation, confirmation, & autres femblables droits, & en celle de leurs biens; le tout à condition que tout cela ne préjudicieroit nullement à la future réconciliation de la religion. Que comme quelques Etats de l'Empire & leurs predécefleurs s'étoient emparez de quelques prévôtez ecclefiaftiques, monafteres, & autres fortes de biens facrez, & les avoient appliquez au miniftere de l'églife, à l'entretien des écoles, & autres bons usages, ils ne feront pas appellez en juftice pour ce fujet. Que la jurifdiction ecclefiaftique de l'ancienne église catholique ne prétendroit en aucune façon avoir le moindre droit fur la religion, la créance, la foi, les cérémonies, les loix, & le miniftere ecclefiaftique de ceux de la confeffion d'Ausbourg mais qu'elle demeurera 'suspenduë & sans effet, jusqu'à ce que les differends qui regnent en matiere de religion entre les deux partis foient entierement terminez. Que la même jurifdiction s'exerceroit pourtant, & auroit fon effet, felon l'ancien droit. & usage dans les autres choses qui ne concerne

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roient pas la religion. Que tout l'état ecclefiaftique demeureroit à l'avenir en la joüiffance de fes biens, AN. 1555. droits & péages; en forte néanmoins que ceux dans la province defquels ces biens feroient situez, ne perdroient rien du droit temporel qu'ils avoient avant la divifion de la religion. Qu'on prendroit fur les biens les chofes néceffaires pour entretenir & faire subsister le service de l'églife, les paroiffes, les écoles, les aumônes & les hôpitaux,fans avoir égard à qui de l'une ou de l'autre religion cette affistance & nourriture feroit appliquée. Que s'il arrivoit quelconteftation les aumônes & la nourriture pour des pauvres, & pour la maniere de les diftribuer, les parties de leur confentement choisiroient des arbitres, qui dans fix mois termineroient le differend; durant lequel tems les difpenfateurs ne laifferoient pas d'employer le fonds destiné aux usages & services mentionnez, de la même maniere qu'ils avoient accoûtumez de faire auparavant jusqu'à la décision du procès.

que

Dès que le pape eut été informé de ce decret, il en fit faire de grandes plaintes au roi Ferdinand par fon nonce Delfino; mais ce prince fans avoir égard à ces plaintes, répondit que la néceffité dans laquelle il s'étoit trouvé, le mettoit à couvert de tout reproche, & qu'il n'avoit cherché que l'avantage de la religion,

On dit auffi que l'empereur ayant appris les plaintes du pape fur ce decret, dit à fes confidens, que ceux qui veulent faire leurs affaires, écoutent les plaintes de Paul IV. & qu'ils imitent les maximes de la cour de Rome. Le pape voyant qu'on ne l'é

Tome XXXI.

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