Imágenes de páginas
PDF
EPUB

France, par lequel elle laiffe aux Fran çois la ville de Calais, à condition qu'ils fortiront de l'Ecoffe, & renonceront à leurs prétentions fur ce royaume. Ce traité fit beaucoup de bruit dans l'Europe; on fit dire, à Rome, à Pafquin, que les François, en confervant Calais, avoient donné un petit foufflet à la reine Elizabeth; mais qu'en revanche, la reine Elizabeth avoit donné un grand coup de pied aux François, avec lequel elle les avoit chaffés de l'Ecoffe.

[1564.]*

Un nommé Benoît Accolti avoit formé le complot, avec quelques-uns de fes compagnons, de tuer le pape Pie IV, perfuadé qu'après fa mort, le fiége feroit occupé par un pontife véritablement faint; mais il fut découvert & arrêté avec fes complices, lorsqu'il étoit fur le point d'exécuter fon deffein. L'ambaffadeur d'Espagne ayant raconté ce fait à Elizabeth, cette princeffe lui répondit en riant: « Ces gens-là étoient » fous, fans doute, de vouloir tuer un pape » très-faint, pour en avoir un qui foit fim>>plement faint.... Il me femble, répliqua » l'ambaffadeur, qu'ils n'étoient pas fi fous » de croire qu'ils pourroient avoir un pape » réellement faint, au lieu de celui qui ne » l'eft que de nom. »

Le roi d'Efpagne avoit envoyé pour ambaffadeur à Londres, dom Alvaro de Quadra, évêque d'Aquila. Elizabeth fut très-mécontente qu'on lui envoyât un évêque, après qu'elle s'étoit déclarée ennemie de l'églife Romaine, & qu'elle avoit refufé de recevoir un nonce; mais elle diffimula fon reffentiment. L'ambaffadeur Espagnol affecta de ne paroître à la cour, qu'avec les habits épifcopaux, & tout le cortége pontifical. La vanité de la reine en fut flattée. Elle aimoit avoir à fa fuite des gens de ce caractere, & de ce fafte. Le prélat affectoit auffi de célébrer folemnellement toutes les fêtes dans fa chapelle, avec un grand concours de Catholiques. Il alloit même dans les maifons particulieres. baptifer les enfans, & porter l'Extrême-Onction aux malades. Elizabeth feignoit de ne pas s'en appercevoir. Mais, lorfqu'elle, apprit que l'ambaffadeur entretenoit des liaisons fecrettes avec les parens du cardinal Polus, qui étoient zélés Catholiques, & trèspuiffans dans le royaume, elle écrivit au roi d'Espagne, pour le prier de rappeller ce prélat. Le roi d'Espagne n'eut aucun égard à la lettre d'Elizabeth. La reine, piquée, fit arrêter l'ambaffadeur, fans en donner avis au roi fon maître; l'obligea de comparoître devant la juftice ordinaire, & de répondre à plufieurs chefs d'accufation

qu'on lui intenta; mais le malheureux prélat mourut pendant qu'on travailloit à fon procès. On s'attendoit que Philippe II vengeroit d'une maniere éclatante l'affront qu'il avoit reçu dans la perfonne de fon ambaffadeur: on fe trompoit. Toute l'Europe vit avec étonnement un prince fi fier diffimuler un outrage de cette nature, & fe contenter d'envoyer un autre ambaffadeur, en la place de l'évêque.

[1565.]

Elizabeth fut demandée en mariage par tous les princes de fon tems. Philippe II, le duc de Savoye, le roi de Suède, l'archiduc Ferdinand d'Autriche lui firent faire des propofitions qu'elle fçut toujours éluder. L'ambaffadeur de Venife, s'entretenant un jour avec celui d'Efpagne, fur la maniere avec laquelle Elizabeth amusoit tous ces divers prétendans, dit en plaisantant, que la reine réuffiroit mieux à tromper plufieurs amans, qu'à aimer un feul

mari.

*[ 1568. ]*

Marie Stuard, reine d'Ecoffe, coufine d'Elizabeth, après la mort de François II, roi de France, fon premier époux, s'étoit remariée avec le comte d'Arley. Elle s'en dégoûta

bientôt; &, environ après deux mois de froideur & de méfintelligence, le comte fut. trouvé mort dans fon lit. La reine, fans aucun égard pour la bienféance, époufa, peu de tems après, le comte de Bothuel; ce qui fit foupçonner ce feigneur d'avoir contribué à la mort du comte d'Arley. Les Ecoffois, irrités, commencerent à lui faire fon procès; mais il prit la fuite, & fe réfugia en Dannemarck. Marie fut arrê tée prifonniere dans fes propres Etats; mais, ayant trouvé le moyen de s'échapper, elle prit la réfolution de fe réfugier en France. Les vaiffeaux, fur lesquels elle s'étoit embarquée, furent contraints par la tempête de relâcher dans un port d'Angleterre. Elizabeth, qui avoit plufieurs raifons pour ne pas l'aimer, envoya auffi-tôt des ambaffadeurs, pour l'inviter de venir à Londres, & deux compagnies de gardes, pour l'y contraindre, en cas de refus. La précaution n'étoit pas inutile. Marie n'accepta point l'invitation, & remercia avec politeffe les ambaffadeurs. Elle étoit prête à fe rembarquer, lorfque le capitaine des gardes lui dit qu'il avoit ordre de l'arrêter; ce qui fut exécuté. Elizabeth témoigna beaucoup de joie, lorfqu'elle apprit que Marie étoit en fa puiffance. «Voici, dit-elle, » le premier fujet que j'ai de me réjouir

» des maximes de ma politique, depuis que » je fuis reine,»

~[1570.]

La reine fe rend à l'affemblée du parlement. Lorsqu'elle eut pris fa place, tous les feigneurs fe leverent, & l'orateur de la chambre-haute la fupplia, au nom de toute l'affemblée, de faire enfin choix d'un époux, ou de nommer celui qui lui devoit fuccéder. A peine l'orateur eut-il fini de parler,qu'il s'éleva une voix générale qui lui dit : « Oui, notre reine, nous vous con»jurons tous,au nom de la nation, de nous ac»corder cette grace. » Elizabeth, après avoir appaifé le bruit des voix, répondit qu'elle recevoit avec joie les témoignages d'affection, que fon peuple lui donnoit, mais qu'elle ne pouvoit lui faire d'autre réponse, finon qu'elle étoit trop vieille pour fe marier, & trop jeune pour faire fon teftament.

*[1572. ]A

Allant un jour à l'églife de S. Paul, elle rencontra à la porte un pauvre, qui lui de-, manda l'aumône en latin. Elizabeth, l'ayant fixé, reconnut que c'étoit le même homme qui s'étoit fouvent préfenté à elle à la porte de fa chapelle. Elle fe retourna vers ceux qui l'accompagnoient, & dit en la

« AnteriorContinuar »