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fervant, avoit répandu fur lui, exprès, ou par mégarde, un verre de vin. Cette action téméraire, dans la maison du roi, méritoit une punition exemplaire. Le coupable, felon la loi, devoit avoir le poing coupé. Sommerfet en follicitoit l'exécu tion de tout fon pouvoir; mais le roi lui pardonna, fans même ordonner aucune féparation en faveur de celui qui avoit reçu le foufflet.

Ce prince commençoit à fe degoûter de fon ancien favori. Il ceffa enfin de diffimuler. Il fe déclara ouvertement pour Villers, & le fit chevalier & gentilhomme de la chambre. Sommerfet, voyant chaque jour diminuer fa faveur & fon crédit, fongea à fe mettre à couvert des recherches qu'on pourroit faire fur la mort d'Overbury, & voulant profiter d'un reste d'amitié que le roi avoit encore pour lui, il lui demanda un pardon général de toutes les fautes qu'il pouvoit avoir faites pendant qu'il avoit été à fon fervice. Jacques y confentit, & fit dreffer l'acte de pardon, auffi étendu que Sommerfet pou voit le fouhaiter: il le figna même fans difficulté, peut-être fans le lire; mais le chancelier refufa d'y mettre le fceau. L'affaire en refta-là, & l'on n'en parla plus. Le roi, qui avoit coutume de faire, deux fois l'année, un voyage dans fon royaume, ce

que l'on appelloit fes progrès, commença celui d'été. Pendant fon voyage, il fut inftruit des particularités de la mort d'Overbury. Jacques recommanda un profond fecret à ceux qui lui apprirent la perfidie de Sommerfet. Il fcut lui-même parfaitement diffimuler; &, lorfqu'il fut de retour à Londres, il chercha une occafion de faire arrêter Sommerfet: elle fe préfenta bientôt. Jacques, qui étoit ennemi des querelles & des divifions, avoit ordonné à Villers d'aller rendre vifite à Sommerfet; de lui demander fon amitié, & de faire toutes les avances. Villers fe présenta devant Sommerfet, & exécuta tout ce que le roi lui avoit ordonné; mais le fier Sommerset le reçut avec mépris, & le traita indignement. Jacques, piqué de l'outrage fait à fon favori, donna ordre qu'on arrêtât Sommerfet. Lorfque l'officier vint fe faifir de fa perfonne, il le trouva auprès du roi, qui avoit gardé là-deffus un filence impénétrable. Il pouffa même la diffimulation jufqu'à lui dire, en le voyant enlever : » Quand eft-ce que je vous verrai, Sommer» fet?» Son procès fut inftruit en peu tems, & la fentence de mort décernée contre lui; mais un refte d'amitié, de la part du roi, lui fauva la vie.

de

[1621.]

Le chancelier Bacon, homme d'un grand génie, & d'une fcience profonde, fut accufé au parlement d'avoir pillé le peuple, pour fatisfaire l'avarice du roi, Il fut mis à la Tour, & on travailla vivement à fon procès. Il avoua lui-même la plupart des chofes, dont on l'accufoit. Il fut dépouillé de fa charge, & déclaré incapable d'avoir, à l'avenir, place dans la chambre des feigneurs. Il fe trouva réduit à une telle indigence, qu'il écrivit au roi, pour lui demander quelque fecours: «De peur, lui difoit»il, qu'après n'avoir fouhaité de vivre que » pour étudier, je ne fois obligé d'étudier » pour vivre.⟫

C'eft proprement dans ce parlement, que prirent naiffance les deux partis, qu'on nomme aujourd'hui les Tory's *, & les Wigghs**. Le premier de ces partis foutient l'autorité royale; l'autre défend les priviléges du peuple. Le parti du roi dominoit alors dans la chambre des pairs; celui du peuple, dans la chambre des com

* C'est le nom d'une troupe de brigands qui ravageoient le midi d'Angleterre.

Nom de brigands qui ravageoient l'E coffe,

munes. Jacques, par fon entêtement pour le pouvoir abfolu, peut être regardé comme l'auteur de tous les maux que ces deux factions ont caufés en Angleterre.

Pour bien entendre tout ce qui s'eft passé de plus intéreffant, pendant les troubles que les Torys & les Wigghs ont occafionnés principalement fous les trois règnes fuivans, il faut fçavoir que le parlement eft une affemblée compofée des trois Etats du royaume, fçavoir des évêques, des pairs, & des députés du peuple, convoqués par le roi, qui en eft le chef. On diftingue dans le parlement la chambre haute, & la chambre baffe. La chambre haute eft compofée de vingt-quatre évêques, & de deux archevêques; des pairs du royaume, qui font les ducs, les marquis, les comtes, vicomtes, & barons. Ils ont pour affeffeurs des juges. inftruits des loix du royaume, qui n'ont que le fimple titre de confeillers, fans avoir de voix délibérative.

La chambre baffe, appellée ordinaire ment chambre des communes, eft composée des députés des villes, bourgs, & autres, lieux. Il n'y a que le roi qui ait droit de convoquer le parlement. Pendant fon ab fence, ou fa minorité, ceux qui le repréfentent, peuvent le convoquer, mais tou jours au nom du roi. La convocation doit être faite, du moins quarante jours avant

que le parlement s'affemble. Le roi envoie dans tout le royaume une Lettre circulaire à chaque feigneur, foit fpirituel, foit temporel, par laquelle il leur enjoint de fe trouver en tel tems, à un certain lieu, pour conférer fur les affaires de l'Etat & de l'Eglife. Pour ce qui regarde la maniere de convoquer la chambre baffe, le roi envoie d'autres Lettres aux lieutenans de chaque province, qu'on nomme shériffs, pour qu'ils avertiffent le peuple de leur diftrict de choifir deux chevaliers pour la province, deux bourgeois pour chaque ville, & un ou deux pour chaque bourg, château, ou feigneurie.

Depuis le tems que les membres du parlement font partis pour fe rendre au lieu marqué, jufqu'à ce qu'ils foient de retour en leur maison, ils font exempts, eux & leur famille, de toutes pourfuites, faifies & emprifonnemens, pour quelque fujet que ce foit, excepté pour trahifon, félonie, ou fédition.

Il dépend abfolument du roi de marquer le lieu où fe doit tenir le parlement. Il s'affemble ordinairement dans l'ancien palais de Westminster. Les deux chambres font dans deux falles particulières garnies de bancs. Ces deux falles font voifines l'une de l'autre. Il y a dans le palais de Westminster plufieurs caffés, où les mef

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