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Chrift une fi indigne pensée. Mais après avoir demandé au Pere tout-puiffant, que tous les hommes adorent fon faint nom, que nous regnions avec lui dans le Paradis, que pour cela nous faffions fa fainte volonté fur la Terre, comme les Anges la font dans les Cieux; Jefus Chrift veut que nous demandions furtout un fecours proportionné à une fi noble fin, un pain au-deffus de toute fubftance, (a) un pain qui feul mérite le nom de vraie nourriture de l'homme, parce que feul il donne l'immortalité à l'ame & au corps de l'homme; en un mot JesusChrift dans l'Euchariftie pour fervir à nos ames d'aliment journalier : c'eft pour cela que l'Eglife fait réciter l'Oraifon Dominicale à chaque Meffe.

THEOPHILE. Jamais je n'ai voulu me rendre à cette raifon, c'eft que je ne l'avois pas comprife jufqu'à ce moment; mais elle faute aux yeux, & Jefus-Chrift s'interprete clairement lui-même.

LE DOCTEUR. Vous la comprendrez bien mieux, par ce que Jesus-Christ dit une année avant l'inftitution de l'Eucha

(a) Panem verum..... caro mea verè eft cibus.... Qui manducat meam carnem habet vitam æternam, Ego refufcitabo eum. Ioan, 6.

riftie, lorsqu'il fit à un peuple nom breux la promeffe folemnelle d'établir ce Sacrement adorable. Je fuis, dit-il, le pain vivant (a), le pain vivant defcendu du Ciel. Vos Peres ont mangé la manne au défert & ils font morts. Le pain que je vous donnerai (b) eft véritablement defcendu du Ciel, & qui en mangera ne mourra point: or, ce pain que je vous don •nerai, c'est ma Chair. Oui, ma Chair; eft véritablement une nourriture; (c) ce qu'il inculque jufqu'à douze fois dans le Chapitre 6. de S. Jean. Or la nourriture fe prend tous les jours, & non une fois par an, ni une fois par mois, ni même une fois par femaine, le pain fe mange tous les jours. Il en eft de même de l'Eu chariftie que Jefus-Chrift promet d'inf tituer pour être tous les jours la nourriture de nos ames. En croirez-vous Je fus-Chrift? Ce n'eft plus une parole feule; c'eft un difcours des plus forts, des plus longs & des plus clairs de notre divin Maître, où il traite cette matiere à fond, où il conclut toujours à la Com

(a) Ego fum panis vitæ. Joan. 6. v. 48. Panis quem ego dabo, caro mea eft pro mundi vita. Ibid.

(c) Caro mea verè eft cibus. Ibid.

munion fréquente, tantôt relevant l'excellence de ce pain de vie, de ce pain defcendu du Ciel, de ce pain, dit-il, qui eft ma chair, tantôt 'annonçant des récompenfes à celui qui le mangera: (a) je le reffufciterai, il aura la vie éternelle; tantôt menaçant de mort, & de mort éternelle, celui qui ne mangera pas fa chair, & s'y engageant par ferment (b). Communiez donc fouvent, ou votre falut n'est pas en fûreté.

THEOPHILE. C'est un Dieu qui dit : ma chair eft vraiment une nourriture, caro mea verè eft cibus. C'est un Dieu qui menace: nifi manducavèritis. J'admire, je tremble. Je croyois n'être coupable devant Dieu qu'en communiant fouvent voilà Jefus-Chrift qui menace d'une perte éternelle ceux qui font des Communions rares. O que j'ai été aveuglé !

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LE DOCTEUR. Dans cet admirable difcours fur l'Euchariftie, le Sauveur la

(a) Qui manducat meam carnem habet vitam æternam, & ego refufcitabo eum in noviffimo die. Ibid.

(b) Amen amen dico vobis, nifi manducaveritis carnem Filii hominis, non habebitis vitam in vobis. Ibid.

C

compare à la manne, (a) dont les Ifraélites furent nourris dans le defert pendant quarante ans. Ce n'eft pas fans deffein. Chaque jour elle tomboit du ciel ; on la recueilloit chaque jour, & l'on s'en nourriffoit. Le vrai pain de vie eft Jcfus-Chrift qui defcend chaque jour du ciel pour nourrir le peuple chrétien ; on doit donc chaque jour s'en nourrir dans le pélerinage & le defert de cette vie.Jefus-Chrift pouvoit-il en plus de façons nous infinuer la Communion fréquente ? Ce divin Sauveur ne s'explique-t-il pas affez lui-même ; ne nous montre-t-il pas évidemment quel eft fon efprit?

THEOPHILE.Je me mets à la place des Apôtres & du peuple, qui l'entendirent parler fur l'Euchariftie, qui oüirent la promeffe qu'il fit de l'inftituer, & qui affifterent à fon inftitution; on ne peut conclurre autre chofe de tout cela, finon que la volonté expreffe de Jefus-Chrift eft que l'on reçoive très-fréquemment 1 Euchariftie.

LE DOCTEUR. Vous découvrirez encore bien mieux l'efprit du Sauveur en examinant le double deffein qu'il s'eft

(a) Patres veftri manducaverunt manna in deferto, & mortui funt, Ibid.

propofé dans ce Sacrement adorable', c'eft fa gloire & notre falut, en vivant continuellement dans notre fouvenir, en y retraçant fans ceffe les myfleres de fon amour,en gravant dans nos cœurs les fentimens de la plus vive reconnoiffance, en rappellant par fa préfence réelle fes ineffables bontés, en nous engageant à le bénir, & à le louer fans ceffe. C'eft pourquoi il dit aux Apôtres après l'inftitution de l'Euchariftie: Faites ceci en mémoire de moi;hoc facite in meam commemorationem. Comme s'il difoit, vous pourriez bien-tôt oublier les grandes chofes que j'ai faites pour vous, & perdre l'idée de mes grandeurs, de mes bontés, de mes miracles; je viendrai d'une maniere invifible, mais réelle, renouveller tout cela aux yeux de votre Foi, quand vous me recevrez dans l'Euchariflie. Cela peut-il s'exécuter fi nous ne le recevons qu'une fois l'année, ou du moins rarement? Auronsnõus un fouvenir continuel, un fouvenir bien vif & bien frappant du Sauveur ? Hélas! nous l'oublierons, nous cefferons de l'aimer, & bien-tôt nous cefferons de le fervir.

THEOPHILE.L'expérience ne confirme que trop ce que vous dites: mais

Luc. 22.

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