J'avoüray cependant, & je le puis fans crime, Ne revenez jamais que je ne vous rappelle; ANDRONIC. Eft-il temps ce bonheur dont vous flattez mon ame, Helas en vous perdant je l'ay perdu, Madame, fort, Qu'un cœur comme le mien merite un autre fort; IRENE. Croyez-vous ma conftance fi ferme ! Ce reproche cruel, plus que tous vos regrets, Etonne mon courage, & confond mes projets. Ab, Prince, penfez-vous qu'infenfible, inhumaine, Mes yeux fans s'émouvoir régardent votre peine? Que pendant les horreurs d'un exil rigoureux, Vous foyez feul à plaindre & le feul malheureux ? Mais que dis-je? où m'entraîne une force inconnuë? Ah! pourquoy veniez-vous chercher encor ma veuë? Partez, Prince, c'est trop prolonger vos adieux. EUDOXE. Ah! Madame, je voy l'Empereur en ces lieux. L'EMPEREUR, ANDRONIC, IRENE, EUDOXE, LEON, MARCENE. L'EMPEREUR. Adame, quel étoit fon difçours & le vôtre ? Mon abord impréveu vous trouble l'un & l'autre, Je le voy, tous vos foins ne le peuvent cacher. IRENE. Andronic jufqu'icy m'étoit venu chercher ; Et fouffrez qu'à les vœux j'ajoûte ma priere. SCENE V. L'EMPEREUR, ANDRONIC, LEON, MARCENE. L'EMPEREUR. Prince, vous cedez à votre impatience? Vous êtes refolu d'abandonner Bilance Vous me faites encor preffer d'y consentir ANDRONIC. Ouy, Seigneur, & déja je brûle de partir ; L'EMPEREUR. Je n'entens qu'à regret un difcours qui me gefne Mais puifque malgré moy, puifque fans complaifance Vous me parlez encor d'un projet qui m'offense, Ne vous étonnez pas de mon jufte refus. ANDRONIC. Ah, Seigneur! voulez-vous..." L'EMPEREUR. Ne me repliquez plus Songez à m'obeïr d'une ame plus foûmise, Dans un profond oubly laiffons cette entreprise, Et ne fomentez point des foupçons dangereux Dont nous pourrions un jour nous repentir tous deux. ANDRONIC. Eh bien, Seigneur, je fors; mais c'eft trop me contraindre, Dans l'état où je fuis, je ne fçaurois plus feindre ; Et d'un fi dur refus les perfides auteurs Me pourroient bien un jour payer tous mes malheurs. SCENE VI. L'EMPEREUR, LEON, MARCENE. L'EMPEREUR. Uelle temerité, quel difcours, quelle audacel LEON. Vous voyez, Seigneur, qu'il nous menace, Ses chagrins qu'il ne peut élever jufqu'à vous, Avec plus de fureur retomberont fur nous. Que dis-je ? croyez-vous que ce Prince s'arrefte A faire fur nous feuls éclatter la tempeste ? Que je prévoy de maux pour nos fils malheureux! Qu'Andronic leur prepare un deftin rigoureux ! MARCENE. Je ne m'allarme point de tout ce qu'il peut faire, |