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J'avoüray cependant, & je le puis fans crime,
Que vous aurez toujours ma plus parfaite eftime;
Que pour vous applaudir, pour louer vos exploits,
Je joindray mon fuffrage à la commune voix;
Que pour tous mes plaifirs le feul que j'imagine,
C'eft de voir les hauts faits où le Ciel vous deftine,
Et de votre grand nom cent Monarques jaloux;
Juftifier le choix que j'avois fait de vous.
Aprés cela partez. A votre exil fidelle,

Ne revenez jamais que je ne vous rappelle;
Faites-vous un bonheur fous de nouveaux climats
Qu'au lieux où je ferois vous ne trouverez pas.

ANDRONIC.

Eft-il temps ce bonheur dont vous flattez mon

ame,

Helas en vous perdant je l'ay perdu, Madame,
Et je n'en connois plus où je puiffe afpirer;
Cette perte eft un coup qu'on ne peut reparer.
Si quelque foin encore occupe mon courage,
C'eft de faire rougir le deftin qui m'outrage,
D'apprendre à l'Univers, par quelque illuftre ef-

fort,

Qu'un cœur comme le mien merite un autre fort;
Et payant de mon fang ma premiere victoire,
D'elever de mes maux un trophée à ma gloire.
Vous cependant, Madame, oubliez mes malheursa
Et tandis que nourry de foûpirs & de pleurs,
Mes déplorables jours vont courir à leur terme
Regnez, &...

IRENE.

Croyez-vous ma conftance fi ferme ! Ce reproche cruel, plus que tous vos regrets, Etonne mon courage, & confond mes projets. Ab, Prince, penfez-vous qu'infenfible, inhumaine,

Mes yeux fans s'émouvoir régardent votre peine? Que pendant les horreurs d'un exil rigoureux, Vous foyez feul à plaindre & le feul malheureux ? Mais que dis-je? où m'entraîne une force inconnuë? Ah! pourquoy veniez-vous chercher encor ma

veuë?

Partez, Prince, c'est trop prolonger vos adieux. EUDOXE.

Ah! Madame, je voy l'Empereur en ces lieux.

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L'EMPEREUR, ANDRONIC, IRENE, EUDOXE, LEON, MARCENE.

L'EMPEREUR.

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Adame, quel étoit fon difçours & le vôtre ? Mon abord impréveu vous trouble l'un & l'autre,

Je le voy, tous vos foins ne le peuvent cacher.

IRENE.

Andronic jufqu'icy m'étoit venu chercher ;
Seigneur, il a jugé mon fecours neceffaire
Pour obtenir de vous un ayeu qu'il efpere:
Il vient de me preffer de vous parler pour luy,
Chaque moment qu'il perd augmente fon ennuy
Laiffez un libre cours à fon ardeur guerriere,

Et fouffrez qu'à les vœux j'ajoûte ma priere.
Je fais ce que puis, Prince, vous l'entendez:
Puiffiez-vous obtenir ce que vous demandez !

SCENE V.

L'EMPEREUR, ANDRONIC, LEON, MARCENE.

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L'EMPEREUR.

Prince, vous cedez à votre impatience?

Vous êtes refolu d'abandonner Bilance Vous me faites encor preffer d'y consentir

ANDRONIC.

Ouy, Seigneur, & déja je brûle de partir ;
Je ne puis refifter à l'ardeur qui m'entraîne.

L'EMPEREUR.

Je n'entens qu'à regret un difcours qui me gefne
Et j'aurois fouhaitté que ĉe fatal deffein,
Prince, ne fût jamais entré dans votre sein.
Je vous ay dit tantôt, moins en maître qu'en pere,
Que je n'approuvois point ce départ témeraire ;
C'en eftoit trop, je croy, pour vous perfuader
Que vous m'offenferiez à le redemander :

Mais puifque malgré moy, puifque fans complaifance

Vous me parlez encor d'un projet qui m'offense, Ne vous étonnez pas de mon jufte refus.

ANDRONIC.

Ah, Seigneur! voulez-vous..."

L'EMPEREUR.

Ne me repliquez plus Songez à m'obeïr d'une ame plus foûmise, Dans un profond oubly laiffons cette entreprise, Et ne fomentez point des foupçons dangereux Dont nous pourrions un jour nous repentir tous deux.

ANDRONIC.

Eh bien, Seigneur, je fors; mais c'eft trop me contraindre,

Dans l'état où je fuis, je ne fçaurois plus feindre ; Et d'un fi dur refus les perfides auteurs

Me pourroient bien un jour payer tous mes malheurs.

SCENE VI.

L'EMPEREUR, LEON,

MARCENE.

L'EMPEREUR.

Uelle temerité, quel difcours, quelle audacel
A mes yeux!

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LEON.

Vous voyez, Seigneur, qu'il nous menace, Ses chagrins qu'il ne peut élever jufqu'à vous, Avec plus de fureur retomberont fur nous. Que dis-je ? croyez-vous que ce Prince s'arrefte A faire fur nous feuls éclatter la tempeste ? Que je prévoy de maux pour nos fils malheureux! Qu'Andronic leur prepare un deftin rigoureux !

MARCENE.

Je ne m'allarme point de tout ce qu'il peut faire,
Je prens peu garde au fils, s'il faut fervir le pere
Andronic me dût-il accabler le premier,
Seigneur, de fes deffeins il faut vous défier.
Son ame, d'un refus eût été moins furprife,
S'il n'eût point medité quelque grande entreprise
Iroit-il donc chercher des peuples revoltez,
S'il ne vouloit fervir leurs infidelitez ?
Qui pourroit l'arracher du fein de la patrie,
S'il ne vouloit contre elle exercer fa furie!
Et peut-être va-t'il, par Leonce engagé,

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