Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Et fans un grand malheur pas un n'a la puiffance De me faire fortir où je fuis enchaîné.

Je loge en même endroit des paffions contrai

res,

La vaillance, la peur, la joye & les ennuis :
Je n'ai pas une fœur, j'ai million de freres ;
Et quiconque a du cœur, peut fçavoir qui je fuis.

NA NG NG NG NG NG NG NG NG NG NG NG NG: VE

:

CVIII,

A mere eft claire & blanche, je fuis fombre & noire :

MA

Nous naiffons parmi vous, & mourons tous les jours:

Au lieu de nous donner un mutuel fecours,

Nous cherchons toutes deux l'honneur & la victoire.

Elle par des efforts que l'on ne fçauroit croire, Me chaffe, me pourfuit, & m'agite toûjours: Moi j'évite les coups par de fubtils détours, J'amoindris fa grandeur & j'obfcurcis fa gioire.

[ocr errors]

Mais quand je me défens avec plus de vigueur, Qu'elle ne jette plus que des traits de langueur, La nuit qui nous furprend finit nôtre querelle,

Alors chacun nous croit vifiblement périr : Et comme le deftin me fait naître avec elle, Je meurs aû même instant que tu la vois mourir,

[ocr errors]

JE

CIX.

E meurs & je renais, & par un fort nouveau Les lieux ou je naquis me fervent de tombeau ; Celui qui m'a formé fait l'or, l'argent, le cuivre : Je fuis utile à tous en la guerre, en la paix ; Il me faut enterrer pour me faire revivre; Et fi je ne pourris, je ne revis jamais.

Je

CX.

E marche nuit & jour fans craindre le danger, Je fais le plus fouvent mon féjour à la ville; Pendant le mauvais tems voulez vous voyager, Vous connoîtrez alors combien je fuis utile.

Selon l'occafion je change d'ornemens, Tantôt je fuis vêtu d'une riche écarlate, Tantôt d'un beau velours orné de passemens, Où l'or de tous côtez affez fouvent éclate.

De crainte quelquefois que les broüillars ou

l'eau

Ne foüillent fans refpect l'habit dont je me pare, Je fuis toûjours garni d'un affez bon manteau, Qui des traits du Soleil durant l'Esté vous pare.

Un nombre de valets accompagne mes pas, Je renferme en mon fein les plus aimables Dames; La fierté que j'infpire anime leurs appas, Quelquefois de l'amour j'ai foulagé les flâmes.

Je loge le bonheur, & mon malheur furprend ; La fortune de moi cruellement fe joue ;*

Car comme un criminel haut & court on me pend, Pour me traîner après de mon long fur la rouë.

[ocr errors]

L

CX I.

Es Rois font mes fujets, les vainqueurs mes
efclaves ;

Je force les pius forts, je dompte les plus braves;
Contre moi les efforts fe trouvent fuperflus :
Je cause du chagrin, les pleurs & le martyre,
A ceux que ma puiffance à me fervir attire,
Et je fais plus de mal à ceux qui m'aiment plus.

::

CXII.

OUVENT on me ravit, mais toûjours je de

SOUVEL

meure,

Sans paffer dans les mains de celui qui me prend, Je fuis le plus petit, mais je fuis le plus grand; Et l'on ne me peut voir, qu'auffi-tôt je ne meure,

XXX XX XG NG NG NG NE NE NE NE NE

CXIII.

Ele me promene par les champs ;

N figure triangulaire,

Je

Et quand je careffe ma mere,
Je la gratte avec les dents,

CXIV.

ANS crainte & fans effroi tout-à-coup j'obscur

SANS

La chofe la plus claire & la moins inconnuë: Mais en l'obfcurciffant, toûjours je l'éclaircis ; Et l'augmente toûjours, quand je la diminue.

P

CX V.

AR ́ma légereté l'on connoît ma finesse, Vous me voyez femelle, & mâle je nâquis; Jai le peuple fous moi, l'Eglife & la Nobleife, Et porte quelquefois des ornemens exquis : Je touche également les Amans & les Dames, Jaccompagne en tous lieux leurs plus fecrettes flames;

Et mon voile léger dérobe la beauté.

Les hommes les moins purs aiment ma pureté, Je réfifte à Thétis; mais helas! fon contraire Peut d'un traître baiser tout-à-coup me défaire.

CXVI.

corps fec & menu, fans yeux & fans oreilles,

A des pieds qui jamais ne me fçurent porter;
Bien que j'ignore tout, on me vient confulter
Lorsqu'on veut commencer les plus hautes mer-
veilles.

Une main me fuffit pour aller haut & bas,
Si je monte ou defcends, l'on obferve mes pas.
Je fuis utile en paix, je fuis utile en guerre,
J'on connoît mon pouvoir dans le Palais des Rois;
Dans les Temples des Dieux & par toute la terre.
Aux plus fortes Citez je fais fuivre mes loix.

[ocr errors][merged small]

J'A1 grand nombre de fœurs, & je n'ai point

de frere,

Mais des foeurs qui n'ont pas toûjours mêmes

parens ;

Car comme nous naiffons en des lieux différens,
De même changeons-nous ou de pere ou de

mere.

Mes membres font couverts d'un long poil in-
vifible,

Et d'écailles de feu mon corps est tout femé:
Mais bien qu'il foit velu, que le fort l'ait armé,
Tu ne le trouveras ni pesant ni terrible.

[ocr errors]

Je perds avec l'Efté la force & le courage,

On m'accuse de mordre, & je n'ai point de dents:
-Qui m'entretient me perd, quand les reftes ardens
D'un trait envenimé font découvrir ma rage.

Mes pieds fervent fort peu pour me rendre
mobile,

Avec tout leur fecours à peine fais-je un pas ;
Mais pour me garantir d'un funefte trépas,
J'ai bien d'autres refforts qui me rendent agile.

Je me fais bien sentir fans aimer à paroître,
Je parcours quelquefois des lieux délicieux;
Devine qui pourra ; mais fçache que deux yeux
Souvent ne peuvent pas fuffire à me connoître.

[blocks in formation]
« AnteriorContinuar »