100 LE POUVOIR DES FABLES. PROLOGUE. La vérité toute nue Messieurs les auditeurs, qui par votre suffrage OU ESOPE A LA VILLE. ACTE PREMIER. SCÈNE I. LÉARQUE, , Euphrosine, NFIN ce grand esprit que je brûlois de voir, dis-moi qu'il t'en semble : Ne le trouves-tu pas un aimable homme ? EUPHROSINE. Moi? LÉ ARQUE. Ou. EUPHROSINE. Je n'en connois point qui lui ressemble. LÉARQUE, Loris. Et toi, Coinment le trouves-tu ? Je te crois délicate. DORIS. Li ne voulez-vous point , monsieur, que je le fatte ? LÉ ARQUE. DORIS. LÉARQUE, DORIS. C'est un vilain magot, LÉ ARQUE. DORIS. Si cela vous déplaît, souffrez done que je mente. LÉARQUE, DORIS. Oh que pardonnez-moi! LÉARQUE. s'a lui fit le corps laid , il lui fit l'âme belle. Plât aux dieux, tel qu'il est, qu'Euphrosine lui plût? EUPHROSINE. Et si je lui plaisois quel seroit votre but, LÉARQUE. EUPHROSINE. Mon époux, juste ciel ! que venez-vous de dire? DORIS Bon! ne voyez-vous pas qu'il nous veut faire rire ? LÉARQUE, à Doris. Esope, selon toi, n'est donc pas son fait ? DORIS. Non. LÉARQUE. e DORIS. ses États. Et quel diantre d'esprit trouvez-vous donc qu'il ait ? LÉARQUE, à Euphrosine. Ecoute; en peu de mots en voici le portrait. Il est laid ; mais, crois-moi, c'est une bagatelle : Un homme est assez beau quand il a l'âme belle; Et dans le plus bas rang comme dans le plus haut, Toujours celle d’Esope a paru sans défaut. Crésus à qui le ciel fit un si beau partage Qu'une richesse immense est son moindre avantage, Crésus, le plus heureux de tous les potentats, Se repose sur lui du soin de Dans un poste si haut, à quoi crois-tu qu'il pense ? A vivre dans le faste et parmi l'opulence ? A bâtir sa maison des dépouilles d'autrui ? Il sert le roi, le peuple , et ne fait rien pour lui, Au riche comme au pauvre il tache d’être utile ; Et depuis quatre mois qu'il va de ville en ville, Il enseigne aux petits à faire leur devoir, Et tempère des grands l'impétueux pouvoir : A la droite raison il veut que tout se rende; Qu'en père de son peuple un monarque commande, Et que, mourant plutôt que d'oser le trahir, Un sujet se restreigne à l'honneur d'obéir. Comme il est dangereux d'être trop véritable, Il se sert du secours que lui prête la fable ; Et sous les noirs abjects de divers animaux, Applaudit les vertus et reprend les défauts. uoique par lsienséance il ne nomm personne, Si l'on ne se connoît, au moins on se soupçonne, Et, par cette industrie, en quelque rang qu’on soit, |