Il n'est point où je suis de tragique où l'on pleure. LE SECOND COMÉDIEN. Oui, monsieur. A quelle heure? LE PREMIER COMÉDIEN. Dans une heure au plus tard nous allons commencer. ÉSOPE. Voilà le vrai moyen de ne pas m'annoncer. On n'aura pas le temps de faire votre éloge. ÉSOPE. Et m'en peut-on faire un, à moins qu'il ne soit faux? LE SECOND COMÉDIEN. A vous servir ailleurs je ferai mon possible. Adieu... Je vois des gens que j'ai mis en courroux, Que je veux débaucher pour les mener chez vous. (Les deux comédiens sortent.} SCÈNE V. LÉARQUE, EUPHROSINE, AGÉNOR, DORIS, ÉSOPE. ÉSOPE. O çà, je suis ravi de nous voir tous ensemble: LÉARQUE. De vous donner ma fille. ÉSOPE. Et quand ? LÉARQUE. Demain. EUPHROSINE. Demain! Mon père, à mon égard montrez-vous moins sévère : ÉSOPE. Eh bien donc à demain, puisque monsieur le veut, Ne vous en flattez point, si vous n'avez envie LÉARQUE. Il est vrai, mais monsieur est privilégié. É SOPE. Voyons donc, s'il vous plaît, quel est mon privilège. Suis-je plus beau, mieux fait, noble, riche, enfin ? qu'ai-je? Parlez. Peut-être que demain je ne le serai plus; Et comme la faveur n'est qu'un éclair qui brille, Elle a, quand elle change, un retour si cuisant, Ce sont les plus beaux feux que puisse unir l'hymen ; L'HOMME, ET LES DEUX FEMMES. FABLE. Un homme des plus insensés, A quarante-cinq ans, le cœur rempli de flammes, Pour le faire enrager une c'étoit assez. L'une avoit soixante ans, et l'autre vingt et quatre : Toutes deux à l'envi le vouloient à leur goût; Et souvent c'étoit à se battre A qui mieux en viendroit à bout. L'une et l'autre n'oublioit rien : La vieille souhaitoit qu'il parût de son âge, La jeune auroit voulu qu'il eût été du sien. Tous les matins, sous un prétexte honnête De montrer leur amour par de petits devoirs, Chacune, en le peignant, arrachoit de sa tête, L'une les cheveux blancs, l'autre les cheveux noirs. Enfin, chauve et pelé, sa présence importune Le rendit partout odieux. Pour combler un hymen de joie et de fortune, Et pour l'autre il étoit trop vieux, Monsieur le gouverneur, vous me devez entendre. J'accepte avec plaisir Agénor pour mon gendre : AGÉNOR. Je ne puis dire un mot, tant vous m'avez surpris! Monsieur, c'est justement que chacun vous renomme: Je doute que la terre ait un plus honnête homme. EUPHROSINE, à Ésope. Vous voyez mes raisons pour ne vous point aimer; Mais je n'en ai pas moins pour vous bien estimer : Je m'en fais un devoir que rien ne peut enfreindre. ÉSOPE, à Doris. Vous qui du chat-huant n'avez plus rien à craindre.... / DORIS. Oh! monsieur, contre moi n'ayez point de courroux; Fort bien! c'est s'excuser d'une belle manière! N'importe, oublions tout rendons la joie entière. (Aux deux amants.) Loin de mettre un obstacle à vos justes désirs, FIN D'ESOPE A LA VILLE |