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ZACORIN.

Seigneur, permettez-moi de vous dire la chose.

PHILANDRE.

Je ne veux rien entendre, et dans un tel malheur
Je veux m'abandonner à toute ma douleur.

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Comment! quel est donc ce langage?

Je joue ici, me semble, un plaisant personnage.
Quoi! traiter de la sorte un amant couronné,
Qui de mille vertus se trouve assaisonné?

ZACORIN.

Il faut finir ce trouble. Enfin, belle Lucelle,
Vous vous obstinez donc à demeurer fidèle?

Eh bien! il faut mourir; mais avant ce moment,
Ne me refusez pas du moins ce diamant :
Il me rappellera votre charmante idée

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Je respire, et n'ai plus à craindre pour ma vie. dieu merci, rentrer dans sa folie.

Le roi

va,

LUCELLE, dans son bon sens.

Que vois-je ? quel objet se vient offrir à moi? Philandre, cher Philandre, est-ce vous que je voi? Hélas! d'où sortez-vous, et d'où viens-je moi-même ?

PHILANDRE.

Elle me reconnoît. Ah! ma joie est extrême!
Lucelle en son bon sens, quel heureux changement!
Qui pouvoit lui causer ce triste égarement?

ZACORIN.

La bague qu'à l'instant le roi vient de reprendre ;
Mais ce sont des secrets qu'on saura vous apprendre.

PHILANDRE.

Quoi! ne puis-je savoir en peu de mots?...

ZACORIN.

C'est un tour qu'a joué notre magicien.

LE ROI, dans sa folie.

Eh bien !

Où suis-je ? quels transports! c'est l'enfer qui m'appelle;
Non, c'est la jalousie. Eh bien! que me veut-elle?
Me voilà. Quels démons, par leur brûlante ardeur,
Me dévorent?... Je sens tout l'enfer dans mon cœur.

PHILANDRE.

Allons trouver Alquif, il saura nous instruire
Comment dans tout ceci nous devons nous conduire.
Toi, reste, Zacorin, pour observer le roi.

Dans un moment d'ici nous revenons à toi.

SCÈNE VI.

LE ROI, ZACORIN.

LE ROI, dans sa folie.

Oui, le sceptre me pèse, il faut que je le quitte;
Il traîne trop de soins, trop d'ennuis à sa suite.
Oui, je le quitterai, tous vos efforts sont vains;
Mais je le veux du moins remettre en bonnes mains,
Choisir pour successeur un prince débonnaire,
Sage, bien fait, prudent. Ah! voici mon affaire.

SCENE VII.

LE ROI, ZACORIN, GUILLOT.

LE ROI, à Guillot. SEIGNEUR, montez au trône, et commandez ici.

GUILLOT.

Connoissez-vous Guillot, pour lui parler ainsi?

ZACORIN.

Je ne m'attendois pas à ce trait de folie:

Mais il faut l'appuyer.

LE ROI.

Allons donc, je vous prie,

Régnez, je vous remets mon trône et mes États.

GUILLOT.

Vous vous gaussez de moi, je ne les prendrai pas.

ZACORIN.

Quoi! tu peux refuser l'offre d'une couronne?

GUILLOT.

C'est pour se goberger, morgué, qu'il me la donne.

Théâtre. Com. en vers. 4.

23

ZACORIN.

Non vraiment, c'est le sort qui décide pour toi.
Chacun dans ce pays à son tour devient roi,

Voilà ton tour venu.

GUILLOT.

Ça pourroit-il bien être ?

Mais dès demain possible on va m'envoyer paître.

ZACORIN.

Et quand cela seroit, que t'importe, innocent?
Il est beau de régner, ne fût-ce qu'un instant.

GUILLOT.

Morgué ce trône est haut, et j'en crains fort la chute: Ne me faites pas faire au moins la culebute.

ZACORIN.

Votre seule vertu vous y fait parvenir,
Et nous mettrons nos soins à vous y maintenir.
LE ROI, 6tant sa couronne.

Cette couronne est due à votre auguste tête.

GUILLOT.

Ah! mon auguste tête est, sire, toute prête.
Morgué, boutez dessus.

LE ROI.

Prenez ce sceptre en main.

GUILLOT.

Fort bien, me voilà donc à présent souverain?
ZACORIN, ótant le manteau du roi..
Quand ce manteau royal sera sur vos épaules.

GUILLOT.

Cette cérémonie est morgué des plus drôles;
Jamais si plaisamment je ne fus habillé.
A quel jeu jouons-nous?

ZACORIN.

C'est au roi dépouillé.

LE ROI.

Que parlez-vous de jeu ? vous croyez qu'on se raille?

Montez, montez au trône.

GUILLOT, montant sur le trône.

Allons, vaille

que vaille.

ZACORIN.

Ce monarque est bien fou, mais je trouve aujourd'hui Que le pauvre Guillot est aussi fou que lui.

Votre nom?

LE ROI.

GUILLOT.

C'est Guillot! sire, à votre service!

LE ROI.

Que de ce nom fameux Cocagne retentisse,
Et qu'au son de la trompe on entende crier :
Vive le roi Guillot! vive Guillot premier!

GUILLOT, sur le trône:

Vous souhaitez qu'il vive, eh bien! à la bonne heure.
Et moi je tâcherai d'empêcher qu'il ne meure,
Morgué, que de plaisir ! te voilà roi, Guillot,
Tu vas boire parguenne en tirelarigot;

Tu dormiras trois jours si tu veux tout de suite,
Personne n'aura rien à voir à ta conduite
Drès que tu parleras, comme t'as de l'esprit,
Tout chacun s'écriera, morgué que c'est bian dit!
Droits comme des piquets, campés dans ton passage,
Les courtisans flatteux viendront te rendre hommage.
Les beautés de la cour s'en vont être à ton choix.
Tu n'auras qu'à chifler et remuer les doigts,

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