Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[blocks in formation]

d'Henri lv. doit

devoit pas aller fi fonvent feul & mal accompagné : La peur, difoit-il, ne pas entrer dans une ame Royale, je fuis entre les mains de Dieu; qui méprifera fa vie, fera toujours maître de la mienne, fans que mes Gardes puiffent l'empêcher; je vis d'une maniere qui doit bannir toute défiance; il n'appartient qu'aux Tyrans d'être toujours en frayeur.

une

Un Ambaffadeur d'Espagne, après la paix de Vervins, furpris de voir Paris embelli, lui dit : Sire, voici Ville qui a bien changé de face. Ne vous en étonnez pas, lui dit le Roi; quand le maître n'eft pas en fa maifon, tour y eft en défordre: mais quand il eft revenu, fa présence y fert d'ornement, & tont y profite.

Il avoit été dans de grandes néceffités au commencement de fon Regne; il difoit qu'il s'étoit vu Roi fans Royaume, mari fans femme, & faifant la guerre fans argent. Comme fes cheveux & fa barbe grifonnerent de bonne heure, il difoit en les montrant: Le vent de l'adverfité a foufflé de ce côté-là.

Nereftan, fort brave Gentilhomme, lui faifoit un beau Régiment; & com

Bons

fea imens d'Henri IV.

me il proteftoit qu'il ne défiroit pour récompenfe que la gloire de le fervit, mois & de Roi répondit: C'est ainfi que doivent parler les bons fajets; ils doivent oublier leurs fervices, mais le Prince doit s'en fouvenir.

Les Huguenots lui demandant des places de fureté, il leur dit: Je fuis la feule affurance de mes fujets, je n'ai encore manqué de foi à perfonne ; & comme ils repliquerent que Henri III. deur en avoit bien donné: Henri III. leur dit-il, cédoit au tems, il vous craignoit & ne vous aimoit point; mais moi je vous aime & ne vous crains pas. On a dit que Louis XIV. difoit, qu'il ne les aimoit & ne les craignoit point.

On lui parloit d'un certain Capitaine qui avoit été Ligueur, & qui étoit fort brave; on lui difoit que malgré le pardon qu'il avoit obtenu de ce Prince, & quelques bienfaits qu'il en eût reçus, il ne l'aimoit pourtant point: Je lui veux, dit-il, faire tant de bien, que je le forcerai de m'aimer.

Il fe promenoit dans les allées de Monceaux, & étoit fuivi du Duc de Mayenne, qui lui avoit fait la guerre,

Bons

mots

fentimens

& lui avoit difputé la Couronne : ce & Duc étoit fort gras & mauvais piéd'Henri IV. ton; le Roi prit plaifir à le laffer, en le faifant marcher long-tems: le Duc lui demanda quartier: Mon Coufin, lui dit le Roi, voilà la feule vengeance que je prendrai jamais de vous.

Un Prélat lui parlant de la guerre, & affez mal, il lui demanda de quel Saint étoit l'office ce jour-là dans fon Breviaire.

Son Tailleur ayant fait imprimer un Livre de Réglemens, qu'il difoit être néceffaires pour le bien de l'Etat, il prit ce Livre en riant, & en ayant lu quelques pages, il dit à un de fes Valets de Chambre : Allez-moi chercher mon Chancelier pour me faire un habit, puifque mon Tailleur fait des Réglemens.

Un Médecin fameux, qui étoit Huguenot, s'étant converti, il dit à Sulli Mon ami, ta Religion eft bien malade, les Médecins l'abandonnent.

La Reine faifant un Ballet, & ayant choifi pour cela quinze Dames des plus belles & des plus qualifiées, il dit au Nonce; Monfieur, je n'ai jamais vu de plus bel efcadron, ni de plus périlleux que celui-là.

fentimens

Un Ambaffadeur d'Efpagne le mé- Fonts naçant d'une armée de cent mille Ef- mets & pagnols, il lui dit : Vous vous trom- d'Henri IV. pez, en Espagne ce ne font pas des hommes, ce font des ombres; Ombre en Espagnol veut dire homme.

Un certain: Seigneur qui avoit ba lancé long-tems durant les troubles, fans prendre de parti, l'étant un jour venu trouver, il lui dit : Approchezvous, Monfieur, fi nous gagnons, vous ferez des nôtres.

Le Prevôt des Marchands & les Echevins lui demanderent la permiffion de mettre un impôt fur les tuyaux des fontaines, pour leur aider à fupporter les frais d'un feftin qu'ils de voient donner aux Députés des Suiffes, venus à Paris pour le renouvellement de l'Alliance: Trouvez, dit-il, quelqu'autre expédient, il n'appar tient qu'à notre Seigneur de changer l'eau en vin.

Le Marquis de Rôni jouant à la paume avec Henri I V. & ayant fait un beau coup, ce Prince s'écria: Voilà un coup de Roi: Oui, Sire, lui répondit Rôni, fi on ôtoit une N de mon nom : Ventre faint gris, dir le Roi, je ne voudrois pas qu'on en fit

Bous mots & Lentimens d'Henri IV.

autant au mien, car on m'appelleroit Roi de France & Avare.

Ce Monarque aimoit les inpromptu ; il rencontra un Eccléfiaftique, à qui il dit: D'où viens-tu? où vas-tu ? que demandes-tu ? l'Eccléfiaftique lui répondit fur le champ: De Bourges, à Paris, un Bénéfice: Tu l'auras, répliqua ce Monarque.

Un vieux Courtifan obtint de ce Prince une grace confidérable, il s'habilla en jeune homme, il fit peindre en noir fes cheveux blancs, & alla remercier le Roi, qui feignit de le méconnoître, & lui dit qu'il ne penfoit pas lui avoir fait cette grace, mais qu'il croyoit l'avoir accordée à fon pere: La faveur de mon Roi, reprit le Courtifan, m'a rajeuni.

L'Empereur Adrien a dit la même chofe qu'Henri IV.

Un Jardinier de Bearn, à qui Henri IV. avant que d'être Roi de France, avoit eu la bonté de fe communiquer avec une grande familiarité, alla à la Cour dès que ce Prince fut paisible poffeffeur de fa Couronne ; il fut charmé quand il le vit dans un fauteuil, foutenir parfaitement la dignité Roya le, pendant que les Seigneurs qui

« AnteriorContinuar »