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Pénétre de la nuit les voiles les plus fombres :
Des torrens embrâfés ferpentent dans les airs,
Et fe vont joindre aux feux que forment les éclairs.
Le tumulte s'augmente, & la terreur s'empare
Du Romain foupirant du fort qu'on lui prépare;
Il court, il fe profterne aux pieds des immortels
Se plaint, implore, accufe, embraffe les autels.
Le feu fert de Néron l'horrible barbarie,

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Les cédres travaillés, les meublés précieux,
Et les Palais des Grands, & les Temples des Dieux.
Les cris confus, les pleurs, les mortelles allarmes
Sont d'un peuple éperdu la réssɔurce & les armes :
Cris fuperflus, hélas, inutiles douleurs !
Le Tyran fe nourrit, s'abreuve de vos pleurs.
Dans la campagne, en foule on cherche un sûr azile;
On s'ouvre dans la flamme un chemin difficile.
L'époufe à fon époux vole en tendant les bras:
Un déluge de feux au-devant de leurs pas
Se répand auffi-tôt, & s'oppose à leur fuite,
La flamme par Néron paroît être conduite.
Le fils périt aux yeux de fon pere expirant ....
Ceux qu'un profond fommeil avoir enfevelis,
S'éveillent, & la mort environne leurs lits.
Sous les lambris preffés les cadavres s'allument,
Et fervent d'aliment aux feux qui les consument,&c.

S'il y a de la fatisfaction à traduire ces
уа
fortes de poëfies fi bien marquées au
coin du bon goût, on ne doit point:

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TIONS DES

MOD.

être furpris que plufieurs de nos plus TRADUC- célébres Ecrivains fe foient exercés à POET. LAT. mettre en notre langue diverses piéces de ces Poëtes fameux que la Société des Jéfuites a produits, les peres Rapin, Commire, de la Rue, du Cerceau, Sanadon, Vaniere, Brumoy, Oudin. Je m'arrêterai peu à vous faire l'éloge de ces Poëtes; ils font trop connus: & vous trouverez d'ailleurs dans le tome cinquiéme des jugemens des Savans de M. Baillet, ce que les Critiques ont pensé des trois premiers.

Je n'ai vu que deux traductions d'une feule Ode du pere Rapin: c'eft fon Ode vingt-quatriéme adreffée à Achilles de Harlay, alors Procureur Général au Parlement de Paris. Ces deux traductions, l'une en vers, l'autre en profe, dont les Auteurs ne font point nommés, font dans le tome fecond des poëfies du pere Rapin, de l'édition de Paris 1723. in-12. On a traduit un plus grand nombre de piéces du pere Jean Commire, né à Tours en 1625. & il méritoit qu'on en fit connoître en core davantage à ceux qui ignorent la langue Latine.

La nature avoit donné à ce Poëte un efprit éclairé & folide; & la lecture

des meilleurs Auteurs de l'antiquité a répandu fur fon ftyle une aménité &

TRADUC

TIONS DES

une abondance, qu'on ne peut s'empê- POET. LAT. cher d'admirer. Suivant quelques-uns, Mov. personne n'a mieux pris que lui le génie de la poëfie lyrique. Ses Odes font remplies de pensées fublimes & d'images vives. On y trouve une élocution pure, un arrangement noble & harmonieux. Dans les fables on voit qu'il a emprunté de Phedre la pureté de la langue Romaine & cette naïveté charmante qui fait le caractere de ces fortes d'ouvrages. C'eft ce qui a fait dire à l'Auteur de fon Epitaphe:

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Il fut Poëte par nature,

Mais il ne le fut pas
Et la veine fertile & pure
Ne coula jamais au hazard.

fans art,

Comirit Carin, t. 20 édit, de 17rs

On admira fon beau génie,

Et l'on aima fa probité :

Ses mœurs, fon air, sa poësie,
Tout reffentoit l'antiquité.

A peine fut-il mort, ce qui arriva le 25. Décembre 1702. que l'on crut que toute l'Europe devoit s'interreifer à cette perte, comme le Poëte lui-même

s'étoit interreffé à tous les maux qui TRADUC durant la vie avoient pû affliger l'Eu

TIONS DES

POET, LAT. гope:

Mon.

COMMIRE dans fes maux fans allarme pour foi,
Gémiffoit à ma place & foupiroit pour moi :

Et parlant par la voix du Maître du Parnasse,
Quand même je pleurois, je pleurois a ec grace.
Mais confufe aujourd'hui, fans charmes, fans at
traits,

Je viens vous annoncer la perte que je fais.

Je gémis comme alors, je me plains, je foupire ;
Mais hélas! ce n'eft plus par la voix de Commire.
Plus fenfible à mes maux qu'à fes propres douleurs,
Lorsqu'il peint vivement les troubles, les horreurs„
Les défordres affreux de cette injufte guerre

Que des Princes jaloux allument fur la terre,
Il meurt las de fouffrir les rigueurs de mon fort,
Dégoûté de la vie il fe livre à la mort.

Mais en vain je le pleure, en vain je le regrette,
Pour toucher votre cœur je n'ai plus d'interprette, &c,.

C'eft le langage que le pere Ifaac Berruyer, Jéfuite, fait tenir à l'Europe dans une Elégie qu'il adreffoit alors au Pape Clément XÍ. pour lui annoncer: la mort du pere Commire & qui a été mise en vers François par le pere d'Orival, de la même Société. On a applaudi à l'éloge que l'Auteur fait des poëfies de fon confrere, lorfqu'il dit:

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Virgile n'a point fait de vers plus élégans,
Phedre de plus naïfs, Horace de plus grands.

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On a confervé une partie de ces qua- Mon. fités dans les traductions de plufieurs de fes piéces, que vous trouverez réunies dans l'édition de fes poëfies procurée en 1715. par les foins du pere Sanadon, alors l'un des deux Profeffeurs de Rhétorique au Collége de Louis le Grand. Son Infcription pour la Statue équestre du Roi que M. le Duc de Richelieu a fait dresser à Rüel, a été traduite en forme de fonnet, par le Clerc, de l'Académie Françoife: Sa Defcription des Fontaines de Saint Cloud, & fon Théâtre des Nayades, ont été mis en profe par le pere de Saint Pierre, Jéfuite; & en vers, par le pere de Bunou, de la même Société. On ignore le Traducteur de l'ode fur MontLouis, maison de campagne du pere de la Chaise, aux portes de Paris. Les deux traductions de l'Ode que le pere Commire fit pour engager, mais en vain, le pere Bouhours à mépriser la critique fi folide des Entretiens d' Arifte & d'Eugene, font de Poubeau de Bellechaume, & du pere de la Roche Jéfuite.

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