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TIONS DES

fes protecteurs, & il leur offre fouvent dans fes poëfies l'encens que la reconnoiffance paroiffoit éxiger de lui, &POET, LAT. qu'ils méritoient d'ailleurs. Il fut tué MOD. étant encore fort jeune, le 30. Décembre 1542. dans une querelle qui lui fut faite par un homme qui avoit perdu un procès contre lui. J'ai vu de ce Poëte deux livres d'infcriptions ou d'Epigrammes adreffés à Gilles Bohier, un livre d'étrennes, à Barthelemi, Châtelain de Nice, & quatre livres d'Hendécafyllabes; le tout imprimé à Paris chez Simon Colines en 1538. en deux volumes in-16. On voit par ces poëfies que l'Auteur étoit en liaison avec tous les beaux efprits de fon tems, & qu'il étoit bien venu à la Cour, & auprès de plufieurs perfonnes diftinguées par leur naiffance, & revêtues des plus hautes dignités.

- Il exalte fouvent les talens, & furtout la beauté du génie de Jean Salmon, natif de Loudun, furnommé Macrin, Valet de Chambre du Roi François I. Salmon prend cette qualité dans une piéce adreffée à son ami Voulté à la louange des Hendécafyl-labes de celui-ci. Lui-même réuffiffoit dans le même genre de poëfie. Sa Ge

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lonis, c'est-à-dire, Guillonne Bourfault TIONS DES qu'il époufa en 1528. & à qui il survéPOET. LAT. Cut, excita fouvent fa verve. Antoine MOD.

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Bohier, Archevêque de Bourges & Cardinal, touché de fon mérite, l'avoit pris auprès de lui, lorfque Salmon ne venoit que de fortir de l'Univerfité, & le Poëte ayant perdu ce protecteur en 1519. il en trouva un autre dans la perfonne de René de Savoye Comte de Tende, Grand-Maître de France qui le prit pour être Précepteur de fes fils Claude & Honorat. Ce fut René qui le fit agréer au Roi François I. pour être du nombre des Valets de Chambre de Sa Majesté. Salmon mourut à Loudun en 1557. âgé de foixante-fept ans.

Je n'ai point vu d'autres traductions des poëfies de ces deux amis que celles d'environ vingt Epigrammes ou petites piéces de Voulté, & de deux courtes piéces de Salmon Macrin. Le Traducteur des unes & des autres eft Laurent de la Graviere, Secrétaire de M. le Vicomte de Joyeuse, qui avoit pû connoître ces deux Poëtes. Sa traduction eft rarement littérale, & fouvent ce n'eft qu'une imitation. Voulté, par exemple, dit de quelque Eccléfiastique, qu'il ne célébroit jamais l'Office

que lorsque les cloches fonnoient, par- TRADUC

ce qu'il s'acquitoit mal de cette action,

TIONS DES

& qu'il ne vouloit pas être entendu. POET. LAT.
La Graviere paraphrase ainfi les deux MOD.
vers Latins de Voulté:

Jamais au chaur tu n'ofes mot fonner,
Que quand tu oys les cloches refonner
Voyant du fon chacun cftre ébloüy :
Or j'entends bien, Genin, ta maladie,
C'eft que tu fais fi rude mélodie,

Que tu ne veux de perfonne estre oüy.

L'Epigramme de Voulté est dans le premier livre de fes Infcriptions. En voici une feconde prife du quatrième livre de fes Hendécafyllabes, traduite plus littéralement:

L'autre hier voyant d'un méchant le tombeau
Conftruit de marbre, & par telle excellence,
Qu'on n'en fçauroit au Roi faire un plus beau:
Hélas, di-je, quelle folle dépense !
Deffus jettay larmes en abondance.

Mais fur le champ quelcun me dit, tout dous;
C'est trop pleurer un ennemy de tous:
Je luy répond à voix claire & aperte,
Je ne plains pas cil qui git cy dessous;
C'est du tombeau que je pleure la perte.

Des deux piéces de Salmon traduites

POET.LAT.

MOD.

auffi en vers par Laurent de la GraTRADUC viere, l'une eft une Elégie où le PoëTIONS DES te fe plaint de la dureté de fa Gélonis: elle eft à la fin du recueil imprimé en 1528. L'autre eft plus courte : le Poëte y parle à sa femme, & lui dit entre autres chofes, felon la verfion de la Graviere:

Vivons, amye, & nous aimons de forte
Que nul divorce éteigne l'amour forte
D'entre nous deux : évitons tout Toucy:
Si quand viendra que de ce monde cy
Serons partis, ceux qui auront envie
De calculer le tems de noftre vie,
Puiffent trouver par leur compte arresté,
Que les hauts Dieus nous ont ça bas presté
Des jours plaifans, fortunés & heureux,
Plus la moytié qu'il n'eft de malheureux,&c.

Ces traductions font de l'an 1558. La
Graviere les publia à Lyon à la fuite
de fa verfion de cinq Eglogues du Man-
touan, dont je vous ai parlé. Clément
Marot a traduit auffi en vers François
une Epigramme de Salmon.

Les jours d'Etienne Dolet, Imprimeur à Lyon, Poëte Latin & Frangois, ne furent pas auffi heureux que

ceux

T

•TIONS DES

POET LAT.

ceux que Jean Salmon fouhaitoit pour
lui-même & pour fa Gélonis. Son li- TRADUC-
bertinage & fon irréligion après lui
avoir caufé plufieurs affaires fâcheufes MOD.
& deshonnorantes, le conduifirent enfin
en 1546. à la potence & au feu, Il ne
manquait ni d'efprit, ni de fcience;
mais dans ce qu'il a écrit en profe, fon
style eft dur, rude & embarraffé, com-
me il eft rampant & profaïque dans fes
vers. Je vous en donnerai quelques
exemples, lorfque je vous parlerai des
poëfies Françoiles de ce fameux Athée.
Je me contente de vous dire ici qu'il a
traduit lui-même en profe un affez long
poëme qu'il avoit compofé & publié en
vers Latins, & dans lequel il célébre
les actions de François I. & raconte ce
qui s'eft paffé de plus remarquable en
France depuis l'an 1513. jufqu'en 1539.
Cette traduction imprimée par lui mê-
me à Lyon en 1540. n'eft point agréa-
ble à lire; mais l'ouvrage n'eft pas inu-
tile pour l'histoire de ce tems-là ; &
c'est le feul mérite qu'on puiffe lui ac-
corder.

C'est à l'Auteur de ce poëme que nous fommes redevables de la Pandore de Jean Olivier, frere de Jacques Olivier, Seigneur de Leuville, premier

Tome VII.

D

Η

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