tres qualitez extraordinaires: il n'eft point enflé de fes fuccés ; parce qu'il en merite encore de plus grands. La caufe d'une indigeftion dans les uns, ne fait qu'exciter l'appetit dans les autres. La plûpart fe trouvent furchargez de quelque importante fonction que ce foit:leur genie étroit n'eft point accoutumé, n'eft point propre aux emplois fuperieurs ; le tumulte des affaires & du monde les embaraffe; les vapeurs de la vaine gloire leur montent à la tête & les étourdiffent, comme des gens en un lieu trop élevé : ils ne fçauroient plus enfin fe foutenir, parce qu'ils ne peuvent foutenir leur deftinée. Que le grand-homme montre qu'il eft toûjours capable de plus grandes chofes ; & qu'il évite avec un foin extréme le moindre indice d'un cœur borné.. MAXIME CIII. Avoir de la dignité felon fon état. Ue tout votre procedé foit digne d'un Roi dans les limites de votre fphére: c'est-à-dire, que l'élevation de vos fentimens & la noblefle de vos actions représentent un Roi par le merite, finon par la puiffance. La vraie fouveraineté confifte dans la vertu: quiconque poffede celle-là n'a pas fujet d'envier la grandeur; il en eft lui-même un modelle: que les Monarques & les grands acquierent fur-tout cette forte de grandeur: la vertu fi propre de la majefté de leur rang, qu'ils la préferent à un vain cérémonial, qui les importune les premiers: qu'ils ayent de la dignité dans le fonds, mais fans en affecter le fafte au dehors. I MAXIME CIV. Avoir étudié la nature des Ly a une diverfité dans les emplois qu'il n'eft permis qu'aux hommes parfaitement habiles de bien connoître, après les avoir tous étudiez. Les uns demandent de la valeur, les autres de la fubtilité d'esprit. Ceux qui ne dépendent que d'un fens droit font faciles, & ceux qui veulent de la dexterité, très-difficiles à remplir: pour les premiers, c'eft affez d'un genie mediocre; pour les feconds, toute l'induftrie & toute la vigilance font neceffaires. Le penible emploi que celui de gouverner des hommes, & encore plus des fous ou des fots! il faut avoir de la raifon au double de l'ordinaire pour conduire qui n'en a point. L'emploi infupportable que celui qui demande fon homme tout entier, qui lui marque tout, & qui lui fixe fon objet toûjours le même: les autres exempts de cette fujettion, & dont le ferieux eft diverfifié, font beaucoup plus agréables: le changement alternatif eft comme un rafraîchiffement de goût pour le travail, Les emplois les plus accreditez font euxmêmes dépendans, ou moins, ou plus: mais le pire de tous eft celui qui aboutit à rendre comptable au tribunal des hommes, & encore plus au tribunal de Dieu. : AA MAXIME CV. Ne fatiguer perfonne. 'Homme laffant que celui Lqui n'a qu'une affaire, & qui n'a jamais que la même chofe à dire! La brieveté plaît, & fur-tout dans les négociations ; ce que l'on facrifie alors par une grande pré cision, cifion, on le regagne par fa politeffe. Le bon devient doublement bon, s'il eft court; & le mauvais même,s'il eft court devient moins mauvais. Un élixir fimple fait plus d'effet que cent drogues ensemble. C'eft une verité certaine, qu'un homme diffus eft rarement un homme d'efprit, finon pour le fonds, du moins pour la façon de raisonner.. Combien d'hommes dans l'univers ne fervent qu'à l'embaraffer, plutôt qu'à l'orner? ils y font comme des meubles incommodes, dont on cherche à fe défaire. Soyons attentifs à ne caufer de l'embaras à qui que ce foit, encore moins à des perfonnes en place, lefquelles ont de grandes occupations : détourner mal-à-propos un homme de ce caractere, c'eft pis que d'en fatiguer mille autres. Ce que l'on dit de bon, eft dit en peu de paroles, R |