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Et loin de vous charger de ce foin gloricax,

Votre Divinité fommeille

Allez vous cacher dans les Cieux;

Et vous, charmant Dieu de la treille, Pour cette brillante merveille Infpirez-moi des chants tendres & gracieux!!

DE

A M.

E Sceaux la charmante retraite
Pour votre Cour femble être faite:
Elle a plus d'éclat, plus d'appas
Que n'eut la Grece ou l'Italie;
Mais quand vous ne l'habitez pas
En chercher là feroit folie.

Dans ces lieux où votre présence
Joint les plaifirs à l'innocence
Les Mufes forment leurs concerts,
Et je crois que leur Maître infpire
A vos heureux Hôtes les Vers
Qu'il accompagne de sa Lyre.

Les premiers dignes du Parnaffe;
Seront à la premiere place;

Leur Auteur fçait quelque Latin,

plus élegant que Voiture

2

De Phœbus préfide au Lutrin;

Je reconnois fa tablature.

Les autres dans leur caractere,

N'ont point d'une Muse étrangere,
L'impoliteffe ni l'accent:

Dans notre Cour fombre & muette,

Hélas ! c'est faute de talent,

Que l'on ne

chante pas Laurette.

BOUQUET

Pour Madame la Princeffe
d'Angleterre.

E me promenois dans la Forêt, au milieu de l'oifiveté, de l'indolence & de l'ennui; c'est-à-dire en fort mauvaise compagnie, lorfque je fus frappé par l'éclat d'une figure fi brillante & fi lumineufe, que je crus d'abord que la Décffe Innubibus étoit de retour; cependant c'étoit toute autre chofe.

Sa face étoit environnée

De rayons foibles & legers;
Et par ces lauriers toûjours verds
Dont fa tête étoit couronnée,
Jereconnus le Dieu des Vers.

Il s'étoit affis au pied d'un chêne ; & ayant mis bas ces petits rayons qui commençoient à m'ébloüir, je pris la liberté de lui demander qui menoit fon Chariot pendant qu'il nous faifoit l'honneur de se venir rafraîchir dans notre folitude? A cette question il se mit à rire, & me dit :

Il eft vrai qu'une auftere loi
Doit rendre ma course éternelle
Sur tout l'Univers que je voi ;

Mais j'ai chargé de cet emploi

Les

yeux

de certaine Mortelle

Qui brillent cent fois plus que moi.

Qu'en dites-vous ? J'en dis, lui répondis-je, que je connois d'affez beaux yeux; mais je n'en connois point d'affez hardis pour aller là haut éclairer le Monde à votre place.

Je connois certains yeux qui même dans Phyver

Echaufferoient les gens à dix pas à la ronde; Mais d'aller,comme vous,& par terre & par mer Du haut du Firmament éclairer tout le monde, Ce font de vrais contes en l'air.

Quoiqu'il en foit, fi votre immortalité a quelques ordres à me donner, elle n'a qu'à

parler, fon ferviteur l'écoute. Ecoutez donc, répondit - il: tandis que vous écriviez des folies pour Forge, vous avez laiffé paffer une des Fêtes de la Princesse fans lui donner le moindre figne de vie. Réparons cette faute, & tâchons de lui rendre demain, fête de faint Louis, quelque hommage qui foit digne d'elle. C'est ce que vous auriez de la peine à faire vousmême, lui dis- je; mais pour je; pour moi, comment voulez-vous qu'entre cy & demain matin?... Ne vous mettez pas en peine, me dit-il, je vous aiderai. En attendant, dites-moi un peu comme vous vous y prendrez? Je prendrai, lui dis-je, du papier bien blanc, & je mettrai tout au haut de la feuille, MADAME; & tout au bas je commencerai par VOTRE ALTESSE ROYALE, en groffes lettres. Bon, dit-il, voilà justement comme un Ambassadeur Extraordinaire, après lui avoir fait trois reverences, commenceroit fa Harangue! Il eft bien queftion ici de ce profond refpect dans les formes, cela feroit bon pour un Placet; mais lorfque vous prenez la liberté de lui adreffer des Vers, voici, par exemple, comme il faudroit

commencer.

Vrai chef-d'œuvre des Cieux ! adorable Princeffe!

Vous en qui le haut rang, les graces, les graces, la jeuneffe,

Et ces tréfors naiffans, d'immortelles beautez
Sont encore au deffous des autres qualitez ;

yous que j'aime mieux voir, en éclairant le Monde,

Que tout ce que revoit ma course vagabonde,
yous qui faites briller le fang de vos Ayeux,
Par l'éclat des vertus, par l'éclat de vos yeux!
Et raffemblez en vous l'augufte caractere,
D'un Roi chéri des Cieux, & d'une illuftre
Mere;

Recevez aujourd'hui dans nos plus doux con

certs,

L'hommage de nos vœux, & celui de nos Vers.

Doucement, s'il vous plaît, Seigneur Phœbus, lui dis - je, vous ne fongez pas que c'est moi que vous voulez faire parler, & que vous parlez vous-même. Ĉe que vous dites-là me paroît affez beau, du moins fuis-je affuré que tout en eft vrai ; cependant il ne me conviendroit pas de le prendre fur ce ton, il n'appartient qu'à vos Mufes Thalie & Melpomene d'habiller la Poëfie fi magnifiquement. La Mufe que vous me prêtez quelquefois, n'eft qu'une petite couturiere en fait d'ornemens, & ne fçait tout au plus faire que des Manteaux & des Jupons.

Elle eft la très-humble fervante
De ces nobles expreffions,

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