Imágenes de páginas
PDF
EPUB

I X.

Heft auffi fait mention de CONAN dans des Auteurs plus anciens, que Geffroi de Monmouth.

Je commence par Geffroi fur-nommé de Monmouth, non qu'il foit le premier Auteur qui nous ait appris cette circonftance, comme quelques uns l'en accufent, mais parce qu'il s'en explique plus en détail que les autres. Une preuve convaincante, qu'il n'eft pas le premier qui ait parlé de Conan, & que fon Hiftoire n'eft qu'une traduction Latine d'un ancien Manufcrit écrit en langage Breton, comme il le dit lui-même dans fa Préface; c'eft que les Auteurs Contemporains, & les plus feveres Cenfeurs en conviennent & que Guillaume de Neubrige, qui le ménage le moins, ne lui reproche pas d'avoir inventé, mais feulement d'avoir rendu en Latin ce qu'il appelle les fictions des Bretons: il reconnoît en même-tems qu'elles étoient plus anciennes. Antoine fur-nommé le Roux, Contemporain de l'un & de l'autre, mais moins B. y.

paffionné,dit dans la Lettre qu'il adreffe à Guillaume de Neubrige,avec l'Hiftoire de Sigebert, que celle de Geffroi de Monmouth avoit été traduite des plus anciens monumens en langage Breton. Mathieu Paris en dit autant. Ufferius (Antiquité des Eglifes de Bretagne Ch. V. p. 31. à la marge) affure que ce Manufcrit, ou Chronique écrite en Breton, se confervoit encore de fon tems dans la Biblioteque de Coron. Le titre de très-ancien, qu'ils donnent à un Manufcrit traduit vers le milieu du douziéme fiécle, doit fuffire au moins pour lui affurer un fiécle ou deux d'antiquité; & pour moi j'eftime qu'il fut fait ou fur la fin du huitiéme, ou dans le commencement du neuviéme.

Une feconde preuve, que Geffroi de Monmouth n'eft pas le premier qui ait parlé de Conan, eft qu'un Poëte, fous le nom de Gildas, avoit écrit en Vers plufieurs faits particuliers, qui regardent la vie de ce Roy. Je ne puis fixer au jufte le tems dans lequel il écrivit; mais il fuffit de dire ici que Caradæus,cité par Geffroi de Monmouth, faifoit mention de ce Poëte, qu'il appelle un excellent Ecrivain de l'ancienne Hiftoire; ce qui fait voir qu'il vivoir

avant Geffroi de Monmouth. Il eft auffi parlé de ce Roy, fous ce premier nom de Conan, dans la vie de Saint Mériadec Evêque de Vannes : nous en avons un fragment dans Heufchenius Tom. II. Jun. Die. 7. pag. 36. & dans du Sauffai, Martyr. Gallic.

Une troifiéme preuve que Geffroi n'a point inventé ce trait d'hiftoire, eft qu'il eft conforme à ce que les Auteurs de la vie de Saint Patrice, & quelques autres que j'ai déja cités, plus anciens que Geffroi, Henry de Hungtington, & Guillaume de Malmesbury, fes contemporains, & Girard de Cambrige qui vécut peu de tems après, ont écrit fur cette matiere. L'autorité de Polydore Virgile, quoiqu'il foit moderne, doit êrre encore comptée pour quelque chose. C'est un des Cenfeurs de Geffroi de Monmouth, & du Gildas du neuviéme fiécle; mais qui bien loin de critiquer rien de ce que l'un & l'autre ont dit de Conan ou des Bretons, explique au contraire bien au long cette circonftance. Après tout il n'en eft prefque aucune, qui ne foit très-confor me à l'Hiftoire de ce tems, telle qu'on la trouvée dans les meilleurs Ecri

vains, comme je le ferai voir dans les nombres fuiv ans.

X.

Ce Roy eft appellé CONIS par quelques autres Auteurs.

Enfin une nouvelle preuve de cette vérité, mais qui a échapé à tous ceux qui ont écrit jufqu'ici fur cette matiere, eft que des Auteurs plus anciens que Geffroi ont parlé de ce Roy, fous des noms, qui dans le fond ne défignent que la même perfonne, & ne font qu'une legere altération de celui de Conan. Le premier de ces noms eft Conis: il eft le même que Conan, puisque la même Ville fituée dans le pays: d'Yorc fur les bords du fleuve Danc ou Donc,qui par les uns étoit appellée KerGonan, c'eft-à-dire Ville de Conan, étoit appellée par les autres Conifburg, qui fignifie la même chofe: voilà pour nom, voici pour la perfonne. Tout ce que Jocelin, qui n'écrivit à la vérité que vers l'an 1183. mais qui ne fit que recueillir ce qu'il avoit lû dans. des monumens plus anciens écrits dans differens tems depuis le fixiéme fiécle) & l'Auteur de la vie Tripartite,-) qui paroît avoir écrit vers le milieu du

le

[ocr errors]

fixiéme fiécle, difent de Conis, tout ce que le Scholiafte Ficehus, & les autres plus anciens que Jocelin nous apprennent de Darerca, dans la vie de Saint Patrice, Geffroi de Monmouth. le dit de Conan. Celui-ci paroiffoit avec. éclat fous l'Empire de Théodose, c'està-dire, depuis l'an 379. jufqu'après 394. & c'étoit le tems où Conis vivoit dans un âge avancé, puifqu'il avoit épousé avant l'an 388. la fœur de Saint Patrice né en 372. Conis étoit natif d'Albanie, ou du moins ce fut dans. cette partie de la Grande Bretagne, qu'il chercha une époule. Et ce fut dans cette même Albanie que Conan prit naissance, ou qu'il eut plus de rélation. Conan paffa dans l'Armorique l'an 38 3. &ily demeura toujours depuis. Toute la famille de Conis, ou de fon épouse paffa dans les mêmes lieux vers la même année; & la fuite de l'Hiftoire nous apprend qu'ils y demeurerent plus de douze ans entiers, fans avoir penfé pendant tout ce long espace de tems à retourner dans le lieu de leur naiffance, malgré le penchant qu'on conferve ordinairement pour fa patrie furtout quand on eft en état d'y faire la figure que Calphurnius pou

« AnteriorContinuar »