Se multiplieront comme l'herbe Autour des humides marais 22. Qu'il vive, et que dans leur mémoire Dont nos faibles yeux sont couverts 23 ! 22. L'idée des humides marais n'est pas, chez Roussean, fort heureuse; elle a quelque chose de repoussant, et entraîne un sens défavorable qui n'est pas dans l'intention du poëte. Le latin donne sicut fænum terræ. 23. Cette ode finit très-faiblement. Un si touchant sujet aurait dû mieux inspirer le poëte. Rousseau n'a pas su nous émouvoir un instant; il écrit avec ses souvenirs poétiques, avec ses préoccupations du style et du rhythme; son cœur n'est pour rien dans l'ouvrage : c'est qu'il n'a pas de sensibilité. TEXTE DU PSAUME LXXI. Deus judicium tuum regi da: el Justitiam tuam filio regis. Judicare populum tuum in justitia, et pauperes tuos in judicio. Suscipiant montes pacem populo: et colles justitiam. Judicabit pauperes populi, et salcos faciet filios pauperum : et humiliabit calumniatorem. Et permanebit cum sole, et ante lunam in generatione et generatio nem. Descendet sicut pluvia in vellus et sicut stillicidia stillantia super terram. Orietur in diebus ejus justitia et abundantia pacis donec auferatur luna, Et dominabitur a mari usque ad mare et a flumine usque ad terminos orbis terrarum. Coram illo procident Ethiopes: : et inimici ejus terram lingent. Reges Tharsis, et insulæ munera offerent reges Arabum, et Saba dona adducent: Et adorabunt eum omnes reges terræ: omnes gentes servient ei: Quia liberabit pauperem a potente: et pauperem, cui non erat adjutor. Parcet pauperi et inopi: et animas pauperum salvas faciet. Ex usuris et iniquitate redimet animas eorum et honorabile nomen eorum coram illo. Et vivet, et dabitur ei de auro Arabiæ, et adorabunt de ipso semper: totâ die benedicent ei. Et erit frumentum in terrâ, in summis montium; super extolletur super Libanum fructus ejus: et flo rebunt de civitate sicut fænum terræ. Sit nomen ejus benedictum in sœcula ante solem permanet nomen ejus. Et benedicentur in ipso omnes tribus terræ omnes gentes magnificabunt eum. Benedictus Dominus Deus Israel, qui facit mirabilia solus. Et benedictum nomen majestatis ejus in æternum et replebitur majestate ejus omnis terra; fiat, fiat. ODE VI. TIRÉE DU PSAUME XC. QUE RIEN NE PEUT TROUBLER LA TRANQUILLITÉ DE CEUX Celui qui mettra sa vie 2 Le plus dangereux assaut 3. Mes jours sont ta propre cause Pour moi, dans ce seul asile, ODE VI. 1. On rattache quelquefois ce psaume, dans le texte biblique, au psaume LXXXIX, qui est attribué à Moïse; il est plus probable que l'un et l'autre sont d'auteurs inconnus, et qu'ils étaient destinés au service du temple. Il a été traduit par Corneille très-faiblement, dans ses Poésies diverses. 2. Desportes, dans sa traduction du même psaume, représente le juste: Qui dans la fidèle cachette Du Très-Haut se va tapissant. 3. Le plus dangereux assaut. » Les deux premiers vers sont nets et fermes, les deux autres sont vagues, et ne semblent appelés que par la rime. 4. «Vague et insignifiant.» LEBRUN. - L'ellipse, pour être un peu forte, n'est pas insignifiante; valait-il done mieux dire: «En défendant mes jours, c'est ta propre cause que tu défends?» Cela eut été bien plat. 5. Oh! que d'S! voilà beaucoup d'S!» LEBRUN. - Le ton est cavalier, mais l'observation est juste. De mes rivaux frémissants. O toi, que ces cœurs féroces Soit contre leur artifice Soit ton rempart le plus sûr 7. Ainsi, méprisant l'atteinte De leurs traits les plus perçants, Ou soit que la nuit obscure 9 6. En butte à des inimitiés nombreuses et acharnées, dès le temps où il imita les psaumes, Rousseau semble avoir choisi de préférence ceux qui avaient quelque rapport avec sa propre destinée. Cette ode n'est pas la seule où, bravant les attaques de ses rivaux, il leur oppose Dieu même, comme son refuge et son appui. 7. « On trouve dans cette strophe, hérissée de termes faibles et impropres, CONTRE leurs complots atroces, CONTRE leur artifice, CONTRE leur apre colère; et le reste de la strophe ne dément point la dureté de cette dure préposition." LEBRUN. On y voit en effet les images incohérentes d'appui, de mur, d'aile et de rempart. Qu'on lise le psalmiste, pour mesurer l'intervalle! 8. Nous avons déjà vu : de leurs dards empoisonnés. C'est une grande pauvreté d'expression. Des jours exempts du froid poison de la crainte appartiennent encore à une langue bien pénible. 9. Ou soit n'est guère élégant. » LEBRUN. Répande dans la nature Mais que vois-je ? quels abîmes " S'offre à mes yeux pleins d'effroi ? Mon cœur, sois en assurance, Dans les routes ambiguës 14 D 10. « Ténébreuses horreurs. » Très-dur. La pensée de ces derniers vers est vague et insignifiante. 11. VARIANTE: quels effroyables abîmes. La première partie de cette strophe est pleine de banalités sonores. 12. Ces trois vers sont beaux; ils ont ce mystérieux sobre, qui suffit pour émouvoir. 13. Il y a quelque émotion poétique dans cette strophe; l'idée des anges gardiens est heureuse: mais que de taches encore! garants, est impropre; propice n'est pas heureux; et qu'est-ce que des mains qui conduisent des pas? Le texte du psalmiste est bien plus touchant: in manibus... etc. 14. On ne dit pas plus des routes ambigues que des ronces aiguës; c'est une rime riche, achetée un peu cher. La netteté de Rousseau, dans cette strophe et dans les suivantes, dégénère en sécheresse. Louons pourtant le mot chemine, plus expressif que marche. Du bois le moins fréquenté, Si quelques vaines faiblesses Dans ses fortunes diverses Que je réserve à mes saints 16, 15. Strophe excessivement faible. Il a déjà dit (ODE II): Elle assure notre voie; et dans la même strophe de l'ode i les rimès de fidèles, triomphants, enfants, joie, voie, sont déjà employées. Elles se retrouvent toutes ici. 16. Il semble que l'haleine manque au poëte dans cette dernière et faible strophe: les vers ont je ne sais quoi d'essonfflé; les expressions sont ternes; avec quelle froideur parle ici la Sagesse divine! |