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que, qu'un Bourgeois de cette ville, nommé Ambrofio Piquillo, ayant été dans un bois pour y chercher un fac rempli de piéce d'or, qu'il y avoit enterré, n'avoit trouvé que la foffe où il s'étoit avifé de le cacher, & que ce malheur réduifoit enfin ce pauvre homme à la mendicité.

Je dirai à la louange de Bahabon, que les reproches fecrets que fa confcience lui fit à cette nouvelle, ne furent pas inutiles. Il s'informa où demeuroit Ambrofio, & l'alla voir dans une petite falle baffe où il y avoit pour tous meubles une chaife & un grabat: Mon ami, lui dit-il, d'un air hypocrite, j'ai appris par la voix publique le fàcheux accident qui vous eft arrivé, & la charité nous obligeant à nous aider les uns les autres, à proportion de Tom. II. Sec. Part. Cc

notre pouvoir, je viens vous ap porter un petit fecours. Mais je voudrois fçavoir de vous-même votre trifte Avanture.

Seigneur Cavalier, répondit Piquillo, je vais vous la conter en deux mots : J'avois un fils qui me voloit. Je m'en apperçûs, & craignant qu'il ne mît la main fur un fac de buffle dans lequel il y avoit deux cens cinquante doublons, bien comptés, je crus ne pouvoir mieux faire que de les aller enterrer dans le bois où j'ai eu l'imprudence de les porter. Depuis ce jour malheureux, mon fils m'a pris tout ce que j'avois, & a difparu avec une femme qu'il a enlevée. Me voyant dans un déplorable état, par le libertinage: de ce mauvais enfant, ou plutôt par ma fotte bonté pour lui, j'ai voulu recourir à mon fac de buffle.

Mais, hélas! cette feule reffource qui me restoit pour fubfifter, m'a cruellement été ravie.

Cet homme ne put achever ces paroles, fans fentir renouveller fon affliction; & il répandit des pleurs en abondance. Don Pablos en fut attendri, & lui dit : Mon cher Ambrofio, il faut fe confoler de toutes les traverses qui arrivent dans la vie. Vos larmes font inutiles, elles ne vous feront point retrouver vos doubles piftoles, qui véritablement font perdues pour vous, fi quelque fripon les pofféde. Mais que fçait-on? Elles peuvent être tombées entre les mains d'un homme de bien, qui ne man-` quera pas de vous les rapporter, dès qu'il apprendra qu'elle font à vous. Elles vous feront donc peutêtre rendues. Vivez dans cette efpérance & en attendant une res

titution fi jufte, ajoûta-t-il, en lui donnant dix doublons de ceuxmêmes qui avoient été dans le fac de buffle, prenez ceci & me venez voir dans huit jours. Après lui avoir parlé de cette forte, il lui dit fon nom & fa demeure, & fortit tout confus des remercimens que lui faifoit Ambroife & des bénédictions qu'il en recevoit, Telles font, pour la plûpart, des actions généreufes : on fe garderoit bien de les admirer, fi l'on en pénétroit les motifs.

Au bout de huit jours, Piquillo, qui n'avoit pas oublié ce que Don Pablos lui avoit dit, alla chez lui. Bahabon lui fit un très-bon accueil, & lui dit affectueufement: Mon ami, fur les bons témoignages qui m'ont été rendus de vous, j'ai réfolu de contribuer, autant qu'il me feroit poffible, à vous re

mettre fur pied. J'y veux employer mon crédit & ma bourse.

Pour commencer à rétablir vos affaires, continua-t-il, fçavez-vous ce que j'ai déja fait? Je connois quelques perfonnes de diftinction qui font très-charitables. J'ai été les trouver, & j'ai fi bien fçû leur infpirer de la compassion ́pour vous, que j'en ai tiré deux cens écus que je vais vous donner. En même-temps, il entra dans fon cabinet, d'où il fortit un moment après avec un fac de toile, . où il avoit mis cette fomme. en argent, & non en doublons, de peur que le Bourgeois en recevant de lui tant de double pistoles, ne s'avifàt de foupçonner la vérité. Au lieu que par cette adref fe il parvenoit plus fûrement à fon but, qui étoit de faire la reftitution d'une maniere qui conciliât fa réz

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