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deux efpeces de divifions.. On dbit. marquer un point en parlant,, com me: l'on fait une cadence de baffe dans la Mufique.. La baffe, pour terminer un chant, forme en defcendant: une intonation de quinte, c'est-àdire, qu'elle entone la quinte du ton, & de-là defcend tout d'un coup à la note tonique.. Ce doit être la même chose dans la parole.. Lorsque la voix entone en defcendant un inintervalle affez éloigné pour reffembler à celui d'une quinte, l'oreille fent que la phrase eft terminée. Mais: lorfque le fon de la derniere fyllabe fe trouve le même que celui des fyli labes précédentes, ou qu'il monte: au-deffus des autres, le fens denteure fuspendu, & le spectateur attend que Acteur continue. C'eft une attention très-néceffaire que d'apprendre à faire un point; car c'eft de-là ques dépendent les changemens de ton„

qui produïfent à l'oreille l'effet le plus agréable,, & ffont fentit la juf teffe & la variété de l'expreffion.

On ne fe ferait jamais imaginé que quelqu'un établit pour principe, que c'est une monotonie de finir toutes les phrafes à l'odave en bas. Sans m'embarraffer du faux de l'expreffion, je ne m'attache qu'à la fauffeté de l'idée. Crait-on que ce ne foit pas une monotonie de les finir tou tes en l'air? De ces deux uniformités ne doit on pas choifir celle qui eft prefcrite par la nature, plûtôt •que celle qui marque tout à la fois un manque de goût, d'oreille & de bon fens ? Je dis plus,, une feule phrafe terminée fans faire un point, est une faute infupportable. Voilà comme l'on juge! On voit le Spectacle; on entend dire qu'un Acteur eft bon, & l'on s'aveugle à tel point, que l'on prend tous les défauts pour des per

L'INTELLIGENCE.

fections, qu'on les donne pour mo> déle, & que l'on prétend en tirer des principes. Je dis que ces jugemens partent de l'oui-dire; car un spectateur qui juge par connoiffance, fçair diftinguer dans un fujet qui mérite de plaire, quelles font fes bonnes ou fes mauvaises qualités.

Lorsqu'on veut faire l'éloge d'un Comédien, on affecte aujourd'hui de vanter son intelligence. En effet, il en faut une grande, non seulement pour bien rendre toutes les variétés des rôles différens que l'on jouë, mais encore pour faire fentir toutes celles qui fe rencontrent dans une même Piece. Cependant nous voyons honorer fouvent du nom d'intelligence ce qui n'eft qu'une façon groffiére d'entendre ce que veu lent dire les mots de fon rôle. C'est bien peu de chose qu'une pareille ing

telligence, c'est la moindre qualité que puiffe avoir un A&teur; mais tous ne l'ont pas, ainfi l'on doit fçavoir gré à ceux chez qui elle fe trouve. Če qui mérite vraiment le nom d'intelligence, eft le premier talent. du Théâtre. C'est elle qui fait feule les grands Comédiens, & fans qui on ne peut jamais être tout au plus qu'un de ces médiocres fujets, à qui de certains agrémens dans la figure ou dans la voix donnent quelquefois du brillant, mais dont le connoiffeur ne peut être pleinement fatisfait. Il ne fuffit pas d'entendre les difcours qu'un Auteur a mis dans notre bouche, & de ne pas les rendre à contre fens. Il faut concevoir à chaque instant le rapport que peut avoir ce que nous difons avec le caractère de notre rôle, avec la fituation où nous met la fcène, & avec l'effet que ce la doit produire dans l'action totale,

Cette façon d'entendre eft fi delicate, que pour la détailler par le raifonnement, elle exigeront elle feule un très-long ouvrage; je vais me borner à quelques exemples, qui feront affez fenfibles pour expliquer les différentes attentions qu'il faut réunir pour montrer une véritable intelligence.

L'on a dans une fcène à dire bon jour. Ce mot eft bien fimple, & tout le monde entend cela. Mais ce n'eft pas affez d'entendre que c'eft une politeffe qui fe fait aux gens qui arrivent ou que l'on aborde: il eft mille façons de dire bon jour, fuivant le caractère & la fituation. Un amant dit bon jour à fa maîtreffe avec cette douceur & cette affection qui fait connoître fes fentimens pour celle qu'il falue. Un pere le dit avec tendreffe au fils qu'il aime, & avec une froideur mêlée de chagrin à ce

lui

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