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Et Thémis pour voir clair a besoin de tes yeux. Mais pour moi de Paris citoyen inhabile, Qui ne lui puis fournir qu'un rêveur inutile, Il me faut du repos, des prés & des forêts. 140 Laiffe-moi donc ici, fous leurs ombrages frais, Attendre que Septembre ait ramené l'Automne, Et que Cérès contente ait fait place à Pomone. Quand Bacchus comblera de fes nouveaux bienfaits Le Vendangeur ravi de ployer fous le faix: 145 Aufsi-tôt ton Ami, redoutant moins la Ville, T'ira joindre à Paris, pour s'enfuir à Bâville. Là, dans le feul loifir que Thémis t'a laiffé, Tu me verras fouvent à te fuivre empreffé, Pour monter à cheval rappellant mon audace, 150 Apprenti Cavalier, galopper fur ta trace. Tantôt, fur l'herbe affis au pié de ces côteaux Où Polycrene épand fes libérales eaux,

VERS 146.

REMARQUES.

Pour s'enfuir à Baville. ] Maifon de Campagne de Monfieur de Lamoignon. DESP.

C'est une Seigneurie confidérable, à neuf lieues de Paris, du côté de Châtres & d'Etampes.

VERS 150. Apprenti Cavalier, &c. ] Dans l'Edition de Paris 1713, dans celle de Geneve 1717, & dans toutes celles que l'on a faites depuis, on a mis Apprentif Cavalier. C'est une fauffe correction. Il y a dans les Editions de 1694 & de 1701 Apprenti Cavalier, comme on le rétablit ici. L'Auteur en fe conformant à l'ufage qui s'établiffoit de fon temps, & qui fait regle aujourd'hui, difoit au Masculin, Apprenti; & pour le Féminin, Apprentie, comme on l'a vu fur le vers 464 de la Satyre X. DE ST. MARC.

VERS 152. Où Polycrene épand fes libérales eaux. ] Fon

Lamoignon, nous irons libres d'inquiétude Difcourir des vertus dont tu fais ton étude : 155 Chercher quels font les biens véritables ou faux : Si l'honnête homme en foi doit fouffrir des défauts: Quel chemin le plus droit à la gloire nous guide, Ou la vaste science, ou la vertu folide.

C'eft ainfi que chez toi tu fauras m'attacher. 160 Heureux ! fi les Fâcheux prompts à nous y chercher N'y viennent point femer l'ennuyeuse tristeffe! Car dans ce grand concours d'Hommes de toute efpece,

Que fans ceffe à Bâville attire le devoir,

REMARQUES.

taine à une demi-lieue de Bâville, ainfi nommée par feu M. le Premier-Préfident de Lamoignon. DESP.

Le nom de Polycrene défigne l'abondance des eaux de cette Fontaine. M. Despréaux, le P. Rapin, le P. Com mire, & plufieurs autres de nos plus fameux Poëtes l'ont chantée, & l'ont rendue prefque auffi célebre que l'Hippocrene.

VERS 155. Chercher quels font les biens, &c. 1 Horace> Livre II, Satire VI, vers 72:

Quod magis ad nos

Pertinet & nefcire malum eft, agitamus : Utrumne
Divitiis homines, an fint virtute beati :

Quidve ad amicitas, ufus, rectumve trabat nos:
Et qua fit naura boni, fummumque quid ejus.

CHANG. Ibid. Chercher quels font les biens véritables ou faux. Avant l'Edition pofthume de 1713, on lifoit: Quels font les biens véritables & faux. Ce qui ne présentoit pas affez nettement la penfée de l'Auteur. DE ST. MARC.

Y

Au lieu de quatre Amis qu'on attendoit le foir, 160 Quelquefois de Fâcheux arrivent trois volées,

Qui du parc à l'inftant affiegent les allées.
Alors, fauve qui peut, & quatre fois heureux
Qui fait pour s'échapper quelque antre ignoré d'eux!

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* AVERTISSEMENT

LA

SUR

L'ÉPITRE VII.

A feptieme Epitre traite de l'utilité que l'on peut retirer de la jaloufie de ses Ennemis, auffi bien que des bonnes & des mauvaises Critiques. Elle fut compofée, avant la fixieme au commencement de Pannée 2677, à l'occafion de la Tragédie de Phedre, que M. Racine avoit fait repréfenter, pour la premiere fois, le premier jour de cette même année, par les Comédiens de l'Hôtel de Bourgogne. (1) Madame la Ducheffe de Bouillon, (2) M. le Duc de

REMARQUES.

J'ai rendu compte, dans les Remarques de l'Avertif fement fur l'Epitre IV, des raifons qui m'obligeoient d'en faire un auffi fur l'Epitre VII. Je l'ai prefque tout compofé de la Remarque préliminaire de M. Broffette & de celle qu'il a faite fur le dernier Vers de cette Piece. Je me fuis contenté de les fondre enfemble, & d'y faire entrer ce que j'y devois ajouter.

§. C'eft M. De St. Marc qui parle dans cette Note. Il a compofé cet Avertissement & les Remarques qui l'accompagnent.

(1) Madame la Ducheffe de Bouillon. ] MARIE-Anne MANCINI, fille de Michel-Laurent Mancini & de Jéronime Mazarini, Sœur du Cardinal Mazarin. Elle fut mariée le 20 d'Avril 1662, à God froi-Maurice de la Tour, Duc de Bouillon d'aujourd'hui, & mourut le 20 de Juin mil fept cent quatorze.

(2) M. le Duc de Nevers. ] PHILIPPE-JULIEN MazariniMancini, Duc de Nevers & de Donzi. Il fut fait Chevalier des Ordres du Roi à la promotion de 1661, quoi

Nevers fon frere, & quelques perfonnes de diftinction, unies de goût & de fentiments, avoient pouffé (3) Pradon à travailler fur le même sujet. Ces

REMARQUES.

qu'il n'eût encore que 25 ans. L'honneur qu'il avoit cu de porter la queue du Manteau du Roi le jour de fon Sacre, donne le privilege d'être reçu Chevalier, quelque jeune que l'on foit. Ce Duc aimoit les Lettres & fe mêloit de Poéfie. Il en a fait quelques morceaux en François, qui font d'un goût plus que fingulier.

(3) Pradon. ] Ce Poëte que les Satyres de notre Auteur ont beaucoup plus immortalifé que fes propres Ouvrages, étoit de Rouen. Il mourut d'apoplexie à Paris, au mois de Janvier 1698. On a recueilli dans un feul volume in-12 fes Tragédies, qui font : Pyrame & Tyfbé, Tamerlan ou La Mort de Bajazet, La Troade Phedre & Hippolite, Statira, fille de Darius & veuve d'Alexandre, & Regulus, qui malgré fes défauts, doit être compté parmi les bonnes Tragédies. Cette Piece que Pradon avoit donnée en 1688, étoit entiérement oubliée, lorsque Baron la fit remettre au Théatre en 1722 Ou 1723. Elle eut alors un fuccès très-éclatant. Pradon n'eft point Auteur de la Tragédie du Grand Scipion, quoiqu'elle lui foit attribuée dans cette Epigramme que feu M. Rousseau fit à l'occafion d'une Satyre remplie d'invectives contre M. DESPRÉAUX:

Au nom de Dieu, Pradon, pourquoi ce grand courroux¿
Qui contre Defpréaux exhale tant d'injures ?
Il m'a berné, me direz-vous.

Je veux le diffamer chez les Races futures.
Hé! croyez-moi, reftez en paix.

En vain tenteriez-vous de ternir sa mémoire ;
Vous n'avancerez rien pour votre propre gloire;
Et le Grand Scipion fera toujours mauvais.

Le Grand Scipion eft d'un M. de Prade, Auteur de deux autres Tragédies encore moins connues, qui font Annibal & Silanus.

ES

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