Imágenes de páginas
PDF
EPUB

RÉFLEXIONS

GÉNÉRALES

SUR LES SPECTACLES.

C

'EST en France qu'on trouve les Spectacles les plus réguliers & les plus décens. Les Pieces immortelles de Corneille, de Racine, de M. de Voltaire, . de Crébillon, &c. ont donné au Théâtre François la plus grande supériorité fur ceux des autres Nations: aussi les étrangers y viennent en foule admirer les productions dont ces hommes de génie ont enrichi la Scene Françoise, &

A

ils rendent jusques dans leur Patrie meme un hommage secret à cette partie de notre gloire nationale.

Tout ce qui a quelque rapport avec nos Théâtres, ne peut donc manquer d'intéresser. Jamais en effet les Spectacles n'ont été plus fréquentés & plus épurés qu'ils le sont aujourd'hui. Ce ne sont plus des farces grossieres & des Pieces monftrueuses que l'on y représente, & les Comédiens ne sont plus des Bateleurs faits pour amuser le peuple: nos Pieces réunissent à l'attrait du plaisir l'intérêt de la vertu & de la morale, & nos Acteurs l'honnêteté & la décence aux plus grands talens ; ainsi on peut dire qu'il n'est point de délassement plus agréable pour une Nation policée.

Quoique tous les peuples aient eu

des Spectacles, on doit cependant regarder la Grece comme le berceau de la Comédie, parce que les Grecs font le premier peuple qui ait eu de véritables Pieces de Theâtre.

Cet art fublime fit peu de progrès chez les Romains. Les premiers siecles de la République ne virent que des Spectacles analogues aux mœurs de ses citoyens, c'est-à-dire, des fêtes dont le souvenir seul fait frémir l'humanité ; la scene étoit toujours fouillée par le sang des animaux, souvent même par celui des hommes. Ces mœurs barbares s'adoucirent par le commerce des Orientaux; & ces fiers Républicains, après avoir conquis une partie de l'Asie, transporterent dans Rome le luxe & les arts des peuples qu'ils avoient vaincus : c'est à cette époque que Plaute & Térence

donnerent les premieres Comédies. Leur exemple fut suivi par quelques autres Romains; mais les malheurs qui désolerent la République, firent perdre de vue ces fortes de Spectacles; on ne s'occupa plus que de factions.

Si les Romains n'ont pas accueilli la Comédie, on ne doit pas être étonné que les peuples qui ont détruit cet Empire, n'aient point admis un genre de Spectacle qui suppose des talems & des lumieres que ces Conquérans barbares étoient bien éloignés de réunir.

Cependant le peuple privé de la Comédie, & toujours avide d'amusemens, couroit à des représentations que de miférables Pantomimes faifoient au coin des rues. Des expressions indécentes & grossfieres, des postures lascives & contraires à l'honnêteté, toutes les loix de la bienséance violées, & le mépris des mœurs caractérisoient ces Spectacles barbares. Ce fut par ces motifs que les Conciles & les Peres de l'Eglise les profcrivirent; ils furent également flétris par les Loix civiles.

Telle est la véritable idée qu'on peut avoir des différentes vicissitudes que les Spectacles ont éprouvées jusqu'à l'époque où les François enleverent les Gaules à l'Empire Romain.

Pendant les deux premieres Races de nos Rois, les Spectacles qui existoient en France, consistoient dans des fêtes indécentes; & ce n'est pas sans peine que dans des fiecles plus éclairés on a aboli ces fêtes grossieres.

Il feroit ridicule de remonter au-delà du douzieme siecle pour trouver l'origine de la Comédie en France; le siecle

« AnteriorContinuar »