nouveauté ne fut point favorablement reçue, comme il paroît par une Ordonnance du Pré-vôt de Paris du 3 Juin 1398, par laquelle il fit défenses à tous les habitans de Paris, & à ceux de Saint-Maur & des autres villes de fa Jurifdiction, de repréfenter aucuns jeux de perfonnages, foit de vie des Saints ou autrement, fans le congé du Roi, à peine d'encourir fon indignation, & de forfaire envers lui.

Ces Bourgeois s'adresserent à la Cour, &

pour déterminer le Gouvernement en leur faveur, ils érigerent leur Société en Confrérie, fous le titre de la Paffion de Notre-Seigneur. Le Roi voulut voir leurs Spectacles. Ils repréfenterent devant lui quelques Pieces qui lui firent plaifir, Pour leur marquer fon contentement (difent les Historiens), il leur accorda des Lettres-Patentes, par lefquelles il leur permit de s'établir dans la ville de Paris d'y continuer publiquement les représentations de leurs Comédies pieuses, & d'aller & venir dans la ville avec l'habillement conforme au fujet & aux myfteres qu'ils devoient représenter. Nous allons rapporter les difpofitions de ces Lettres ; elles ont le titre fuivant.

LETTRES DE CHAKTE;

Par lefquelles Charles VI permet aux Confreres de la Paffion, de faire des Représentations en public.

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Charles, par la grace de Dieu, Roi de France, » favoir faifons à tous préfens & advenir, nous » avoir reçu l'humble fupplication de nos bien » amés & Confreres les Maîtres & Gouverneurs » de la Confrérie de la Paffion & Réfurrection » de N. S., fondée en l'Eglise de la Trinité de » Paris, contenant comme pour le fait d'aucuns » myfteres, tant de Saints comme de Sainctes, » & mêmement du myftere de la Paffion que » détrainement (*) ont commencé, & sont prêts » pour faire devant nous comme autrefois au» roient faict, & lefquels ils n'ont pu bonnement > continuer, parce que nous n'y avons peu être » lors préfents: duquel faict & mystere ladite » Confrérie a moult frayé (**) & dépendu du» dit fien, & auffi ont les Confreres un chacun » proportionnablement : disans en outre que s'ils » jouoient publiquement & en commun, que

(*) Derniérement.
(**) Fait des frais.

»ce feroit le profit d'icelle Confrérie; ce que > faire bonnement ne pourroient à ce trois, deux » ou l'un de ceux qu'ils voudront élire de nos » Officiers, fans pour ce commettre offense ay» cune envers nous & Juftice; & lefquels Maî> tres & Gouverneurs & Confreres fufdits, & un » chacun d'iceux, durant les jours èsquels ledit » myftere qu'ils joueront fe fera, soit devant » nous ou ailleurs, tant en recors comme autre» ment, ainfi & par la maniere que dict est, » puiffent aller, venir, paffer & repasser paisi»blement, veftus & habillés, & ordonnés un

chacun d'eux en tel état, ainfi que le cas le defire, & comme il appartient, fuivant l'or> donnance dudict myftere, fans diftourbier & >> empeschement; & à greigneure (*) confirma» tion & fûreté, nous, iceux Confreres, Gouver

neurs & Maîtres, de notre plus abondante gra» ce, avons mis en notre protection & fauve» garde, durant le cours d'iceux jeux, & tant » comme ils joueront feulement, fans pour ce » leur meffaire, ne à aucuns d'iceux dans cette » occafion, ne autrement, comment que ce foit, ∞ au contraire. Si donnons en Mandement au Prévost de Paris & à tous nos autres Jufti

(*) Meilleure.

»ciers & Officiers préfens & à venir, ou à leurs » Lieutenants & chacun d'eux, fi comme il lui

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appartiendra, que lefdits Maîtres, Gouver»neurs fans notre congé & licence, requérans fur ce notre gracieufe provifion, nous qui voulons, defirons le bien, profit & utilité de ladite Confrérie, & les droits & revenus » d'icelle être par nous accrus & augmentés de graces & privileges, afin qu'un chacun par dévotion fe puiffe & doive adjoindre & mettre » en leur compagnie, à iceux Maîtres, Gouverneurs & Confreres de la Paffion de N. S., > avons donné & octroyé, donnons & octroyons » de grace spéciale, pleine puiffance & autorité royale, cefte fois pour toutes, & à toujours perpétuellement, par la teneur de ces préfen»tes Lettres, autorité, congé & licence de » faire jouer quelque myftere que ce foit, soit de ladite Paffion & Réfurrection ou autres

quelconques, tant de Saincts comme de Sainctes qu'ils voudront élire & mettre fus, tou»tes & quantes fois qu'il leur plaira, foit devant

nous, devant notre commun (*) & ailleurs, tant en recors (**) qu'autrement, & de ceux > convoqués, communiqués & affemblés en quel

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(*) Peuple.

**) Mufique.

conque lieu & place licite; à ce faire qu'ils trou» vent, tant en notredite ville de Paris, comme » en la Prévosté, Vicomté & Banlieue d'icelle

préfens & Confreres, & un chacun d'eux faffent, fouffrent & laiffent jouir & ufer pleine»ment & paisiblement de notre présente grace, congé, licence, don & octroy deffusdicts, fans » les molefter, faire ne fouffrir empécher ores >ni pour le temps advenir: comment que ce » foit chofe ferme & ftable à toujours, nous >> avons fait mettre notre fcel à ces Lettres » fauf en autres chofes, notre droit, & l'autrui » en toutes. Ce fut fait & donné à Paris, en »notre Hoftel-lez-Saint-Paul, au mois de Dé»cembre, l'an de grace M. CCCC. II. Et fur » le repli eft efcrit : Par le Roi, Meffire Jacques de Bourbon l'Admiral, le Begue de Vieulaine & plufieurs

Peu de temps après avoir obtenu ces Lettres les Confreres chercherent un lieu commode pour leurs représentations. Le fervice de leur Confrérie étoit déjà fondé à l'Hôpital (*) de la

(*) Cet Hôpital avoit été fondé en 1100 par deux Gentilshommes Allemands, pour y recevoir les Pélerins & les pauvres voyageurs qui arrivoient trop tard pour entrer dans la ville, parce qu'alors on en fermoir chaque jour les portes à une heure précife.