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& par un ordre exprès de Sa Majesté, il fut defendu aux Acteurs de l'Opéra-Comique de jouer aucune scene qui ne fût chantée.

Les Entrepreneurs de l'Opéra-Comique prirent alors le parti de mettre en Vaudevilles la Scene qui avoit donné lieu à la contestation; & fi les Comédiens François réussirent à faire confirmer leur privilege, ils n'en furent pas moins exposés à la critique & aux sarcasmes qui furent chantés par les Acteurs de l'OpéraComique, au lieu d'être déclamés.

On a fait depuis de nouvelles tentatives pour entreprendre sur le privilege des Comédiens François; mais toutes ont été proscrites, & leur droit exclusif a toujours été confirmé, lorsqu'ils l'ont réclamé dans les Tribunaux.

On doit donc regarder comme un principe certain que les Comédiens François ont seuls le droit de représenter des Comédies & des Tragédies Françoises dans la Capitale. Ce privilege est fondé sur les ordres précis du Roi & sur les Lettres-patentes enregistrées par le Parlement; ainsi il n'est pas douteux que fi un Entrepreneur de Spectacle vouloit élever un Théâtre dans Paris, les Comédiens François seroient fondés à s'y opposer, & que les Tri

bunaux ne feroient aucune difficulté de confirmer leur privilege.

C'est aussi une maxime certaine qu'aucune Troupe de Comédiens ne peut s'établir dans les Villes du Royaume, qu'après avoir obtenu la permiffion du Lieutenant-Général de Police de chaque Ville. Cette regle est fondée sur la disposition précise de l'Article XX de l'Edit de 1706, qui attribue exclusivement aux Lieutenans-Généraux de Police la Juridiction sur les Spectacles. Elle a été confirmée par un Arrêt du Conseil du 20 Août 1708, rendu en faveur du Lieutenant-Général de Police de la Ville de Grenoble ; & cet Arrêt veut que ceux qui contreviendront à l'Article XX de l'Edit de 1706, soient condamnés en une amende de cinq cents liv.

Les Comédiens François sont propriétaires en commun de l'Hôtel de la Comédie; il ne peut par cette raison être saisi par les Créanciers d'un Comédien: c'est ce qui a été formellement jugé par un Arrêt de la Grand Chambre du Parlement de Paris, du 2 Juin 1693; mais par le même Arrêt le Parlement ordonna que les Comédiens seroient tenus d'avoir des registres de leur recette, & il permit aux Créanciers de chaque Comédien de saisir sa part dans les profits. Le Roi, par Arrét de son Conseil de 1757, a fixé la maniere dont les registres de recette & de dépense des Comédiens devoient être tenus; ainsi la disposition de l'Arrêt de 1693 n'est plus fuivie. Quant à la permission accordée aux Créanciers par cet Arrêt, elle a été reftreinte, par l'Arrêt du Conseil 1757, au tiers de la part de chaque Comédien ; les deux autres tiers font libres & affranchis de toutes fai sies comme pensions alimentaires.

Par une Ordonnance du 16 Novembre 1720; le Roi a fait défenfes à toutes personnes, même aux Officiers de sa Maison (1), Gardes, Gendar

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(1) Ce fut Moliere qui obtint en 1665 un ordre du Roi, qui fit défenses aux personnes de la Maison de Sa Majesté d'entrer à la Comédie sans payer. Voici à quelle occafion cet ordre fut donné.

Les Mousquetaires, Gardes-du-Corps, Gendarmes & les Chevaux-Légers entroient à la Comédie sans payer. Le Parterre en étoit toujours rempli. Moliere sollicita l'abolissement de cet usage, & le Roi lui accorda sa demande. Mais ces Messieurs ne trouverent pas bon que les Comédiens leur fissent imposer cette Loi, & regarderent comme un affront la hardiesse qu'ils avoient eue de la

mes, Mousquetaires, Chevaux-Légers & autres, d'entrer à l'Opéra ou à la Comédie sans payer, d'interrompre les Acteurs, & de s'arrêter dans les coulisses du Théâtre.

folliciter. Les plus mutins s'ameuterent & coururent en foule à la Comédie. Ils massacrerent le Portier, & vouloient faire éprouver le même traitement aux principaux de la Troupe. Bejart, Comédien tout jeune, habillé en vieillard pour la Piece qu'on alloit jouer, se présenta à ces furieux : « Eh, Messieurs, leur dit-il, épargnez un >> vieillard de 75 ans qui n'a plus que quelques jours à >> vivre ». Ce petit incident calma leur fureur, & Moliere leur ayant parlé vivement sur leur défobéiffance aux ordres du Roi, ils se retirerent enfin. Quand tout ce vacarme fut appaisé, la Troupe tint conseil. Plusieurs de ses Membres, remplis de frayeur, furent d'avis de laisser entrer la Maison du Roi comme à l'ordinaire; mais Moliere qui étoit ferme, leur dit que, puisque le Roi avoit daigné leur accorder cet ordre il falloit en poursuivre l'exécution si Sa Majesté le trouvoit à propos : & je pars dans ce moment, leur dit il, pour l'en informer. Le Roi, inftruit de ce désordre, ordonna aux Commandans des Corps qui l'avoient occasionné de les faire mettre sous les armes le lendemain, pour connoître & punir les plus coupables, & pour leur signifier la défense d'entrer déformais à la Comédie sans payer. Cet usage fut aboli depuis ce moment.

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La même Ordonnance défend à tous Domef

tiques portant livrée, fans aucune exception, d'entrer à la Comédie ou à l'Opéra, même en payant, & de commettre aucun défordre à l'entrée de la Salle de Spectacle & dans les environs, sous peine de prison (1).

(1) ORDONNANCE, DU ROI,

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CONCERNANT LES SPECTACLES,

Du 24 Décembre 1769.

De par le Roi.

>> Sa Majesté voulant que les défenses qui ont été fai tes, & qu'elle a renouvellées à l'exemple du feu Roi, d'entrer aux Opéra, aux Comédies Italienne & Françoise fans payer, & d'interrompre le Spectacle sous aucun prétexte, foient régulièrement observées ; de même que les difpofitions de l'Ordonnance de Sa Majesté du 18 Janvier 1745 pour Parrangement des Carroffes aux entrées & forties des Spectacles, & étant informée que quelques perfonnes ne s'y conforment pas aufli exacte ment qu'elle le defire; Sa Majesté a fait très-expreffément défenses à toutes personnes de quelque qualité ou condition qu'elles foient, même aux Officiers de sa Mai son, Gardes, Gendarmes, Chevaux-Légers, Mousque taires, Pages de Sa Majesté, à ceux des Princes & Prin

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