de Louis XIV a vu porter cet art à fa perfection, & doit être regardé comme l'époque de la révolution qui s'eft faite dans les Spectacles. Ces idées générales fuffifent au plan de notre Ouvrage. Nous aurons lieu d'entrer dans des détails plus étendus dans le Chapitre qui contient l'hiftoire de la Comédie Françoife. DE LA COMÉDIE FRANÇOISE. LES Troubadours ont été les premiers Co médiens de la France; ils font connus dans notre hiftoire fous le nom de Trouveurs & de Jongleurs; ils réuniffoient la qualité d'Auteurs à celle d'Acteurs. Quoique Charlemagne, par une Ordonnance de 789, ait fupprimé les Farceurs & Bateleurs, dont les jeux indécens formoient les feuls Spectacles qui exiftoient alors, il feroit inutile, comme nous l'avons dit dans notre Difcours préliminaire, de remonter au-delà du commencement du douzieme fiecle, pour trouver l'origine de la Comédie en France; elle étoit inconnue fous nos Rois de la feconde Race. Les feuls Spectacles de ces fiecles barbares confiftoient dans des fêtes indécentes qu'on célébroit dans les Eglifes, telles que la fête des Fous, celle de l'Ane, &c. Aux Poëtes Provençaux, connus fous le nom de Troubadours, qui avoient reffuscité la Poéfie, fuccéda une foule de Joueurs dont l'indécence & la folie furent portées fi loin, que Philippe-Augufte, dès la premiere année de fon regne, les chaffa de fa Cour & de fes Etats; cependant quelques-uns s'étant conduits avec plus de retenue & de modération, furent soufferts fous le regne de ce Prince & des Rois fes fucceffeurs. Ils prirent tous indiftinctement le nom de Jongleurs; ils fe retiroient dans une rue qui portoit leur nom, & qui eft aujourd'hui celle de S. Julien des Ménétriers. On les louoit pour les fêtes & les affemblées de plaifir. Une Ordonnance de Germont, Prévôt de Paris, du 14 Septembre 1341, leur défendoit, Jorfqu'ils avoient été loués, d'en d'en envoyer d'au tres à leur place, ou de venir en plus grand nombre que celui dont on étoit convenu. Par une autre Ordonnance du même mois de l'an 1395, il leur fut défendu, sous peine d'amende & de deux mois de prison au pain & à l'eau, de rien repréfenter d'indécent & de fcandaleux. Depuis cette époque trouve plus aucune trace des Spectacles des Jongleurs. , on ne Si l'on confulte les anciennes chroniques, on y voit que Charles V, Charles VI, Charles VII & Louis XI, malgré les guerres qu'ils furent obligés de foutenir, avoient des Baladins attachés à leur Cour, qui exécutoient différens divertiffemens, tels que des ballets, des pantomimes & des concerts. Après les Croisades, les pélerinages devinrent fréquens. Les Pélerins à leur retour, pour augmenter l'efpece de vénération qu'on avoit pour eux, fur-tout pour exciter la charité du peuple, représenterent les mysteres de la Religion, le martyre, les miracles des Saints, & les aventures les plus remarquables arrivées aux Croisés. Quelque groffieres & quelque burlesques que duffent être ces représentations, elles fixerent l'attention de la Cour & des Grands. Félibien rapporte en effet, que Charles V ayant donné le jour des Rois un grand festin à l'Empereur Charles IV, & à fon fils Venceflas, Roi des Romains, on joua la prise de Jérufalem par Godefroy de Bouillon. En 1398, quelques Bourgeois de Paris choifirent le bourg de Saint-Maur au-deffus de Vincennes, pour y représenter la Paffion de Notre-Seigneur. Les pélerinages avoient introduit cette efpece de dévotion. Les Pélerins qui revenoient de Jérufalem de SaintJacques de Compoftelle, de la Sainte-Baume, &c. compofoient des cantiques fur leurs voyages, & y méloient le récit de la vie & de la mort de Jefus Chrift, du Jugement dernier, &c. d'une maniere informe & groffiere, il eft vrai; mais leur chant & leur jeu la rendoient touchante pour le peuple & même pour les Grands, puisqu'on étoit dans l'usage de représenter ces myfteres dans les cérémonies d'éclat, telles que les entrées de nos Rois & de nos Reines. On en voit des exemples dans notre hiftoire, depuis le regne de Charles V jufqu'à François I. Henri II les fupprima. Avant l'année 1398, époque de l'établiffement du premier Theâtre, on n'avoit point encore joué dans des lieux fermés. Cette |