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1. Cor x. 24.

car Dieu n'abandonne point ceux qui font une fois justifiez par sa grace, s'il n'en eft auparavant aban- AN. 1547. donné. Perfonne donc ne se doit flatter ni s'applaudir en foi-même pour avoir feulement la foi, dans la pensée que par cette feule foi, il est établi héritier, & qu'il aura part à l'héritage, encore qu'il ne fouffre point avec Jesus-Christ, pour être auffi glorifié avec lui. Car, comme dit l'Apô- Hebr. v. 9. tre, Jesus-Christ lui-même, quoiqu'il fût fils de Dieu, a appris l'obéiffance par l'expérience des chofes qu'il a fouffertes, & tout étant consommé en lui, il est devenu la cause du falut éternel pour tous ceux qui lui obéiffent. C'est pourquoi le même Apôtre parlant à ceux qui font justifiez, leur dit: Ne fçavez vous pas que dans la carriere tous courent véritablement, mais un feul remporte le prix. Courez donc enforte que vous le remportiez. Pour moi je cours, & je ne cours pas au hazard ; je combats, & je ne donne pas des coups en l'air : mais je châtie mon corps, & je le réduis en fervitude, de peur qu'après avoir prêché aux autres,je ne fois moi-même réprouvé. S. Pierre le prince des apôtres dit auffi : Travaillez à affurer par vos bonnes œuvres votre vocation & votre élection; car agiffant de la forte, vous ne pécherez jamais. Ce qui fait voir que ceux-là contredisent à la doctrine orthodoxe de la religion, qui soutiennent que le jufte dans toute bonne œuvre péche au moins véniellement; ou,ce qui eft encore plus infupportable, qu'il mérite les peines éternelles ; de même que ceux qui difent que les juftes péchent dans toutes leurs actions, fi outre l'interêt de la Tome XXIX.

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11. Petr. 1.10.

gloire de Dieu qu'ils ont principalement en vûë AN. 1547 en les faifant, ils jettent aufli les yeux fur la récompense éternelle pour exciter leur langueur & pour

s'encourager eux-mêmes à courir dans la carriere, Pfal. cxvIII. 12. puifqu'il eft écrit: J'ai porté mon cœur à l'accompliffement de vos commandemens à cause de la Hebr. 11. 26. récompense. Et que l'apôtre faint Paul dit de Moïfe, que dans ce qu'il faifoit, il envisageoit la récompenfe.

Chapitre XII. Qu'il ne faut point

destination.

Perfonne auffi, tandis qu'il est dans cette vie préfumer témerai- mortelle, ne doit préfumer du myftere fecret de renent de la pré- la prédeftination de Dieu, de forte qu'il foit certainement affuré qu'il est du nombre des prédeftinez : comme s'il étoit vrai qu'étant justifié, il ne pût plus pécher, ou que s'il péchoit, il dût se promettre affurément de fe relever, parce que sans une révélation particuliere de Dieu, on ne peut fçavoir qui font ceux que Dieu a choifis.

Chapitre XIII.

Du don de la pc. feverance.

Matt. x. 22. XXIV. 13.

73.

Philipp. 1. 6. 11.

Il en eft de même du don de perféverance, duquel il eft écrit, que celui qui aura perséveré jusqu'à la fin, fera fauvé. Ce qu'on ne peut obtenir` d'ailleurs que de celui qui est tout puissant pour foutenir celui qui eft debout, afin qu'il continue d'être debout jusqu'à la fin, auffi bien que pour relever celui qui tombe. Mais perfonne là-def fus ne fe peut rien promettre de certain d'une certitude abfoluë, quoique tous doivent mettre & établir une confiance très-ferme dans le fecours de Dieu, qui achevera & perfectionnera le bon ouvrage qu'il a commencé, en opérant en nous le vouloir & l'effet, fi ce n'eft qu'ils manquent euxmêmes à fa grace. Cependant que ceux qui croïent

AN. 1547.

être debout, prennent garde de ne pas tomber, & qu'ils travaillent à leur falut avec crainte & tremblement dans les travaux, dans les veilles dans les aumônes, dans les prieres, dans les offrandes, dans les jeûnes, dans la pureté ; car fçachant que leur renaiffance ne les met pas encore dans la poffeffion de la gloire, mais feulement dans l'efperance de l'obtenir, ils ont raifon d'appréhender pour le combat qui leur reste à foutenir contre le diable, le monde, & la chair, dans lequel ils ne peuvent être victorieux, s'ils ne fet conforment avec la grace de Dieu aux fentimens de l'Apôtre, qui dit : Nous fommes redevables, Rom. vIII.12. mais ce n'est pas à la chair pour vivre selon la chair; car fi vous vivez felon la chair, vous mourrez ; mais si vous mortifiez par l'esprit les passions de la chair, vous vivrez.

Chapitre XIV. tombez depuis le leur réparation.

De ceux qui font

baptême, & de

A l'égard de ceux qui par le péché font déchûs de la grace de la juftification qu'ils avoient reçue, ils pouront être justifiez de nouveau,quand Dieu les excitant, ils feront enforte, par le moïen du facrement de pénitence, de recouvrer en vertu du mérite de Jefus Chrift, la grace qu'ils auront perduë. Carcette maniere de juftification eft la réparation propre pour ceux qui font tombez : c'est ce que les faints peres nomment fi à propos la feconde table après le naufrage de la grace qu'on a perduë; & ç'a été en effet en faveur de ceux qui tombent dans le péché depuis le baptême, que Jesus- Matr. 11. 15. Christ a établi le facrement de pénitence, quand Joan xk.23. il a dit: Recevez le Saint-Esprit; les péchez feront remis à ceux à qui vous les remettrez, & ils fe

ront retenus à ceux à qui vous les retiendrez DeAN. 1547. là vient qu'il faut bien faire entendre que la pénitence d'un chrétien après être tombé dans le peché, eft fort differente de celle du baptême; car nonfeulement elle demande qu'on ceffe de pécher, & qu'on ait fon crime en horreur, c'est-à-dire, qu'on ait le cœur contrit & humilié; mais elle enferme encore la confeffion facramantelle de fes péchez, au moins en defir, pour la faire dans l'occasion ; & l'absolution du prêtre, avec la satisfaction par les jeûnes, les aumônes, les prieres, & les autres pieux exercices de la vie fpirituelle, non pas à la verité pour la peine éternelle, qui est remife avec l'offenfe par le facrement ou par le defir de le recevoir; mais pour la peine temporelle, qui, felon la doctrine des faintes lettres, n'eft pas toujours, comme dans le baptême, entierement remise à ceux,qui ingrats des bienfaits de Dieu & de fa grace qu'ils ont reçuë, ont contrifté le SaintEfprit, & ont profané fans refpect le temple de Apoc. 11. 5. Dieu. C'est de cette pénitence qu'il eft écrit:Souvenez-vous de l'état d'où vous êtes déchû, faites

pénitence & reprenez l'exercice de vos premieres 2. Cor. VII. 10. œuvres. Et encore ce mot: La trifteffe qui eft feMarc. VIII. 15. lon Dieu produit pour le falut une pénitence staLuc. 11. 8. ble. Et cet autre : faites pénitence: faites de dignes fruits de pénitence.

la grace fe perd

Chapitre XV. Que Pour s'oppofer aux malins artifices de certains espar le péché mor- prits, qui par des paroles douces & flateuses séduitel, & non pas la fent les cours des perfonnes fimples;il eft à propos auffi de bien établir que la grace de la justification qu'on a reçuë, fe perd non-feulement par le crime

foi.

de l'infidelité, par lequel la foi fe perd auffi; mais même par tout autre péché mortel par lequel la foi AN. 1547. ne fe perd pas. Et nous ne faifons en cela que foutenir la doctrine de la loi divine, qui exclut du roïaume de Dieu, non-feulement les infideles, mais les fideles auffi, s'il font fornicateurs, adulteres, effeminez, fodomites, voleurs, avares,yvro- 1. Tim. 1. 10. gnes, médifans,raviffeurs du bien d'autrui, & tous 1. Cor. VI. autres fans exception, qui commettent des péchez Philipp. IV. mortels, defquels ils fe peuvent abftenir par le secours de la grace de Dieu,& pour la punition d'ef- 11. Cor. x11. quels ils font féparez de la grace de Jesus Christ

Chapitre XVI. Du fruit de la juf

tification, c'eft-à

dire, du mérite des

Les hommes étant donc juftifiez de cette maniere, foit qu'ils aïent toujours confervé la grace, qu'ils ont une fois requë, foit qu'ils l'aïent recou- bonnes œuvres, en viée après l'avoir perduë, il faut leur mettre de- quoi il confifte. vant les yeux les paroles de l'Apôtre: Emploïez- 1.Cor. xv. 58. vous de plus en plus dans l'exercice des bonnes œuvres, & fçachez que Notre-Seigneur ne laiffera pas votre travail fans récompenfe : car Dieu n'eft Hebr. v1. 10. pas injufte, pour oublier vos bonnes œuvres, & l'amour que vous avez fait paroître pour fon nom. Et ne perdez pas votre confiance dont la recom- Hebr. x. 35. penfe doit être très-grande. C'est ainsi qu'il faut parler de la vie éternelle à ceux qui travaillent utilement jusqu'à la fin de la carriere, & qui esperent en Dieu; en la leur faifant voir & comme une grace promise aux enfans de Dieu par mifericorde à caufe de Jefus Chrift, & comme une récompenfe qui felon la promeffe de Dieu même, doit être fidelement renduë à leurs bonnes auvres, & à leurs mérites. C'eft cette couronne de 11. Timot. v1.8.

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