adoration. De-là s'étant rendu au grand autel, il

Belcar. in eom.

y célébra la mèffe pontificalement. Le cardinal AN. 1550. Cornelio dit l'évangile, & Cibo les litanies. Qua- Duchesne hißt, des torze jours après fon élection, c'eft-à-dire, le papes pag. 407. vingt-deuxième de Février, il fut couronné par ment: 1. 25. m. 25. les mains du cardinal Cibo le premier des cardinaux diacres, devant la porte de l'église de faint Pierre ; & deux jours après le vingt quatriéme du même mois, fête de faint Mathias, il fit l'ouverture du jubilé en ouvrant la porte fainte, avec un grand concours de peuple & d'étrangers qui attendoient depuis deux mois qu'on fist cette cérémonie. Ce Jubilé ne dura qu'un peu plus de dix mois, pendant lefquels les églifes principales de Rome furent vifitées par un grand nombre de pelerins. Le pape n'ouvrit que la porte de faint Pierre ; & celles de faint Paul, de faint Jean & de fainte Marie majeure furent ouvertes par les cardinaux archiprêtres ou protecteurs de ces mêmes églifes, qu'on devoit vifiter pour gagner les indulgences; voulant néanmoins que les indulgences ordinaires qui leur avoient été accordées, auffi-bien qu'aux autres églifes de Rome, demeurasfent en vigueur, & fufpendant toutes les autres accordées hors de Rome dans toute la chrétienté, à l'exception de celles qui avoient été obtenuës par la compagnie de faint Ignace.

Le nouveau pape s'appelloit Jean-Marie Giocchi, & étoit né à Rome dans le quartier del Parione d'une famille très-médiocre originaire de Monte-Sanfovino en Tofcane, dans le diocéfe d'Arezzo. Et ce fut de-là que son oncle Antoine, Zzzz ij

CLV.
Caractere du nou-

veau pape.
Ciacon. ut fuprà

Onuph. in Julium

.

que Jules II. honora de la propre Romaine en AN. 1550. 1511. prit le nom de cardinal del Monté ; & que Jean-Marie le porta ensuite. C'étoit un esprit ferme & intrepide, que les difficultez ne rebutoient jamais. Il s'acquit de la réputation dans fes premiers emplois, donnant peu à ses plaisirs & beaucoup aux affaires. Aufli fut-il nommé président & premier légat du concile qu'on tint à Trente. Quoiqu'avant fon élevation au pontificat, il eût agi avec tant de févérité dans toutes les affaires que les cardinaux ne le mirent qu'avec peine fur le trône de faint Pierre : cependant on le vit depuis changer de manieres.

CLVI.

Il rend la ville de

Farnefe.

Pallav. hift. conc. Trid. lib. 11. c. 7.

n. I.

Sleidan lib. 21. pag.777.

Pour témoigner aux Farnefes fa reconnoissance Parme à Octavio de la part principale qu'ils avoient euë dans fon élection, non-feulement il rendit la ville de Parme à Octave, fuivant la loi qu'on s'étoit impofée dans le conclave, avec ferment que le pontife élu feroit auffi-tôt cette reftitution; mais pour en rendre l'exécution plus facile, il païa à Camille Urfin vingt mille écus de fes propres revenus : Octave n'étant pas en état de le faire, & Urfin ne voulant pas rendre la ville qu'à cette condition. Mais il n'en fut pas de même de Plaifance que l'empereur gardoit toujours, & qui fut caufe dans la fuite de la guerre entre ce prince & la France.

CLVII.
Il fe deshonore

Pallav. ibid. lib.

peu

prome

Quoique le nouveau pape s'appliquât fort par la promotion aux affaires, paffant les jours entiers à se d'un cardinal. ner dans fes jardins, & à faire des projets de bâtir 11. cap. 7. n. 4. des maifons de plaifance, rien ne ternit dayanpontif. tom. 3, pag. tage fa réputation au commencement de fon pontificat, que l'élection qu'il fit d'un membre du

Ciaconius in vit.

759.

1550.

tom. 21. part

facré collége. Comme c'est une ancienne coutu- AN. me que le pape nouvellement élu donne fon chapeau de cardinal à celui qu'il veut il accorda le Raynald. in annal. fien avec fon nom & fes armes à un jeune avan-› hoc an. n. 5o. turier qui étoit fon domeftique, fans aucune autre charge que de gouverner un finge dans fa maifon, & qu'on appelloit Innocent, d'une famille fi obfcure qu'on ne l'a jamais connuë. Ce jeune homme étoit de Plaifance, & cherchant à fe placer en quelque endroit pendant que le cardinal de Monté étoit gouverneur de cette ville, ce cardinal l'aïant vû le prit en affection, eut soin de le faire élever, le fit adopter par fon frere Baudoüin, l'aima comme s'il eût été fon propre neveu lui donna la prevôté de l'église de Plaisance, selon d'autres d'Arezzo & le mena à Trente où il fut attaqué d'une grande maladie qui le réduifit à l'extrémité. Etant devenu convalefcent, de Monté, felon l'avis des médecins, l'envoïa à Veronne pour changer d'air. Innocent y recouvra entierement fa fanté, & quelque-temps après retourna à Trente. Le jour qu'il y devoit arriver, le légat fortit de la ville par forme de promenade, accompagné d'un grand nombre de prélats, & l'aïant rencontré, il le reçut avec des témoigna ges exceffifs de joïe & de tendreffe. De Monté avoit coutume de dire, qu'il l'aimoit comme l'ouvrier de fa fortune, parce que les aftrologues avoient prédit de grandes richeffes & de hautes dignitez à cet enfant, & qu'il n'y pouvoit arriver que par son exaltation au pontificat,

Les cardinaux fâchez de voir cet inconnu, fans
Zzzz iij

nailfance & fans mérite, revêtu de la pourpre, en AN. 1550 firent de fortes remontrances au nouveau pape. Le cardinal Caraffe lui reprefenta en termes affez vifs, qu'il alloit ternir l'honneur du facré college, dy admettre un jeune homme fans nom, qui n avoit d'autre mérite que celui de lui plaire, & qui n'avoit aucune qualité pour le rendre digne d'être élevé à un fi ́haut rang ; que le monde alloit en murmurer, & que le public ne manqueroit pas de s'en divertir à fes dépens. Il emploïa encore beau coup d'autres raisons pour détourner Jules III. de cette entreprise; mais voïant qu'on ne l'écoutoit pas, il ne fe trouva pas au confiftoire où Innocent devoit être promu, & fe contenta d'écrire au pape pour lui en faire les excufes. Quand d'autres fet plaignirent qu'il leur eût donné pour collegue un homme de néant ; il leur répondit affez plaifamment: qu'il ne fçavoit pas auffi lui-même, quel mérite ils avoient trouvé en lui pour le faire chef de l'églife. Avançons donc ce jeune homme, continua-t'il, il le méritera. On dit que comme Innocent fervoit dans la maison du cardinal de Monté à divertir le finge & qu'il avoit foin de lui; les malins le nommerent le cardinal Simia, qui fignifie finge. Sa vie déréglée dut faire repentir le pape d'une promotion si bizarre & fi contraire à toutes les regles de la bienséance.

Fin du Tome Vingt-neuvième.

TABLE

DES MATIERE S.