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prétend que les enfans dont la peau eft la plus rouge en naiffant, font ceux, qui, dans la fuite, auront la peau la plus belle & la plus blanche. La forme du corps & des membres de l'enfant qui vient de naître n'eft pas bien exprimée, toutes les parties font gonflées; au bout de trois jours il lui furvient ordinairement une jauniffe, & dans ce même tems il y a dans les mammelles de l'enfant du lait qu'on peut exprimer avec les doigts; ce gonflement diminue à mesure que l'enfant prend de l'accroiffement.

&

On voit palpiter dans quelques enfans nouveaux nés le fommet de la tête à l'endroit de la fontanelle dans tous, on y peut fentir le battement des finus ou des arteres du cerveau, fi on y porte la main. Il se forme au deffus de cette ouverture une espece de croute ou de galle, qu'on frotte avec des broffes pour la faire tomber à mesure qu'elle fe féche; il femble que cette production ait quelqu'anologie avec celle des cornes des animaux, qui tirent auffi leur origine d'une ouverture du crâne & de la substance du cerveau. On aura lieu de voir dans la fuite que toutes les extrémités des nerfs deviennent folides lorfqu'elles font exposées à l'air, & que c'eft cette fubftance nerveuse, qui produit les cornes, les ongles & les ergots.

La liqueur contenue dans l'Amnios laiffe fur l'enfant une humeur vifqueufe blanchâtre. Nous avons dans ce pays-ci la fage précaution de ne laver l'enfant qu'avec de l'eau tiéde; cependant des nations entieres, celles mêmes qui habitent les climats les plus froids, font dans l'ufage de plonger leurs enfans dans l'eau froide auffitôt qu'ils font nés, fans qu'il leur en arrive aucun mal; on dit même que les Laponnes laiffent leurs enfans dans la neige jufqu'à ce que le froid les ait faifis au point d'arrêter la refpiration, & qu'alors elles les plongent dans un bain d'eau chaude: ces peuples lavent auffi les enfans trois fois chaque jour pendant la premiere année de leur vie. Les peuples du Nord font perfuadés que les bains froids rendent les hommes plus forts & plus robuftes; c'est par cette raison qu'ils les forcent de bonne heure à en contracter l'habitude. Ce qu'il y a de vrai, c'eft que nous ne connoiffons pas affez jufqu'où peuvcht

s'étendre les limites de ce que notre corps eft capable de fouffrir, d'acquérir ou de perdre par l'habitude.

On ne fait pas tetter l'enfan: auffi-tôt qu'il est né : on lui donne auparavant le tems de rendre la liqueur & les glaires qui font dans fon eftomac, & le maconium qui est dans fes inteftins; ce font des excrémens de couleur noire: ces matieres pourroient faire aigrir le lait. On commence donc par lui faire avaler un peu de vin fucré : ce n'eft que dix ou douze heures après la naiffance, qu'il doit tetter pour la premiere fois,

A peine l'enfant jouit-il de la liberté de mouvoir & d'étendre ses membres, qu'on lui donne de nouveaux liens; on l'emmaillotte : heureux fi on ne l'a pas ferté au point de l'empêcher de refpirer ; & fi on a eu la préCaution de le coucher fur le côté, afin que les eaux, qu'il doit rendre par la bouche, puiffent tomber d'elles-mêmes! car étant ainfi empaqueté, il n'auroit pas la liberté de tourner la tête fur le côté pour en faciliter l'écoulement. Les peuples qui fe contentent de mettre leurs enfans nuds fur des lits de coton fufpendus, ou de les couvrir fimplement dans leurs berceaux garais de pelleteries, nous donnent un exemple que nous devrions imiter. Les bandages du maillot peuvent être comparés aux corps que l'on fait porter aux filles dans leur jeunesse. Cette espece de cuiraffe, imaginée pour foutenir la taille & l'empêcher de fe déformer, caufe certainement plus d'incommodités & de difformités qu'elle n'en prévient. Les enfans qui ont la liberté de mouvoir leurs membres à leur gré, deviennent plus forts que ceux qui font emmaillotés; car le défaut d'exercice retarde l'accroiffement des membres. On voit les enfans des Negres commencer à marcher dès le fecond mois, ou plutôt fe traîner fur les genoux & fur les mains : pour les obliger à marcher, leurs mères leur préfentent de loin la mamelle comme un appas, & on les voit fe traîner pour l'aller chercher. Cet exercice leur donne la facilité de courir dans cette fituation prefqu'auffi vite que s'ils étoient fur leurs pieds.

Ces petits enfans Negres deviennent fi adroits & fi forts, que lorsqu'ils veulent tetter, ils embraffent l'une des hanches de la mere avec leurs genoux & leurs pieds;

& la ferrent fi bien, qu'ils peuvent s'y foutenir fans le fecours des bras de la mere: ils s'attachent à la mamelle avec leurs mains, & ils la fucent conftamment, fans fe déranger & fans tomber, malgré les différens mouvemens de la mere, qui, pendant ce tems, travaille à

fon ordinaire.

Les enfans nouveaux nés ont befoin de prendre fouvent de la nourriture. On les fait tetter dans la journée de deux en deux heures; & pendant la nuit, à chaque fois qu'ils fe réveillent. Ils dorment pendant la plus grande partie du jour & de la nuit dans les premiers tems de leur vie, ils femblent même n'être éveillés que par la douleur ou par la faim. Les entraves du maillot les tiennent dans une fituation qui devient fatiguante & douloureuse après un certain tems: leur peau fine & délicate eft fouvent refroidie par leurs excrémens: il n'y a guere que la tendreffe maternelle qui foit capable d'une vigilance affez continuelle pour tenir les enfans bien propres. Les Sauvages, qui fentent combien ce foin est néceffaire, y fuppléent d'une maniere bien fimple. Ils mettent au fond du berceau une bonne quantité de poudre que l'on tire du bois rongé des vers, & ils recouvrent leurs enfans de pelleteries: cette poudre pompe l'humidité, & on a foin de la renouveller. En Orient, & fur tout en Turquie, on attache les enfans nuds fur une planche garnie de coton, & percée pour l'écoulement des excrémens. On cherche à appaifer les cris des enfans en les berçant, mais on ne doit les agiter que fort doucement; car cette agitation, fi elle étoit trop violente, feroit peut-être capable de leur ébranler ha tête, & d'y caufer du dérangement. Pour que leur fanté foit bonne, il faut que leur fommeil foit naturel & long; cependant s'ils dormoient trop, il feroit à craindre que leur tempérament n'en fouffrît: dans ce cas, il faut les tirer du berceau, & les éveiller par de petits mouvemens, ou leur faire voir quelque chofe de brillant. C'eft à cet âge que l'on reçoit les premieres impreffions des fens : elles font fans doute plus importantes que l'on ne croit pour le refte de la vie.

de

On doit avoir grand foin de mettre le berceau, maniere que l'enfant foit placé directement devant la

lumiere; car comme fes yeux fe portent toujours du côté le plus éclairé, fi le berceau étoit placé de côté, un des yeux, en fe tournant vers la lumiere, acquer

roit plus de force, & l'enfant deviendroit louche. La nourrice ne doit donner à l'enfant que le lait de fes ma melles, pour toute nourriture, au moins pendant les deux premiers mois; il ne faudroit même lui faire prendre aucun autre aliment pendant le troifieme & le quatrieme mois, fur-tout lorfque fon tempérament eft foible & délicat. Quelque robufte que puiffe être un enfant, il pourroit en arriver de grands inconvéniens, fi on lui donnoit d'autre nourriture que le lait de la nourrice, avant la fin du premiere mois. En Hollande, en Italie, en Turquie, & en général dans tout le Levant, on ne donne aux enfans que le lait des mamelles pendant un an entier. Les Sauvages du Canada les allaitent jufqu'à quatre, cinq & même fept ans. Dans ce pays-ci comme les femmes n'ont pas assez de lait pour fournir à l'appétit de leurs enfans, elles y fuppléent par un aliment compofé de farine & de lait; mais ce n'eft guere qu'à deux ou trois mois que l'on doit commencer à leur donner cette nourriture plus folide, à laquelle même on devroit fubftituer du pain détrempé dans le lait; c'est ainsi qu'on prépare peu à peu l'eftomac des enfans à recevoir le pain ordinaire, & les autres alimens dont ils doivent fe nourrir, dans la suite.

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Les dents qu'on appelle incifives, font au nombre de huit; leur germe fe développe ordinairement le premier, & communément à l'âge de fept mois, fouvent à celui de huit ou dix, & d'autres fois à la fin de la premiere année. Cette opération, quoique naturelle, ne fuit pas les loix ordinaires de la nature, qui agit à tout inftant dans le corps humain fans y occafionner la moindre douleur, & même fans exciter aucune sensation; ici il fe fait un effort violent & douloureux, qui eft accompagné de pleurs & de cris. Les enfans por tent leurs doigts à leur bouche, pour tacher d'appaiser la démangeaifon qu'ils y reffentent. On leur donne un petit foulagement en mettant au bout de leur hochet un morceau d'ivoire ou de corail, ou de quelqu'autre corps dur & poli: ils le ferrent entre les gencives à l'endroit

douloureux; cet effort oppofé à celui de la dent, calme la douleur pour un inftant; il contribue auffi à l'aminciffement de la membrane de la gencive, qui étant preffée des deux côtés à la fois, doit fe rompre plus aifément; la Natute s'oppofe ici à elle-même fes propres forces, on eft obligé quelquefois de faire une petite incifion à la gencive pour donner paffage à la dent.

Sur la fin de la premiere, ou dans le courant de la feconde année, on voit paroître feize autres dents que L'on appelle Molaires ou mâchelieres, quatre à chaque côté de chacune des canines: ces termes pour la fortie des dent varient. Les dents incifives, les canines, & les quatre premieres mâchelieres tombent naturellement dans la cinquieme, la fixieme ou la feptieme année; mais elles font remplacées par d'autres, qui paroiffent dans la feptieme année, fouvent plus tard, & quelquefois elles ne fortent qu'à l'âge de puberté. La chute de ces feize dents eft caufée par le développement du fecond germe placé au fond de l'alvéole, qui en croiffant, les pouffe au dehors; ce germe manque ordinairement aux autres machelieres, auffi ne tombent-elles que par accident, & leur perte n'eft prefque jamais réparée.

Il y a encore quatre autres dents qui font placées à chacune des deux extrémités des mâchoires; ces dents manquent à plufieurs perfonnes, leur développement ne fe fait ordinairement qu'à l'âge de puberté, & quelquefois dans un âge beaucoup plus avancé, & c'eft par certe raifon qu'en les a nommées dents de fageffe. Le nombre des dents en général ne varie, que, parceque celui des dents de fagcffe, n'eft pas toujours le même, delà vient la différence de vingt-huit à trente-deux dans le nombre total des dents.

Lorfqu'on laiffe crier les enfans trop fort & trop longtems, ces efforts leur caufent des defcentes qu'il faut avoir grand foin de rétablir promptement par un bandage, ils guériffent aifément par ce fecours; mais fi on négligeoit cette incommodité, ils feroient en danger de la garder toute leur vie. Les enfans font fort fujets aux vers; en leur faifant boire de tems en tems un peu de vin, on préviendroit peut-être une partie des mauvais

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