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fenfations ne vient que du nombre plus ou moins grand, & de la pofition plus ou moins extérieure des nerfs; ce qui fait que les uns de ces fens peuvent être affectés par de petites particules de matiere qui émanent des corps, comme l'œil, l'oreille & l'odorat; les autres par des parties plus groffes, qui fe détachent des corps au moyen du contact, comme le goût; & les autres par les corps, ou même par les émanations des corps, lorf qu'elles font affez réunies & affez abondantes pour former une espece de maffe folide; comme le toucher, qui nous donne les fenfations de la folidité, de la fluidité & de la chaleur des corps.

Le toucher eft la fenfation la plus générale. Nous pouvions bien ne voir & n'entendre que par une petite portion de notre corps; mais il nous falloit du fentiment dans toutes les parties, pour n'être pas des automates qu'on auroit montés & détruits, fans que nous eusfions pû nous en appercevoir. La nature y a pourvu: partout où il y a des nerfs & de la vie, il y a auffi de cette efpece de fentiment. Le toucher eft comme la base de toutes les autres fenfations, c'est le genre dont elles font des efpeces plus parfaites, car toutes les autres fenfations ne font véritablement que des efpeces de toucher. C'est par le toucher feul que nous pouvons acquerir des connoiffances complettes & réelles; c'eft ce fens qui rectifie tous les autres fens dont les effets ne feroient que des illufions, fi celui-ci ne nous apprenoit à juger: car lorfque l'on voit pour la premiere fois, tous les objets paroiffent être dans les yeux, ils s'y peignent renversés: on ne peut en reconnoître la grandeur; la diftance, la pofition, la forme que par le touchers auffi voit-on que les enfans cherchent toujours à toucher tout ce qu'ils voient. M. Chéfelden apprit toutes ces vérités d'un Homme à qui il eut le bonheur de redonner la lumiere en lui faifant l'operation de la cataracte.

La peau, qui eft l'organe du toucher, est un tissu de fibres, de nerfs & de vaiffeaux dont l'entrelacement en tous fens forme une étoffe, à peu près de la nature de celle d'un chapeau. Cette tiffure fibreufe eft vifible dans les cuirs épais. Toute la fuface de la peau eft garnie de

mamellons nerveux ; ces mamellons font rangés une même ligne, & dans un certain ordre ; & c'est cet ordre qui forme les fillons que l'on obferve à la furpeau ; ce font ces mamellons nerveux, qui, réunis étroitement & expofés à l'air, deviennent à l'extrêmité des doigts des corps folides que nous appellons les Ongles.

La fenfation du toucher peut devenir fi parfaite dans l'Homme qu'on l'a vu, pour ainfi dire, quelquefois faire la fonction des yeux, & dédominager en quelque façon des aveugles de la perte de la vue. Il eft parlé d'un organifte de Hollande, qui diftinguoit les couleurs des cartés par la fineffe du toucher, ce qui le rendoit un joueur redoutable, car en maniant les cartes il connoiffoit celles qu'il donnoit aux autres, comme celles qu'il avoit lui-même. Il fuffifoit au Sculpteur Ganibafius de Volterre, qui étoit devenu aveugle, de toucher une figure pour en faire enfuite en argile une copie parfaitement reffemblante.

Le goût n'eft qu'une espece de toucher, qui n'a pas pour objet les corps folides; mais feulement les fucs ou les liqueurs dont ces corps font imbus, ou qui en ont été extraits.

L'odorat paroît moins un fens particulier qu'une partie ou un fupplément de celui du goût. L'odorat eft en quelque forte le goût des odeurs, & l'avant goût des faveurs. C'eft fur la membrane pituitaire, qui tapiffe les cavités du nez, que le fait la fenfation des odeurs. Les animaux ont l'odorat d'autant plus parfait que les cornets du nez font plus grands, & par conféquent tapiffés d'une plus grande membrane.

Les hommes ont pour l'ordinaire l'odorat bien moins bon que celui des animaux, par la raison que nous venons de dire. Cependant la régle n'eft pas abfolument générale. Dans les Antilles, il y a des Negres qui, comme les chiens, fuivent les hommes à la piste, & diftinguent avec le nez, la pifte d'un Negre d'avec celle d'un Européen. Au rapport du Chevalier Digbi, un garçon que fes parens avoient élevé dans une forêt ou ils s'éroient retirés pour éviter les ravages de la guerre, & qui n'y vivoit que de racines, avoit l'odorat fi fin, qu'il diftinguoit par ce fens l'approche des ennemis &

en avertiffoit fes parens. Depuis il changea de façon de vivre, & perdit à la longue cette grande fineffe de l'odorat. Il en conferva néanmoins une partie, car étant marié il diftinguoit fort bien, en flairant, fa femme d'avec une autre, & il pouvoit même la retrouver à la piste. Un tel mari, dit M. le Cat, en Italie feroit un argus plus terrible que celui de la fable.

ne,

11 femble donc que la perfection de l'organe de l'o dorat des animaux dépende non-feulement de l'orgamais encore du genre de vie, & entr'autres de la privation des odeurs fortes, dont les hommes font fans ceffe entourés, & dont leur organe eft comme ufé; enforte que les odeurs auffi foibles & auffi fubtiles que celles dont on vient de parler, ne peuvent y faire impreffion.

L'ouie eft une faculté qui devient active par l'organe de la parole; c'eft en effet par ce fens que nous vivons en fociété, , que nous recevons la penfée des autres, & que nous pouvons leur communiquer la nôtre : les organes de la voix feroient des inftrumens inutiles s'ils n'étoient mis en mouvement par ce fens; un fourd de naiffance eft néceffairement muet.

C'est en vain que l'air remué par les corps bruyans ou fonores, ou agité par le mouvement de celui qui parle, nous frapperoit de toutes parts, fi la ftructure de l'oreille ne la rendoit pas propre à recevoir ces fenfa

tions.

Nous allons préfenter ici fuccintement les principales parties que la nature emploie pour faire fentir les fons. C'eft dans le Traité des fens de M. le Cat, qu'il faut voir la defcription anatomique & complette de cet

organe.

rayons

La partie extérieure de l'oreille fe nomme la Conque: fa forme eft deftinée à recevoir les fonores en plus grande quantité. Le canal creux fe nomme le Conduit auditif, & aboutit au Tympan, qui eft une membrane mince, un peu concave du côté du conduit auditif. Immédiatement après la membrane du tympan, font quatre offelets qu'on appelle, à caufe de leur figure, l'un Os orbiculaire, l'autre l'Etrier, le troifieme l'En

clume, & le quatrieme le Marteau. Une partie de celui-ci qu'on a nommé le Manche, aboutit au centre du Tympan, & fert à le tendre plus ou moins. Lorfque cette membrane du tympan eft lâche, les fons foibles s'y amortiflent & ne paffent pas outre; ou bien s'ils paffent, leur impreffion eft fi peu fenfible que l'ame n'y fait point d'attention; mais fi le tympan eft bien tendu, comme il arrive quand on écoute avec attention,le moin dre fon fe communique par cette même membrane à la maffe d'air qui eft derriere, dans une cavité que l'on nomme la Caffe du tambour; cette cavité eft pleine d'air & communique avec la bouche par un canal que l'on nomme la Trompe d'Euftache. Il fuit de cette ftructure, que l'air du tambour communiquant toujours avec l'air extérieur fait équilibre à celui qui remplit le conduit auditif. A la caiffe du tambour repond une autre partie de l'oreille que l'on nomme le Labyrinthe, à caufe de fes détours; il eft compofé du veftibule, des trois canaux femi-circulaires & du Limaçon. Lorfque le fon, ou l'air agité par la parole, vient donc à émouvoir la membrane élastique du tympan, l'air qui eft dans la caiffe du tambour fe trouve agité, & communique fon mouvement à celui qui eft dans le labyrinthe, dont toutes les parties font revêtues des petites fibres du nerf auditif: c'eft principalement dans la partie du labyrinthe que l'on nomme le Limaçon, & qui a vraiment la figure de la coquille d'un limaçon, mais qui eft divifée par une cloifon ou lame membraneufe, que fe fait la sensation des fons.

Une incommodité des plus communes dans la vieillefe, eft la furdité. Il y a lieu de penfer qu'elle eft occaGonnée, parceque la lame membraneuse du limaçon augmente en folidité à mesure que l'on avance en âge ce qui rend l'ouie dure. Lorfque cette lame s'offifie on devient entierement fourd.

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Un moyen de reconnoître fi la furdité eft occafionnée parceque la lame fpirale du limaçon eft devenue infenfible, eft de mettre une petite montre à répétition dans la bouche du fourd & la faire fonner; s'il entend ce fon qui fe communique par la trompe d'Euftache,

Yafurdité fera certainement caufée par un embarras extérieur dans le conduit auditif auquel il eft poffible de remédier en partie.

Comme la propagation des fons fe fait felon les mêmes loix que celles de la lumiere, on a cherché à raffembler les rayons fonores par le moyen d'un cornet de figure parabolique propre pour le faire entendre de ceux qui ne font pas entierement fourds.

Le méchanifme de la vifion n'eft pas moins admirable que celui de l'ouie. L'œil n'eft que l'épanouiffement du nerf optique : fon globe eft compofé extérieurement de plufieurs membranes les unes fur les autres, qui tirent leur origine d'un nerf qui vient du cerveau, & qui porte le nom de Nerf optique; le dedans eft rempli par trois humeurs de différente confiftance, dont l'ufage eft de donner lieu à la refraction des rayons de lumiere, par le moyen defquels nous voyons les objets.

Le Nerf optique, ainfi que les autres, a trois parties principales; favoir, la Dure-mere, qui l'enveloppe exrieurement; la Pie-mere qui eft comme une feconde enveloppe, & enfin la Moëlle, qui eft une fubftance plus molle: ces trois parties fe dilatent pour former le globe de l'œil, & portent alors différens noms.

La premiere, qui eft une expansion de la dure mere, fe nomme Sclérotique; elle forme cette partie antérieure de l'œil que l'on peut toucher immédiatement du doigt; elle eft tranfparente comme de la corne, ce qui la fait nommer auffi Cornée transparente. Cette partie de l'œil, à caufe de la faillie qu'elle a, procure à la vue une plus grande étendue. Si la cornée étoit plane & à fleur de l'orbite, l'animal ne verroit que les objets qui font devant lui, à moins qu'il ne tournât la tête à tout inftant; au lieu qu'étant arrondie & faillante, elle fait voir diftinctement ce qui eft devant l'œil, & appercevoir au moins confufément ce qui eft fur les côtés, jufqu'à une certaine distance.

L'Iris eft ce cercle coloré que l'on apperçoit fous la cornée transparente, & au milica duquel il y a un trou rond, qu'on nomme la Prunelle ou la Pupille. L'Iris eft formée par l'épanouiffement de la Pie-mere; cette Iris varie de couleur dans les différens individus, & elle eft

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