Cornaro Venitien, chevalier de Malthe, grandprieur de Chypre, diacre, cardinal du titre de N.1551. S. Theodore, puis prêtre du titre de S. Marc, archevêque de Trani, & administrateur de l'églife de Bergame.

cardinal

Le nombre des cardinaux morts dans cette CHI. même année, étoit de beaucoup moindre; on Mort du n'en compte que deux, Martinufius, dont nous André avons parlé & André Cornaro Venitien, de la Cornaro. noble famille des Cornaro, & neveu de François Craconius du même nom, auffi cardinal. André fe diftin- ut fup. to. 3. pag.705. gua par fa liberalité & par fon adreffe dans la con- Per. Justiduite des affaires. Il avoit d'abord été clerc de la nian. in hift. chambre apoftolique, & fut enfuite évêque de Venetâ. Brefce, n'aïant que vingt-trois ans. Et le pape Aubery, Paul III. le créa cardinal diacre fous le titre de vie des cardin. S. Theodore, le dix-neuviéme Decembre 1544. Ughel, in Jules III. changea fon titre en celui de fainte Ma- Ital. facr. rie in Dominica, & le fit archevêque de Spalatro, en lui donnant la legation de la province du patrimoine de S. Pierre. Il mourut le trentiéme de Janvier dans la fleur de fon âge, & fon corps dépofé chez les Auguftins, fut enfuite tranfporté à Venife pour être inhumé dans le tombeau de fes ancêtres, en l'église de S. Georges auprès de fon oncle.

CIV.

fels docteur

Jean Leonard Haffels, docteur & profeffeur de l'écriture fainte dans l'université de Louvain, Mort de mourut auffi dans cette année, pendant qu'il étoit Jean Haf au concile à Trente. Ce fut le fameux Michel de LouBaïus qui remplit la chaire après lui. On lui attri- vain. bue des commentaires fur Ifaie & fur S. Paul, Le Mire. de fcript. ecimprimez fous le nom d'Adam Sasbouth, de l'ordre des Freres Mineurs, qui étoit de Delft, Dupin, bibl. & qui étant allé étudier à Louvain, y avoit pris des auteurs les leçons d'Haffels. Il n'a donné au public fous ecclef.to. 16. in 4. p. 2. fon propre nom, qu'une differtation fur le fait de Nectaire patriarche de Conftantinople, qui

de

clef.

depofa le penitencier de fon églife; d'où les ProAN.155 teftans ont voulu conclure, que ce patriarche abolit en même-tems la confeffion. Haffels foutient dans cet ouvrage, que ce ne fut point la confeffion qui fut abolie, mais feulement l'usage qui s'étoit introduit, qu'il n'y eût qu'un feul prêtre préposé pour écouter les confeffions. Cet écrit fut préfenté au concile qui l'approuva; il eft en forme de dialogue entre les deux historiens, Socrate & Sozomene, après une préface où le fait eft expofé.

CV. Mort de

cer mini

Are Prote

La prétendue réforme perdit dans cette même année 1551. Martin Bucer, miniftre ProMartin Bu- teftant à Strasbourg, né à Scheleftat en 1491. c'étoit un homme affez docte, d'un efprit pliant, ftant. & plus fertile en diftinctions que les fcholastiques Sleidan. in les plus rafinez; agréable predicateur, un peu pécomment. 1. fant dans fon ftile; mais qui impofoit par fa tail22.p.809. Mel hier le & par le ton de sa voix. En 1506. il se fit religieux Dominicain, & fon efprit joint à fon vita Theol. érudition, le firent eftimer dans cet ordre : mais Thuanus la lecture de plufieurs ouvrages de Luther lui fibi fub fin. rent changer de fentimens & de religion. Dès 1.6.p.264 l'an 1521. il eût quelques conferences avec Luhift. des Va ther à Heidelberg, & enfeigna fa doctrine; mais riat, te. I. en 1530. il lui préfera celle de Zuingle.

Adam in

German.

in

4.

liv. 3.

Burnet,

Il fut mande en 1548. à Ausbourg, pour y art.3. foufcrire au livre qui contenoit l'accord qu'on apbift. de la pelloit Interim. Bucer refufa d'y donner fon conreformat, 2. fentement & fon approbation, comme on le fouin 4. 1. haitoit, & retourna à Strasbourg y continuer fes exercices ordinaires. Ce ne fut pas néanmoins pour long-tems, parce que Cranmer archevêque de Cantorbery, devenu tout puiffant fous le regne d'Edouard VI. & plein de zéle pour établir la religion Protestante dans le roïaume, fit prier Bucer de venir le joindre & travailler à cette œuvre avec Pierre Martyr & Bernardin Ochin

P.247.marque sa mort le 28. de Janvier.

,

qui avoient auffi été appellez pour commencer la réforme. Bucer arriva donc en Angleterre, & trouva un azile parmi les nouveaux Proteftans, qui fe fortifioient fous Edouard, il mourut à Cantorbery le 27. Février âgé de 61. ans, & fut enterré fort honorablement; plufieurs fçavans firent des épitaphes à fa loüange. Il fe trouva à fes funerailles plus de deux mille perfonnes, qui accompagnerent fon corps jufqu'à la grande églife: mais quatre ou cinq ans après, fous le regne de Marie, il fut déterré & brûlé; & en 1560. la reine Elifabeth aïant rétabli les erreurs des Calviniftes en Angleterre, fit rétablir fon tombeau, & réhabiliter fa memoire.

AN.1551.

Quelques jours avant fa mort, comme il gémiffoit fur le deplorable état de l'Allemagne, il dit qu'il craignoit fort que faute d'observer exa&tement la difcipline touchant la punition des méchans, & ce qui concernoit le miniftere, le loüable défir d'un fi grand nombre de gens de bien, qui fouhaitoient avec tant d'ardeur la réformation de l'église, n'eût point de fuccés: Qu'il défiroit donc avec paffion que ce que le roi Edouard avoit ordonné pour l'établiffement de la difcipline ecclefiaftique fût folidement établi, & religieufement obfervé dans to te l'Angleterre. Il a composé un très-grand nombre d'ouvrages differens, & il eft peut-être un des Proteftans qui ait le plus écrit, & qui ait été plus occupé d'affaires concernant la réforme. Il eut plus d'égard pour l'ordre épiscopal que Calvin, & il approuva la conduite des Anglois, qui le garderent malgré plufieurs de leurs confreres. Il y a beaucoup Prateel in d'apparence que Bucer avoit toûjours crû le mé- Bu er. Flor. rite des bonnes œuvres. Il reprocha vivement à de Remond. dé orig. haCalvin de ne juger que felon qu'il aimoit ou fe- ref. 1.2. c. lon qu'il haïffoit, & qu'il n'aimoit ou ne haïffoit 11. que felon fa fantaisie. Quelques auteurs ont affû- Sander he

réres. 2151.

AN.1551.

CVI.

de Calvin

de la mort

ré qu'il étoit mort dans les fentimens de la religion judaïque,

Quoique Calvin ne fût pas tout-à-fait d'accord Chagrin avec Bucer fur la religion, il ne laissa pas d'être fort sensible à fa mort, de même qu'à celle de de Bucer, Joachim Vadian, conful de S. Gal, qui lui étoit & d'un au- fort attaché, & qui étoit homme d'érudition-: tre de fes mais ce qui lui fit plus de peine, fut que la faamis. ction de ceux qui lui étoient opposez, éclata

excitez

enfin cette année. Comme il revenoit d'un lieu fitué au-delà du Rhône, où il avoit prêché, il fut attaqué avec infulte, & Raymon fon collegue tomba dans l'eau, parce qu'on avoit levé fecretement pendant la nuit le pont fur lequel il deCVII. voit paffer. Il y eut auffi une espece de fédition Troubles dans le temple de S. Gervais, parce que le minicontre lui ftre avoit refusé de batiser un enfant fous le nom dans Ge- de Balthazar, que fes parains & maraines lui vouneve. loient donner, prétendant que cela étoit défenBeza in vit. du par les loix pour certaines raifons. Outre ces Calvini ad traverfes, qui environnoient Calvin, il lui fallut encore effuïer celles que lui fufcita Jerôme Bolfec, qui avoit été religieux Carme, & qui aïant prêché beaucoup d'erreurs dans l'églife de faint Barthelemi à Paris, quitta fon froc, & s'enfuit au-dela des monts, auprès de Renée de France, ducheffe de Ferrare, le commun azile de ceux qu'on pourfuivoit pour foutenir les nouvelles opinions.

hunc ann.&

in apolog. altera ad

Xaintes. oper. to. 2. pag.345.

Ce Bolfec étant à Ferrare, fe mêla d'exercer la medecine, & fe maria auffi-tôt; on ne dit pas la raifon qui lui fit quitter ce pays pour venir à Geneve, y exercer la même profeflion qu'il ne fçavoit pas felon toutes les apparences: Beze difoit de lui qu'il avoit été fait medecin en trois jours. Auffi fe voïant tout-à-fait méprisé des autres medecins, il entreprit de faire le theologien, & commença à dogmatifer en secret fur le my

ftere

AN.1551.

vin & Je

ftere de la prédeftination & fur la grace, enfuite il eut la hardieffe de faire un difcours public contre l'opinion reçûë à Geneve. On croit que ce difcours n'étoit qu'une réfutation d'un fermon qu'il venoit d'entendre le 16. d'Octobre 1551. fur la grace du Saint Efprit. Les Proteftans lui cvi. ont reproché qu'il débitoit un pur Pelagianifme, Differend quoique felon d'autres, il parla en Catholique fur entre Calces myfteres. Mais comme il tenoit un langage rôme Bolbien different de ce qu'enseignoit Calvin, celui-fec. ci ne l'eut pas plûtôt appris, qu'il l'alla voir, & le cenfura d'abord avec affez de moderation; enfuite il le fit venir chez lui, & tâcha de le faire changer. Ces corrections n'empêcherent pas Bolfec de continuer, & de parler toûjours dans les mêmes termes contre le fentiment de fon adverfaire touchant la prédeftination; de forte que Calvin s'étant un jour caché pour l'entendre, se montra tout d'un coup, dès que le prédicateur eût fini, & le refuta par des autoritez de l'écriture & de faint Augustin, qu'il ne manqua pas d'interprêter felon fes idées.

CIX.

Bolfec eft

banni des

terres de

neve.

Calvin n'en demeura pas là. Il engagea un des magiftrats qui étoit prefent à cette affemblée, de faire emprisonner Bolfec. La caufe fut amplement difcutée : on écrivit aux églifes de Suiffe pour avoir leur avis, & fur leur réponse, le fénat de Geneve déclara Bolsec convaincu de fédi- la républi tion & de Pelagianifme, & comme tel le ban- que de Genit des terres de la république, à peine du foüet s'il y revenoit. Cette fentence fut prononcée le 23. de Decembre 1551. Il fe retira dans un lieu du voifinage qui dépendoit du canton de Berne. Comme il y publioit hautement que Calvin faifoit Dieu auteur du peché, ce qui n'étoit point une calomnie: celui-ci craignant qu'une telle accufation intentée par un homme qui ne pensoit pas comme lui, ne fît quelque impreffion fur l'ef