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moire eft commune à tous les animaux , parce qu'elle n'eft que le dépôt des fenfations. Mais cette Métaphyfique n'a point paffé dans notre Langue & dans nos opinions. Mémoire eft un mot générique toute idée rappellée à l'efprit eft la mémoire de la chofe; comme toute idée retenue dans l'efprit est un dépôt de la mémoire. La réminifcence eft des chofes qui n'ont fait qu'une impreffion fi foible, ou dont l'impreffion a été fi fort effacée qu'à peine eft-il poffible d'en retrouver ou d'en reconnoître les traces.

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Le fouvenir eft littéralement ce qui revient dans l'efprit. Le ressouvenir eft manifeftement un fouvenir nouveau ou renouvellé. Le fouvenir qui fe renouvelle, fuppofe que l'oubli fe renouvelle également, & par conféquent il s'affoiblit; & dès lors il faut fe rappeller fouvent la chofe, & à la fin il faut des efforts pour s'en refouvenir. Alors, on ne s'en fouvient plus qu'imparfaitement; car, à force d'oublier la chofe, on en oublie totalement tantôt une circonftance, tantôt une autre: on s'en fouvient mal. Ainfi l'on dit ( affez mal à ( propos la vérité) qu'on a des ressouvenirs, c'est-à-dire des reffentimens de quelque mal, lorfqu'on en éprouve de temps en temps de légeres atteintes. On dit que le fouvenir eft d'un temps plus voifin, & refouvenir d'un temps plus éloigné : diftinction que Cicéron fait entre memoria & recordatio. Le fouvenir pur eft plutôt d'une chofe plus ou moins préfente à l'efprit, plus ou moins facile à rappeller, plus ou moins fidélement représentée : le ressouvenir eft plutôt d'une chofe plus ou moins oubliée, plus ou moins difficile à retrouver, plus ou moins imparfaitement retracée. Le fouvenir eft d'une

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mémoire fraîche; le ressouvenir, d'une mémoire caduque.

Ainfi donc la réminiscence eft le plus léger & le plus foible des fouvenirs; ou plutôt c'est un ressouvenir fi foible & fi léger, qu'en nous rappellant une chofe, nous ne nous rappellons pas ou nous ne nous rappellons qu'à peine d'en avoir eu peut-être quelque idée. Le reffouvenir eft le fouvenir renouvellé d'une chofe plus ou moins éloignée du moins de notre efprit, oubliée autant de fois que rappellée, & difficile foit à retrouver foit à reconnoître. Le fouvenir eft l'idée d'une chose qui, plutôt détournée de notre attention qu'abfente de notre efprit, nous redevient préfente par la mémoire & rappelle notre attention. La mémoire est un acte quelconque de cette faculté qui nous rappelle nos idées.

Rémiffion, Abolition, Abfolution, Pardon, Grace (a).

EXPOSONS d'abord ce que ces termes fignifient

(a) Comme il y a quelques rapports entre mes idées & celles de l'Abbé Girard fur le pardon, la rémiffion, & l'abfolution, je dois mettre ici fous les yeux du Le&eur cet article de fes Synonymes.

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כל

» Le pardon eft en conféquence de l'offenfe, & regarde » principalement la perfonne qui l'a faite : il dépend de » celle qui eft offenfée; & il produit la réconciliation. La rémiffion eft en conféquence du crime, & a un rapport » particulier à la peine dont il mérite d'être puni: elle eft » accordée par le Prince ou par le Magiftrat, & elle arrête l'exécution de la Juftice. L'abfolution eft en confé» quence de la faute ou du péché, & concerne propre»ment l'état du coupable: elle eft prononcée par le Juge » civil ou par le Miniftre Eccléfiaftique, & elle rétablit l'accufé ou le pénitent dans les droits de l'innocence «<

dans le langage de la Jurifprudence; langage fingulier, qui n'eft ni trop intelligible, ni trop exact, ni trop correct, ni trop pur; j'ignore pour quoi.

La grace eft le genre à l'égard du pardon, de la rémission, de l'abolition. Le pardon eft la grace accordée par le Prince à celui qui, impliqué dans une affaire n'a été ni l'auteur ni le complice du crime commis: c'eft donc en effet la grace de ne pas punir un innocent. La rémission est la grace accordée à celui qui a commis un meurtre involontaire, ou qui l'a commis en défendant fa vie: cette grace eft donc une juftice accordée à un homme qui n'a été que malheureux ou qui n'a fait qu'ufer de fon droit. L'abolition eft la grace accordée par la puiffance abfolue au criminel vraiment coupable, & coupable d'un crime irrémiffible par fa nature oh! c'eft-là vraiment une grace & la plus étonnante des graces, qui dérobe au fupplice & affure l'impunité. Quant à l'abfolution, c'eft un jugement par lequel un accufé est déclaré innocent ou réhabilité comme tel.

Revenons à la Langue vulgaire. L'idée propre de rémiffion eft celle de fe défifter de la peine qu'on a droit d'exiger de quelqu'un. On remet une peine une dette dont on fait grace: c'est renoncer à exercer fon droit. La rémiffion eft entiere ou partielle; car ce mot fignifie quelquefois modération diminution, relâchement.

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L'idée propre d'abolition eft celle de détruire, d'effacer, d'anéantir le crime, comme fi la chofe étoit nulle ou non-avenue. Abolir exprime par la particule ab, la deftruction, la fuppref.on, l'extinction de l'idée exprimée par le mot ol, croître,

s'élever

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s'élever, fe maintenir; & par conféquent il exprime l'idée oppofée.

L'idée propre d'abfolution eft celle de délier l'accufé ou de le délivrer des liens par lefquels il étoit enchaîné. On dit les liens du péché, les liens des cenfures, &c. : l'abfolution rompt ces liens, Abfoudre, latin abfolvere, eft un compofé de folvere, rompre, délivrer, acquitter.

L'idée propre de pardon eft de faire la rémiffion entiere de la faute qu'on a droit de punir comme fupérieur, ou de l'offenfe qu'on eft dans le cas de reffentir, comme fi on l'oublioit & s'il n'en reftoit aucune trace. Pardonner, c'eft, à la lettre, donner parfaitement ou fans réferve, remettre fans reftriction.

L'idée propre de grace eft ici celle d'accorder un pardon purement gratuit, & de recevoir le coupable en grace, en faveur. Je n'ai pas befoin d'expliquer encore la fignification de ce mot.

La remiffion eft un acte de modération; l'abolition eft l'acte d'une volonté abfolue & d'une infigne faveur: l'abfolution eft l'acte d'un Juge équitable ou propice: le pardon eft un acte ou de clémence ou de générofité : la grace eft un acte d'affection & de bonté.

La rémiffion produit l'effet de décharger le coupable de la peine qu'il avoit encourue. L'abolition produit l'effet de fouftraire le coupable à la Justice, & de le faire jouir des droits de l'innocence. L'abfolution produit l'effet de rétablir l'accufé ou le pénitent dans fon innocence, & dans la jouiffance de toute fa liberté & de tous fes droits. Le pardon produit l'effet d'ôter la divifion entre l'offenfeur & l'offenfé, ou de ramener l'inférieur dans les bras du Tome IV.

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fupérieur. La grace produit l'effet de remettre le coupable en grace.

Remettre eft ici oppofé à exiger; abolir, à faire juftice; abfoudre, à condamner; pardonner, à punir ou pourfuivre la peine la grace exclut la juftice rigoureufe.

Appliquons ces termes aux péchés, par exemple. La remiffion des péchés fait que le pécheur n'en rendra plus compte: l'abolition des péchés fait qu'ils font entièrement effacés l'abfolution des péchés fait que le pécheur eft délié dans le Ciel comme fur la terre le pardon des péchés fait qu'il n'en fera point tiré de vengeance: la grace fait que le pécheur rentre en grace auprès de Dieu.

Rencontrer, Trouver.

CES termes nous font bien familiers; & l'on difpute fur leur fignification, & l'on n'en donne que des notions inexactes ! Eh que fçavons-nous donc ?

De modernes Vocabuliftes reprennent l'Académie & leurs Confreres, d'avoir avancé, conformément à l'ufage, que rencontrer & trouver le difent des perfonnes & des chofes, foit qu'on les cherche, foit qu'on ne les cherche pas. Et fur quoi fondent-ils leur cenfare? Sur l'autorité de l'Abbé

Girard, qui, fans preuve & fans motif, décide que nous trouvons les chofes inconnues ou celles que nous cherchons; & que nous rencontrons-lès chofes qui font à notre chemin, ou qui fe préfentent à nous & que nous ne cherchons point.

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