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Salon.

s'il pouvoit, tout le genre humain dans l'unité de créance, & dans la profeffion de la même foi. L'habile impofteur, après avoir préparé les efprits par de pareils difcours, bâtit son systême de differentes pieces, qu'il prit de la religion des Juifs & de celle des Chrétiens; & pour y réuffir, il s'étoit fait aider fecreAbdiasBen- tement dans fa retraite par un * Juif Perfan, & par ** Sergius, un ** Moine Neftorien, tous deux apoftats, très fçavans dans leur Religion, & qui lui avoient lû l'un & Dicoyez l'autre plufieurs fois l'ancien & le nouveau Teftafur l'Auteur ment. Il en ajufta enfuite les differens påffages à fon qui eft à la nouveau plan; & à mesure que par le fecours de ces fin de ce pre- deux renegats, il avoit mis au net quelque article, il me, & à la les revêtoit d'un ftile pompeux & figuré, où il tâ

autrement

Bahira.

*

le Difcours

de l'Alcoran,

mier Volu

tête des

Preuves.

choit d'imiter tantôt le fublime du commencement de la Genese, & tantôt le pathetique des vrais Prophetes. Il publioit enfuite qu'il venoit de recevoir du Ciel cet article; & fous prétexte qu'il n'étoit que le dépofitaire & le herault de cette doctrine celefte, il renvoyoit ceux qui lui faifoient des objections à l'Auteur prétendu de ces révelations, & il faifoit valoir fon ignorance même pour preuve du peu de part qu'il avoit dans cette nouvelle Religion..

Il emprunta des Juifs le principe de l'existence & de l'unité d'un feul Dieu, mais fans multiplication de Perfonnes divines : il enfeignoit en même tems, la créance de la Réfurrection, du Jugement universel, des récompenfes & des peines de l'autre vie. Les Chrétiens lui fournirent l'exemple d'un Carême qu'il prefcrivit, l'ufage fréquent de la Priere, qu'il fixa à cinq fois par jour, la charité envers les pauvres, & le pardon des ennemis. Et en faveur

des

des Payens, il admit certaine efpece de prédeftination mal entendue, que les anciens Idolâtres appelloient communément le deftin; decret éternel qu'ils croyoient fuperieur, même à la volonté de leurs Dieux.

Ce mélange de differentes Religions, où chacun croyoit trouver des traces de fon ancienne créance, féduifit plufieurs citoyens de la Mecque; & l'adroit impofteur pour établir ses erreurs, fçût mettre en œuvre de grandes veritez, & même l'apparence de grandes vertus. Le Magiftrat de la Mecque allarmé du progrès que faifoit cette Secte, en profcrivit l'Auteur & fes Partisans; le faux Prophete prit la fuite, & feretira dans une autre Ville de l'ArabiePetrée, appellée ratrib, & qu'il nomma depuis Medina-al-nabi, Ville du Prophete. Cette fuite fi celebre parmi les Mahometans, & qu'ils appellent dans leur langue L'HEGIRE, a fourni depuis à leurs Hiftoriens l'époque de leur Chronologie; & la premiere année de cette époque Musulmane, tombe, felon la plus commune opinion, dans la 22 année ✶ du feptiéme fiecle.

* An de Jefus Chrift

622.

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De l'Hégire

NOTA que
Mufulmans

l'année des

n'eft que de

font feule

Le péril que Mahomet avoit couru à la Mecque, lui ayant fait connoître que par la voie feule de la perfuafion, il ne viendroit pas à bout de fes deffeins ambitieux, il réfolut d'avoir recours aux armes. 12 mois luL'impofteur ne manqua pas d'appeller le ciel à fon naires, qui fecours; & bien-tôt il publia que l'Ange Gabriel lui ment 354 avoit apporté de la part de Dieu une épée, avec or- 13 de nos andre de l'employer pour foumettre ceux qui refuferoient d'embraffer la nouvelle Religion. Il ne faut point chercher ailleurs la caufe des pro.

jours ainfi

nées font à

peu près 34 des leurs.

1

grès étonnans que cette Secte impie fit en fi peu de tems dans l'Arabie, & enfuite dans la plus grande partie de l'Afie Mineure; & apparemment que fi Mahomet l'eût pû prévoir, il fe feroit épargné la peine de forger tant de révelations, & de rajuster enfemble tant de pieces détachées des autres Religions.CetApôtre armé,commença ce nouveau genre de mission par faire des courses fur ses voisins. L'appas du butin,qui a tant de charmes pour les Arabes, en attira un grand nombre sous ses enseignes: aucune Caravanne n'ofoit plus paffer proche des endroits où il fe trouvoit, fans s'expofer à être pillée; & en faisant le métier de voleur, il apprit insensiblement celui de conquérant. De fes foldats, & même des ennemis vaincus, il en faifoit de nouveau disciples : il les nomma Musulmans, c'est-àdire fideles, ou gens qui font entrez dans la voie du falut. Bien-tôt, auffi grand capitaine qu'éloquent prédicateur, il s'empara de la Mecque; & la plûpart des places fortes, & des châteaux de l'Arabie tomberent fous l'effort de fes armes. Il étoit fecondé dans ces guerres par Abubekre son beau-pere, par Aly son cousin & fon gendre, & par Omar & ÖtCantacuze- man, tous quatre ses Apôtres & fes principaux Capitaines, tous fanatiques de bonne foi, & qui se firent volontiers les fujets d'un impofteur, dont ils n'avoient été d'abord que les difciples. Mahomet par fa valeur & par fon habileté fçut réunir en sa perfonne le Sacerdoce avec l'Empire; & en 23 ans de fon prétendu apoftolat, d'autres difent feulement la dixième année, prefque toute l'Arabie se trouva foumise à fa domination, & embraffa en même-tems fa nouvelle doctrine.

Alc. c. 4.

ni Orat. 1.

Sect. 12.

633 ou 632.

Le faux Prophete en mourant, avoit defigné pour fon fucceffeur Aly qui avoit époufé fa fille, appellée Fatime; mais le gendre du Prophete éprouva que les dernieres volontez des Princes les plus abfolus, font ordinairement enfevelies dans leur tombeau. Abubekre, comme beaucoup plus âgé qu'Aly, lui fut préferé par le crédit d'Omar & d'Otman, qui par le choix d'un vieillard, s'ouvrirent le chemin pour parvenir à leur tour à la même dignité. Et l'élection d'Abubekre fit naître depuis les fchifmes & les guerres civiles, qui s'éleverent entre les Mahometans. Les fucceffeurs de Mahomet prirent le titre deCALIFES,c'est-à-dire Vicaires du Prophete, ou d'ALMOUMENINS, Princes ou Commandeurs des Croyans. Ces premiers fucceffeurs, pleins de ce feu & de ce zele qu'infpire toujours une nouvelle Religion, étendirent en differentes contrées la doctrine de leur Maître, & leur propre domination: l'une ne marchoit point fans l'autre. Ils acheverent d'abord la conquête de l'Arabie, dont ils chafferent les Perfes & les Grecs. Ils enleverent enfuite à ces derniers, Damas, Antioche & toute la Sirie, pénetrerent dans la Palestine, emporterent Jerufalem, pafferent en Egypte, qu'ils foumirent à leur Empire, détruifirent entierement la Monarchie des Perfes, s'emparerent de la Medie, du Koraffan ou Bactriane, du Diarbeick, ou de la Mesopotamie. Ils entrerent enfuite dans l'Afrique, où ils ne firent pas des progrès moins furprenans, & dont ils fubjuguerent toute la côte occidentale à l'égard de l'Egypte.

Je ne parle point des Ifles de Chypre, de Rhodes, de Candie, de Sicile, de Malte, & du Goze, qu'ils

ravagerent, ou dont ils fe rendirent maîtres, non plus que des Espagnes, où les Arabes, dès le commencement du huitiéme fiecle, fur les ruines de la Monarchie des Gots, fonderent un nouvel Empire. De grandes Provinces de la France fituées au de-là de la Loire, furent expofées à la fureur de leurs armes ; & fans la valeur incomparable de Charles Martel, ce Royaume n'auroit pas eu un fort plus favorable que l'Espagne. Enfin ils menaçoient le monde entier de leurs fers; & les malheureux reftes de l'Empire Grec, dès ce tems-là, n'auroient pas pû tenir contre une puiffance fi redoutable, s'il ne se fût élevé des guerres civiles entre les Chefs de cette Nation. Mais les Gouverneurs des Provinces, trop puiffans pour des particuliers, s'en firent les Souverains. On vit en differentes contrées de l'Afie & de l'Afrique, & en differens tems jusqu'à cinq Califes, qui tous se prétendoient issus de Mahomet, & les véritables interpretes de fa Loi. La plupart même de ces Califes enfevelis depuis dans le luxe & la moleffe, remirent le gouvernement civil & militaire de leurs Etats à des Emirs ou des Soudans, efpece de Maires du Palais, qui ne furent pas longtems fans s'en rendre les maîtres abfolus, & dont la plupart ne laifferent aux Califes que l'inspection fur les affaires de la Religion, le droit d'être nommez les premiers dans les prieres publiques, & d'autres honneurs de pure ceremonie, fans puissance & fans domination.

De toutes les conquêtes que ces Infideles avoient faites, il n'y en eut point de plus fenfible pour les Chrétiens, que celle de la Terre Sainte, & de la

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