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» Milice confacre fes jours ou dans des infirme- GUILIN ries, ou dans les combats contre d'infideles Ama- MONTAIGŲ lecites, & les ennemis de la Croix. C'est ainfi que s'en explique le Roi de Hongrie. *

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Ce Prince ayant appris que Coradin Sultan de Damas, & fils de Safadin, s'étoit mis en campagne pour faire le fiege de faint Jean d'Acre, fortit auffi-tôt de la ville & s'avança du côté des ennemis avec les Rois de Jerufalem & de Chypre, les deux Grands Maîtres des Hofpitaliers, des Tem- . pliers, le Maître des Teutoniques, & tout ce qu'il y avoit de troupes dans la Place. Les Infideles furpris d'un armement fi prompt, & de la fierté avec laquelle les Chrétiens marchoient à eux, se retrancherent avec foin. On ne laiffa pas de tailler en pieces plufieurs de leurs partis qui s'écartoient pour aller au fourage. Coradin ne jugea pas à propos dans cette conjoncture d'en venir à une action dé, cifive, & contre une armée qui avoit trois Rois à fa tête, il se retira fur les terres de fon obéiffance. Les Chrétiens le pourfuivirent quelque tems, ravagerent à leur tour fa frontiere, & comme l'hyver approchoir, ils fe féparerent. Le Roi de Chypre prit le chemin de Tripoli où il mourut de maladie peu de tems après qu'il eût quitté l'armée. Celui de Hongrie, avant que d'abandonner la Palestine, se bai

* Nec immerito cùm illic hofpitati videremus innumerum pauperum cætum diurno paltu quotidie fuftentari, feffos languidiorum artus lectifternis, variifque ciborum copiis refici, mortuorum corpora cum debita veneratione fepeliri, ut in genere fingulorum referamus quæ per fingula generum enarrare non poffumus, ut Mariam & Martham, facratiffimum fæpe dictæ domus Hofpitalii collegium runc variis fincere contemplationibus, nunc contra Dei adverfarios & hoftes Crucis Chrifti, adverfus etiam Amalec inceffabili perfecta militiæ conflictu de die in diem dimicare, Rainaldus 1. 13. m. 16. pr280.

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GUERIN gna avec toutes les troupes dans le fleuve du Jour MONTAIGU dain, la veille de la faint Martin; ceremonie reli

gieufe que les pelerins pratiquoient par dévotion quand ils n'en étoient pas empêchez par les Turcs & par les Sarrafins. Enfin ce Prince, après avoir paffé trois mois dans la Palestine, pour accomplir son vau, & preffé par le souvenir des malheurs arrivez en fon absence dans fon Royaume, en reprit le chemin. Toutes les inftances que lui fit le Patriarche de Jerufalem, même les foudres de l'excommunication que ce Prélat lança contre lui, ne le purent retenir plus long-tems à la Terre sainte; & après une longue navigation & differens perils qu'il effuya, il arriva heureusement dans fes Etats. Ses premiers foins à fon retour, furent de faire inftruire en fa prefence le procès de Bancbannus après avoir entendu lui-même les témoins, & examiné les differentes circonftances de cette malheureuse affaire, il fut affez équitable pour déclarer le Regent abfous de la mort de la Reine.

Le Roi de Jerufalem, le Duc d'Autriche & les Hofpitaliers, après fon départ, s'avancerent d'un côté dans le pays ennemi, & rétablirent le Château de Cefarée, pendant que de l'autre côté les Templiers & les Teutoniques bâtirent, ou pour mieux dire, rétablirent fur une hauteur voisine, une fortereffe qu'on appelloit le Château des pelerins. Ces deux Places couvroient celle de faint Jean d'Acre, & fervoit en même tems à étendre les contributions fur les terres qu'occupoient alors les Infideles.

Après cette expedition, le Roi, le Duc d'Au

triche,

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triche, les deux Grands Maîtres, & le Maître des GUERIN Teutoniques retournerent à S. Jean d'Acre, où ils MONTAIGU virent arriver prefque en même tems une flotte confiderable d'Allemands, de Frifons & de Hollandois commandez par Guillaume I. Comte de Hollande, dont le fecours remplaçoit heureusement celui qu'on venoit de perdre par le départ précipité du Roi de Hongrie.

Le Roi de Jerusalem fe voyant foutenu par ces Croisez, & ayant appris qu'on préparoit encore une nouvelle armée dans la plupart des ports d'Italie résolut de porter la guerre dans l'Egypte pour obliger les Infideles à abandonner la Palestine; & dans un grand Confeil où fe trouva le Roi, le Duc d'Autriche, les Grands Maîtres & les Evêques, on convint de faire le fiege de Damiette, la Place de ce Royaume le plus régulierement fortifiée. Cette réfolution étant prife on embarqua les troupes vers la fin de Mai; on mit à la voile, l'armée chrétienne en trois jours fe trouva en Egypte, & fit la descente fans oppofition dans un endroit fitué à 1Occident de Damiette, & qui n'en étoit séparé que par un bras du Nil.

Les Chrétiens ne trouverent d'abord de réfi 1218. stance que dans une groffe tour ou un château. revêtu de toutes les fortifications que l'art avoit pû inventer, conftruit au milieu de ce bras du Nil, & dont la garnifon fe défendit avec beaucoup de courage. Mon deffein n'est pas d'entrer dans le détail de tout ce qui se passa à l'attaque de cet ouvrage avancé qui couvroit la ville de Damiette je me contenterai d'observer après Ma-

DE

GUERIN thieu Paris que les Chevaliers de S. Jean y fou-
MONTAIGU tinrent leur réputation ordinaire. Ces Religieux

guerriers, après avoir attaché deux vaisseaux en-
femble pour les rendre plus fermes, s'avancent
fierement, appuyent leurs échelles d'une main
hardie, montent au travers des feux, des dards &
des pierres; & fans s'étonner de la chûte de leurs
compagnons, ils tâchent de gagner le haut de la
muraille. Mais le mât d'un de ces vaiffeaux s'étant
rompu, brifa les échelles, & la plupart des Che-
valiers tombant dans l'eau, & accablez du poids
de leurs armes, furent
* La perte
de ces
braves foldats ne ralentit point le courage de leurs
confreres & des Croisez; on revint à l'escalade
plufieurs fois; mais toujours fans fuccès. Enfin les
Allemands approcherent des murailles une ma-
chine d'une nouvelle invention, à la faveur de la-
quelle ils fe rendirent maîtres de cette tour, dont
la prise facilitoit l'attaque de la ville.

noyez.

On prétend que le Sultan qui prévoyoit que la perte de cet ouvrage avancé entraîneroit celle de Damiette, en mourut de chagrin. Les Hiftoriens latins nomment ce Sultan Safadin, & les Arabes Melic-el-adel - Aboubecre fils de Job: il avoit quinze fils, & quelque tems avant fa mort, il avoit partagé fes Etats entre les fix premiers. Melic - elCamel l'aîné de tous eut l'Egypte, & Coradin la Syrie: Haran ville de la Méfopotamie fut le partage d'Achrof; & Boftra en Arabie, celui de Salech-Ifmael: les deux fuivans eurent auffi quel

*Hofpitalariorum, proh dolor! fcala confracta, fimili modo cum malo cecidit, & milites ftrenuos, & alios armatos in Nilum demerfit. Matt. Paris ad ann. 1218. 10m. 2. p. 301. ''

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ques Places pour leur appanage. Les neuf autres GUERIN refterent dans les Etats, & fous la puiffance de MONTAIGU leurs freres aînez; & pour leur aider à fubfifter, Safadin en avoit établi deux dans Jerufalem, ils jouissoient du tribut que les Chrétiens d'Occident payoient à la porte de cette ville. Deux autres faifoient la même fonction à la Mecque, & jouiffoient pareillement des revenus que produifoient les offrandes des Pelerins Mahometans, qui y venoient en foule de l'Afie & de l'Afrique. A l'égard des cinq derniers, apparemment qu'on leur avoit affigné quelques penfions conformes à leur naiffance, & au rang qu'ils tenoient dans l'Etat.

Cependant les Chevaliers continuoient le fiége de Damiette avec beaucoup d'ardeur, & ils reçurent en ce tems-là de nouveaux fecours de l'Occident. Une Croisade compofée d'Italiens, de François, d'Allemands & d'Anglois arriva en Egypte, & fe rendit au camp. Le Pape avoit mis à la tête de cette armée en qualité de Légat du S. Siege, le Cardinal d'Albano, Prélat fier & hautain, plein de présomption, & qui vouloit que fon avis l'emportât toujours dans le Confeil de guerre, fur le fentiment même du Roi & de fes Généraux, comme si le Pape avec les Bulles de fa légation avoit pû donner à un Cardinal la capacité d'un Grand Capitaine. Le Sultan d'Egypte appella de fon côté à fon fecours le Sultan de Syrie fon frere, Prince qui aimoit la guerre, & qui la faifoit heureusement; mais cruel, fanguinaire, & celui des enfans de Safadin qui lui reffembloit le plus, autant par fes vices que par fa valeur.

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