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avoit fuppofé faux, feroit tel qu'on l'avoit supposé. Dans le fecond cas, où l'on arriveroit par fequences toujours évidentes à une propofition évidemment fauffe, il eft vifible que ce que l'on avoit fuppofé être vrai, fe trouve faux.

La connoiffance qu'on vient de donner des démarches que fait notre efprit dans la recherche de toutes les veritez, tant les plus fimples que les plus compolées, fervira à faire comprendre aux Commençans les Regles de la Methode que l'on obferve exactement dans les Mathematiques, & à leur faire voir clairement que ces Regles conduisent les démarches de l'efprit infailliblement à la verité.

- Regles fur les perceptions. 1. On ne doit former aucun jugement, ni aucun raisonnement fur les objets de Les applications, que l'on n'ait auparavant des perceptions claires & diftinctes de ces objets, des rapports de ces objets, & des déductions par lefquelles on les tire les uns des autres, c'est à dire, des fuites & des dépendances neceffaires qu'ont ces rapports les uns des autres : Et l'on doit toujours conferver l'évidence dans toutes les démarches de l'efprit en la recherche de la verité.

2. Comme l'évidence dans nos perceptions eft abfolument neceffaire pour découvrir la verité, on doit être exact à pratiquer les moyens qui procurent cette évidence. Le premier eft d'apporter toute l'attention dont nous fommes capables aux objets de nos applications, & de ne point nous laffer de les confiderer jufqu'à ce que nous ayons clairement & diftinctement connu tout ce qu'ils contiennent, ou du moins ce qui nous paroîtra necessaire pour

la refolution de la queftion qui eft le fujet de notre application. Le fecond eft de nous rendre fi familiere la perception claire & diftincte des objets en nous y appliquant plufieurs fois, que nous n'y puiffions plus penfer qu'ils ne fe prefentent à notre ef prit avec une entiere évidence. ( Ce moyen eft plus important qu'on ne le pense ordinairement.) Le troifiéme eft que, puisqu'on doit diftinguer les objets que nous avons apperçus clairement par des marques, ou des fignes, ou des paroles qui leur foient tellement liées, que ces marques ne puiffent se prefenter que les objets ne fe prefentent en même temps fous une vue claire & diftincte; il faut par des définitions, donner des noms à tous les objets que nous avons apperçus clairement & diftinctement; c'est à dire, il faut attacher ces objets à des noms qui en réveillent les idées claires & diftinctes, & il faut bien prendre garde de ne se servir que de noms qui soient attachez, ou par l'usage, ou par des définitions de nom, à fignifier des objets dont on a des idées claires & diftinctes; car on tomberoit dans l'erreur fi l'on fe fervoit de mots équivoques, c'eft à dire qui réveillent plufieurs idées differentes, & qui peuvent être pris tantôt en un fens, & tantôt en un autre; ou de mots qui excitent des idées obfcures, c'est à dire qui n'ont pas de fignification claire & diftincte..

Regles fur les propofitions. 1. On doit admettre pour vrayes, fans preuve, les propofitions qui expriment des rapports que l'on voit clairement & diftinctement, comme celles-ci. Le tout eft plus grand qu'u ne de fes parties: Un tout est égal à toutes fes parties

prises ensemble: Deux grandeurs égales à une troifiéme sont égales entr'elles; & les autres semblables qui expriment des rapports qu'on apperçoit avec une entiere évidence. Ces fortes de propofitions s'appellent des axiomes. 2. Toute propofition qui exprime un rapport qu'on n'apperçoit pas avec évidence, ne doit pas être admife qu'on ne l'ait auparavant démontrée, c'est à dire, qu'on n'ait fait voir évidemment qu'elle fe déduit necessairement d'autres propofitions évidentes.

Regles fur les raifonnemens. Il y a deux choses à confiderer dans les raifonnemens; les propofitions qui précedent les confequences d'où font tirées ces confequences; la déduction des confequences des propofitions qui les précedent. 1. Regle. On ne doit mettre parmi les propofitions dont on tire les confequences, que des propofitions qui foient dans la derniere évidence, ou par elles-mêmes,(c'est à dire qu'étant fimples, il fuffife de les confiderer avec attention pour en voir clairement la verité;) ou parcequ'elles ont déja été démontrées, & qu'elles font devenues évidentes par la déduction neceffaire qu'on en a faite d'autres propofitions évidentes. 2. Regle. Il faut qu'on voye clairement en déduifant les propofitions les unes des autres, que celles qui font déduites font des fuites neceffaires des propofitions dont elles font déduites.

On n'admet dans les Mathematiques aucunes preuves qui ne foient conformes à ces deux Regles, & c'est à ces feules preuves qu'on donne le nom de Démonftrations.

Quand on fait la recherche de veritez fort com

pofées, ou d'un grand nombre de veritez qui dépendent les unes des autres, & qu'il faut pour les découvrir beaucoup de perceptions, de jugemens & de raisonnemens; il faut mettre bien de l'ordre entre toutes ces démarches de l'efprit, & employer la Methode fynthetique, ou la Methode analytique, ou mêler l'une avec l'autre. Voici

Les Regles communes à ces deux Methodes. 1. Il faut partager le fujet de fon application en toutes les parties qu'il peut avoir, en faifant des divisions exactes qui comprennent tout le fujet. Il faut enfuite examiner avec attention toutes ces parties une à une, en commençant par les plus fimples, & allant felon l'ordre naturel aux plus compofées, en mettant même de l'ordre parmi celles qu'il paroît indifferent d'examiner les unes plutôt que les autres; & ne point paffer des unes aux autres, qu'on n'ait reconnu diftinctement celles que l'on quitte pour s'appliquer aux fuivantes, & fans fe les être rendues très familieres : Il faut retrancher après cela toutes les chofes qu'on verra clairement être inutiles à découvrir la verité qu'on cherche. 2. Dans. toute la longue fuite des propofitions & des raisonnemens qui font découvrir une verité compofée, on doit voir clairement la verité de chacune des propofitions en particulier, & que toutes les déductions que l'on fait de ces veritez, les tirant les unes des autres, font necessaires.

La Regle particuliere à la Methode fynthetique, eft qu'il faut toujours commencer par les chofes les plus fimples & les plus connues, & n'établir pour principes dont on doit fe fervir dans fes raifonnemens, que

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des propofitions entierement évidentes. Il faut enfuite aller fuivant l'ordre naturel des chofes les plus fimples aux plus compofées fans faire de saut, à dire, il faut en allant des premiers principes aux dernieres veritez, passer par toutes les veritez qui font comme les milieux, chacun en fon rang naturel, entre les premiers principes & les dernieres veritez, fans obmettre aucun de ces milieux; & conferver toujours l'évidence dans tout le paffage.

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Les Regles particulieres à la Methode analytique, font, la 1, qu'il faut concevoir clairement & diftinctement l'état de la queftion qu'on veut resoudre, c'est à dire, qu'il faut avoir des idées distinctes des termes de la question, afin de pouvoir les comparer, & découvrir le rapport que l'on cherche; & ne pas perdre de vue l'état de la question dans toutes les démarches que fait l'efprit pour la refoudre, afin de n'en pas faire d'inutiles.

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Dans chaque queftion ou Problême, il y a toujours trois chofes à diftinguer; 1. des grande urs inconnues qu'on cherche à découvrir; 2°. des grandeurs connues, & 3°. des rapports connus entre les grandeurs connues & les inconnues ; & ces rapports font les conditions de la queftion qui la déterrninent. Il eft ordinairement facile de diftinguer, comme le preferit la premiere Regle, les grandeurs. connues & les inconnues de la queftion; mais il y a bien des questions où l'on ne voit pas d'abord les rapports déterminez entre les grandeurs connues & les inconnues qu'on cherche, qui sont necessaires pour refoudre la question, & qui la déterminent; & c'eft fouvent la difficulté de trouver ces.

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