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un enfant en mille occafions; foible, CHAP. V., découragé, abbattu: fans parler de fes vices & de fes paffions, qui le deshonorent & l'aviliffent, & qui le rendent quelquefois inférieur aux bêtes, dont il eft plus voifin que de l'homme par fes indignes inclina

tions.

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2. Quand il rentre en lui-même mais fans avoir d'autre lumiere que ce qui lui eft refté de raifon après le péché, il ne peut démêler cet amas confus de fentimens fi vifs & fi oppofés. Il ne connoit ni leur princini leur ufage. Il ne fçait s'ils lui font également naturels, & s'il peut également les fuivre. Il doute quel quefois de fa grandeur, & quelque fois de fa baffeffe; & après bien des réfléxions, il fe livre fucceffivement à des mouvemens contraires, dont les uns flattent fa vanité, & les autres fon inclination pour la molleffe & pour le plaifir.

3. Car tout le fruit qu'il tire de ce qui lui refte de grandeur, eft de s'élever: & celui qu'il tire de la connoiffance de fa baffeffe, elt d'en juftifier les penchans, ou de s'y livrer par

CHAP. V. découragement & par parelle. Il n'é vite ainfi l'orgueil que par le défefpoir; comme il n'évite le défespoir que par la vanité. Il y a des tems où il oublie fa mifere, & y retombe en l'oubliant, puifqu'elle eft réelle & fans remede: & il y en a d'autres, où il oublie fa grandeur, ses réfolu. tions, fa philofophie, & où il fait voir que fa philofophie & fes réfolu tiqns n'étoient qu'une vaine enflure, & un abus de la grandeur, & non un moyen de la rendre parfaite.

4. Il feroit très- dangereux de lui montrer combien il eft devenu égal aux bêtes par fes vices & par fa baffeffe, fans lui montrer fa grandeur. Il feroit dangereux auffi de lui faire voir trop fa grandeur fans sa baffeffe. Mais il eft encore plus dangereux de lui laiffer ignorer l'une & l'autre : & rien n'eft plus néceffaire ni plus avantageux pour lui, que de lui repréfenter l'une & l'autre, leurs diffé rentes caufes, & ce qui peut concilier de fi grandes contrarietés. Mais qui lui rendra ce service? & qui fera affez inftruit de fa grandeur & de fa baffeffe, de la dignité & de sa misere,

pour

pour ne les pas confondre, & pour CHAP. V. ne pas obfcurcir l'une par

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l'autre ?

Les philofophes, & même les Juifs, qui ignoroient le myftere de JESUS-CHRIST, & qui n'étoient enfans que de la fynagogue, ne don-noient point à l'homme des idées proportionnées aux deux états qui font unis en lui. Les Stoïciens qui s'étoient fait une idole de leur fageffe chimérique, & les Pharifiens qui ne connoiffoient qu'une vertu faftueufe, infpiroient à l'homme des fentimens d'une grandeur pure: & ce n'eft pas fon état. Les Epicuriens qui avoient dégradé l'homme en le réduifant à la matiere; & les Saducéens, qui nioient comme eux l'exiftence des efprits & l'immortalité de: Pame, infpiroient à l'homme des fentimens de baffeffe pure: & c'eft auffi peu fon état. Il falloit lui infpirer des : fentimens de grandeur, mais d'une grandeur réelle:& non fastueuse, • qui vinffent de la grace, & non de la préfomption de fa juftice & de fon mérite, Il falloit lui infpirer des fentimens de baffeffe, non d'une baffeffe: de nature, mais de pénitence; non Partie I

K

CHAP. V.

pour y demeurer, mais pour aller par l'aveu de cette baffeffe à une véritable grandeur. Mais encore un coup, qui étoit capable entre les hommes de difcerner des choses fi voifines,& en même-tems fi éloignées? fi voifines, puifque l'état de l'homme les réunit ; & fi éloignées, puifqu'el les appartiennent par leur nature à des états totalement différens.

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6. Un tel difcernement n'a point été fait avant JESUS-CHRIST, ou indépendamment de JESUS CHRIST. L'homme ne s'eft point connu, & pu fe connoître avant lui. Il s'eit ou trop élevé, ou trop abbaiffé. Ses maîtres l'ont toujours trompé, ou en flattant un orgueil qu'il falloit abbattre, ou en ajoutant à une baffeffe qu'il falloit relever. Tous ceux qui font venus avant l'auteur de la grandeur de l'homme, & le réparateur de fa baffeffe, ont aigri fes maux, au lieu de les guérir. Ils l'ont égorgé,, au lieu de lui rendre la vie. Et comme ils avoient ufurpé la qualité de maîtres, qui ne leur convenoit pas, n'étant que des féducteurs ; ils n'ont emploié que des poifons au lieu de

CHAP, V

Jean. 10.8.

remede. Omnes quotquot venerunt, fures funt & latrones. Tous ceux qui n'ont pas annoncé JESUS-CHRIST crucifié, tous fans diftinction, foit Juifs, foit gentils, ont ufurpé la place du pafteur & du fauveur des brebis. Aucun n'a connu le caractere des brebis, qui ne font ni juftes par elles-mêmes, ni incapables de le devenir. Aucun n'a travaillé à les: rendre humbles, ni à les remplir d'une utile confiance. Aucun en un mot ne leur a parlé un langage femblable à celui de JESUS-CHRIST. Et auffi aucune brebis digne de ce nom ne les a écoutés. Et non audierunt eos:

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oves.

S. II.

JESUS-CHRIST crucifié decouvre ce double état de gran deur & de baffeffe aux plus fimples fidéles, mais fans les enfler,& fans les décourager.

1. MAIS depuis JESUS-CHRIST), & fur-tout depuis qu'il eft mort pour nous fur la croix, laquelle de fes plus: foibles & plus fimples brebis ne fçait

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