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CHAPITRE VII. JESUS-CHRIST crucifié eft la plus grande preuve de l'amour que Dicu a pour nous, & le motif le plus preffant pour nous porter à l'aimer.

ARTICLE PREMIER.

JESUS-CHRIST crucifié eft la plus grande preuve de l'amour que Dieu a pour nous.

§. I.

Il y a prefque dans tous les hommes un fond d'incrédulité & d'hésitation, qui les fait douter fi Dieu les aime, & qui les empêche eux-mêmes de l'aimer; en quoi pourtant confifte toute la Religion.

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Ly a une fi prodigieuse inégalité entre Dieu & l'homme, une fi grande difproportion entre nos idées & les fentimens de Dieu à no

tre égard, que les perfonnes qui CHAP. VII. connoiffent peu la religion, & qui n'y font pas affez affermies, ne sçauroient fe perfuader que Dieu nous aime affez pour vouloir être aimé de nous. Il eft, difent-elles, la plénitude même, la félicité même, le bien effentiel & infini. De quelle utilité lui fommes-nous? Que pouvons-nous ajouter à fon bonheur? En quoi, & fous quels rapports ferions-nous l'objet de fon amour? Sa fainteté met encore plus de différence entre lui & nous, que fes autres attributs. Nous fommes injuftes, & conçus dans l'injuftice. Qu'y a t-il d'aima ble en nous ? Qui d'entre les hommes nous aimeroit, fi nous en étions bien connus? Avec toute l'inclination que nous avons à nous cacher tous nos défauts, ou à les excufer, nous nous fommes infupportables à nous-mêmes. Et que fommes-nous donc aux yeux de Dieu ?

2. D'autres vont plus loin; &; comme ils ont obfcurci par des paffions l'idée de leur premiere grandeur, dont ils ne confervent que des reftes fans en connoître l'ufage, ils

de

CHAP. VII. fe méprifent à l'éxcès, & ils ne peuvent croire que Dieu, s'il penfe à eux, puiffe faire autre chofe que les méprifer. Comme ils ne l'aiment point, ils ne fçauroient fe perfuader qu'ils en foient aimés, ni qu'il foit attentif à la difpofition de leur cœur. Les bienfaits dont ils font comblés, les richeffes de la nature, le fpetacle de l'univers, la ftructure admirable des organes de leur corps, les foins généraux & particuliers de la providence, ne leur paroiffent que les fuites d'un ordre une fois établi, & qui marquent feulement en Dieu un foin général de fes créatures, & une bonté femblable à celle des princes qui gouvernent avec fageffe leurs états, mais qui ne defcendent point jufqu'à aimer leurs fujets, ni à s'attacher à aucun d'eux en particulier.

3.

Ces racines fecrettes d'incrédulité qui ont infecté tous les hommes, & qui prefque jamais ne font entierement arrachées du cœur des fidéles, rendent la foi plus lente & plus engourdie. Elles arrêtent l'activité de l'efpérance, & elles font un venin préfent contre la charité, qui tire fa

force

force & fa vie de la perfuafion que CHAP. VII. Dieu nous aime, & qu'il veut être aimé de nous. Car il n'eft plus poffible d'aimer, fi l'on fe croit rejetté, fi l'on aime fans fruit & fans espérance, fi l'on aime fans avoir la confolation de plaire par cet amour. On peut admirer la grandeur de Dieu, le louer de fes dons, lui rendre graces de fes foins: mais on ne l'adorera point comme Dieu, qu'en l'adorant comme fouverain bien; & l'on ne l'adorera point parfaitement fous ce rapport, qu'en l'aimant, qu'en lui foumettant toute fa volonté, qu'en tournant vers lui tous fes defirs. Ainfi tout le fond de la piété & de la religion dépend de l'amour, & l'amour luimême dépend abfolument d'une vive perfuafion de celui que Dieu a pour nous. Il faut donc avant tout pofer cet immobile fondement : autrement il n'y a point d'édifice, ou l'édifice périt.

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Si l'homme avoit eu le choix des prodiges pour le convaincre de l'amour que Dieu a pour lui, il n'auroit jamais pensé à lui demander l'incarnation de fon propre Fils, encore moins fa mort au milieu des douleurs & des ignominies; & cela pour épargner des efclaves rebelles.

1. S'IL étoit question de prouver la religion à un infidéle, qui ne crût ni l'incarnation du Fils de Dieu, ni fa mort, il faudroit le conduire à la croiance de nos myfteres par une liaifon de principes & de vérités qui l'y prépareroient. Mais on fuppofe une for pleine & entiere des myfteres de la religion chrétienne dans tous ceux qu'on a en vûre, & l'on ne pense qu'à la rendre plus agiffante & plus vive, afin de les rendre eux-mêmes plus reconnoiffans.

2. Qu'ils fe diffimulent donc un moment ce qu'ils croient, & qu'ils fe tranfportent en efprit jufqu'au tems

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