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HAP. IV. firmité humaine, & que la grace de JESUS-CHRIST, quoique trèspuiffante, ne change pas entierement la nature des vafes de terre où elle habite, ils ne défefperent pas d'ar river par dégrés à une femblable vertu; & en apprenant que la force des plus forts vient de Dieu feul, & non pas d'eux, ils s'occupent moins de leur foibleffe, dont le remede eft entre les mains de Dieu, qui écoute les prieres des humbles.

4. Mais ces mêmes vérités qui con folent les foibles, apprennent à ceux qui font forts combien ils doivent Trembler en confiderant combien ils font fragiles par eux-mêmes, & avec quelle attention ils doivent demander l'infpiration continuelle & per févérante d'une force qui leur eft cou jours étrangere, lors même qu'ils en font remplis, parce qu'ils n'en font pas le principe. Ils doivent toujours fe fouvenir de faint Pierre, plein d'ardeur & de zéle, mais qui eft trompe par la préfence d'un fentiment qui lui cache fa foibleffe, qui s'endort au lieu de veiller & de prier avec JESU'S CHRIST, & qui s'expofe à laten

tation

tation fans s'y être préparé par au- CHAP. IV. cun des moyens légitimes. C'eft fur l'exemple de JESUS-CHRIST qui eft la force même, qu'ils doiventfe regler, s'humilier & fe profterner avec lui; demander avec lui que le calice paffe; l'accepter quand la néceffité les y contraint; fouffrir en filence tout ce qui leur arrive; prier fans celle, & même avec larmes,

afin que la perfevérance leur foit accordée; & fe bien perfuader qu'ils ne conferveront la grace de JESUSCHRIST que par des moyens femblables à ceux qu'il a emploiés pour la leur mériter: n'étant pas jufte que ce qui a été le prix de fon fang, de fes opprobres, & de fes inftantes prieres, foit accordé à des perfonnes qui fe contentent de la justice de leur caufe, & de la gloire de fouffrir pour elle, fans travailler à fe conferver cet honneur par une humilité, un filence, une priere, qui aient quelque conformité avec les difpofitions de

JESUS-CHRIST.

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CHAP. IV.

S. VI.

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La force que JESUS CHRIST
communique à ceux qui fouf-
frent pour lui, éleve l'ame au-
deffus de toutes les paffions ca-
pables de l'affaiblir. Elle la
prépare aux plus grands com
bats par le mépris des délices,
du repos,
des espérances du
fiecle; par l'amour de la pau-
vreté, de l'obscurité, de la
priere; & par le détachement
de tout ce qu'on aimoit légiti

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mement.

1. CAR il ne faut pas s'imaginer que la force qu'il cornmunique à ceux qui fouffrent pour lui, foit femblable à une force corporelle & extérieure, qui agiffe indépendamment des difpofitions fecrettes du cœur. 'Cette force, eft une force fpirituelle, qui guérit l'ame, qui l'éleve au deffus des paffions capables de l'amollir, qui l'attache à fes devoirs d'une maniere ferme & conftante.

Cette force eft celle de la charité, CHAP. IV.
c'eft-à-dire, de l'amour de la juftice
& de la fainteté, qui furmonte les
douleurs, après avoir vaincu la vo-
lupté; & qui fe rend maîtresse de la
crainte & du fentiment des maux les
plus preffans, après avoir triomphe
de tous les defirs & de tous les at
traits de la cupidité.

,

2. La premiere victoire n'eft pas celle qu'on remporte par la patience, & le premier ennemi qu'on a à combattre, n'eft pas la douleur, Il faut fe préparer à ce combat par la haine des délices; par l'amour de la pauvreté par une vie humble & cachée autant qu'il eft poffible dans une falutaire obfcurité; par la fuite du fiecle; par le mépris de fa fauffe gloire & de fes vaines promeffes; par la miféricorde envers les pauvres; par une vie férieufe, remplie de devoirs & de faintes actions; par une priere affidue & fervente. C'eft par où il faut commencer. Ipfa funt pri- s.Aug. ferm? ma acies debellande. Primò vincende 335.

funt delectationes, & poftea dolores. Car on fera toujours foible, fi l'on aime quelque chofe que le monde puiffe

CHAP. IV. nous ôter. On le craindra toujours, fi l'on en efpere quelque chofe. On cédera enfin à fes perfécutions, fi l'on n'eft pas au-deffus de fes promeffes, & de fes manieres féduifantes & flaIbid. teufes. Quomodo poteft fuperare mundum favientem, qui non poteft fuperare blandientem? Qui non contemnit quod pollicetur, quomodo fuperare poteft quod

minatur?

3. Il n'eft pas néceffaire qu'on tienne à beaucoup de chofes, ni qu'on ait de grandes efpérances, pour être affoibli dans une occafion importante & décifive. Il fuffit qu'on s'aime foi-même, qu'on aime fon repos, fa liberté, fon obfcurité même, où l'on eft tranquille, & où l'on efpéroit d'être à l'abri. Il fuffit de tenir à la vie, à fa fanté, à fes livres, à fes amis, à fon emploi, fouvent jufte & néceffaire. Il fuffit de defirer de ne pas déplaire & de n'être pas défaprouvé de vouloir conferver la paix avec tout le monde, de craindre d'être fingulier; & de s'engager dans un combat, dont la durée & la fin font incertaines. Il fuffit de retenir dans fon cœur quelque attache

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