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quemment il ne peut prefcrire ce que celui dont il auroit hérité, auroit ufurpé. Cùm heres in jus omne defuncti fuccedit, ignoratione fud defuncti vitia non excludit, veluti cùm fciens alienum illum, illo vel precario poffedit: quamvis enim precarium heredem ignorantem non teneat nec interdicto rectè conveniatur : tamen ufu capere non poterit quod defunctus non potuit. Idem juris eft, cùm de longa poffeffione quarirur: neque enim rectè defenditur, cùm exordium ei bona fidei ratio non tueatur ($).

Il n'en eft pas de même des légataires ni des donataires particu liers, parcequ'ils ne fuccedent pas à tous les biens des donateurs, ni des teftateurs; & comme ils ne font pas en tous leurs droits, ils ne font point tenus de toutes leurs charges; enforte que s'ils ont reçu de bonne foi tout ce qui leur a été donné ou légué, quoique le donateur ou le teftateur fuffent dans une poffeffion de mauvaise foi, ils ne laifferoient pas de pouvoir prefcrire, s'ils poffédoient paifiblement pendant le tems fixé par la loi pour opérer la prefcription (*).

Enforte qu'en général, comme celui qui entre en poffeffion d'une chofe qu'il acquiert d'un autre, fuccede aux mêmes droits & ne poffede ni plus ni moins que fon auteur avoit poffédé ("): si un droit de fervitude paffe d'un propriétaire à un autre, le tems de la prescription qui avoit couru contre le premier, fe joint au tems qui aura couru contre le fecond, de maniere que la prescription s'acquiert contre lui par les deux tems joints (*); de même auffi un fecond poffeffeur acquiert une fervitude par la poffeffion de fon auteur, jointe à la fienne. De forte que fi un poffeffeur vient à mourir avant d'avoir acquis la prescription, & que fon héritier demeure en poffeffion, on raffemble le tems de la poffeffion de l'un & de l'autre, & la prescription eft acquise à l'héritier après que Ia poffeffion de fon auteur & la fienne jointes enfemble, ont duré le tems réglé pour prefcrire.

Il en eft de même de la poffeffion de l'acheteur jointe à celle du vendeur à qui il fuccede; du donataire au donateur, du légataire & du teftateur, & ainfi de tous autres qui poffedent fucceffivement, ayant droit de tous autres (Y).

(s) ff. Lib. 44. tit. 3. leg. 11. diverf. temp. prefer. de ufurp. & ufucap. 1. 4. §. 15. Cod. leg. 11. de acquir. & retin. poffeff. (t) Domat, Loix Civiles, tom. 1. liv. 3. tit. 7. fect. 4. nomb. 19.

(") ff. De acquir. rer. dom. leg. 20.

(*) ff. Quemad. ferv. amitt. 1, 18. §. 1.
(") ff. De divif. temp. præfcr. leg. 14. §.1,
Pro emptore, leg. 2. §. 20.

De contrah. empt. leg. 76. §. 1.

De acquir, vel amiu, possess. leg. 13. S.

La poffeffion ne fe continue pas feulement entre deux poffeffeurs dont l'un a le droit de l'autre, mais il peut arriver que la prefcription foit acquise à un poffeffeur, en joignant à fa poffeffion, celle 'd'une autre perfonne de qui il ne tient pas fon droit; par exemple, fi un héritier poffede pendant quelque tems une chofe léguée à une autre perfonne, avant de lui en faire la délivrance, foit qu'on attende l'évenement d'une condition du legs dû, ou par un fimple retardement; le tems de cette poffeffion fervira pour la prescription à ce légataire, quoique ce dernier ne tienne pas fon droit de l'héritier (*), parceque la poffeffion de l'héritier qui repréfente le teftateur, eft considérée comme fi c'étoit le teftateur même qui eût poffédé; ainsi dans les cas femblables, c'eft par l'équité, & felon les circonftances, qu'il faut juger fi les poffeffions de diverses perfonnes peuvent être jointės (2); car outre ce que j'ai dit ci-dessus relativement à la bonne & mauvaise foi, il faut encore obferver que les poffeffions de ceux qui fe fuccedent l'un à l'autre, ne fe joignent que dans le cas où elles fe fuivent fans interruption : car s'il y a quelqu'intervalle d'une autre poffeffion d'un tiers (b), qui ait interrompu ces poffeffions, celles qui auroient précédé cette interruption, feroient inutiles au dernier poffeffeur; car la prefcription ne s'acquiere que par une poffeffion continue, & qui foit paisible pendant. tout le tems réglé pour prescrire (©).

Ainfi, comme la poffeffion jointe à la bonne foi, fuffit pour pref crire les chofes prefcriptibles, & qu'elle tient lieu de titre quoiqu'on n'en ait point d'autre (d): le poffeffeur qui a prefcrit, foit qu'il ignore la caufe de fa poffeffion, ou qu'ayant un titre il ne puiffe pas en juftifier (), fera maintenu contre l'ancien propriétaire quì juftifie d'un titre; de même que le débiteur qui prefcrit la dette, pas befoin de quittance pour être déchargé de la demande de

n'a

(2) ff. De acquir. vel amitt. possess. 1. 13.

S. 10.

(*) ff. De diverf. temp. prafcript. leg. 14. (b) Il faut entendre une poffeffion légitime, & qui ne dérive pas d'une ufurpation, ni d'un trouble fans fondement, car dans ce

de 30. ans, comme l'Auvergne qui ne demande point de titre : avec celle des Provinces où l'on diftingue, fuivant le Droit celle de 10. & 20. ans, qui fuppofe un titre. Romain, cette prescription de 30. an's d'avec (e) Il faut remarquer qu'on n'entend pas

cas une pareille poffeffion ne pourroit pré-parler du poffeffeur qui n'auroit jamais eu judicier. ff. De acquir. vel amitt. poffeff. leg. 17.

(c) ff. De diverf. temp. prefer. leg. 15. S. I.

(d) Ceci doit s'entendre de maniere qu'on ne confonde pas la Jurifprudence des Provinces qui n'admettent qu'une prescription

poffeffion de bonne foi, qui n'ait été précétitre; parceque l'on ne peut fuppofer une dée de quelque titre, c'eft-à-dire, qui n'ait eu quelque jufte fondement dans fon origine, ou du moins une caufe légitime qui lui donne le droit de pofféder, & qu'il faut toujours fuppofer, quoiqu'il n'en refte point d'acte ni de veftige,

fon créancier; car la prescription anéantit les titres du propriétaire & des créanciers qui doivent s'imputer d'avoir négligé leurs droits pendant un fi long-tems (f).

Enfin, en finiffant les obfervations fur la prescription, il convient de remarquer qu'on peut prefcrire, non-feulement en poffédant par foi-même, mais encore en poffédant par d'autres, comme par un fermier, un locataire, un dépofitaire, un ufufruitier, un tuteur, un curateur, ou un procureur (8).

C'est d'après cette idée générale des prescriptions, qu'il faut examiner leur effet relativement aux fervitudes.

En général, c'eft par le laps de 30 années de poffeffion que l'on peut acquérir les fervitudes par la prescription dans les provinces où elle eft admife (h); mais dans quelque lieu que ce foit, il faut que celui qui invoque la prefcription pour acquérir la fervitude, en ait joui pro fuo, non jure familiaritatis, fed jure fervitutis continuellement, fans interruption, & non à titre de précaire (i): car celui qui fe trouveroit dans l'un de ces cas, & qui auroit passé pendant 30. ans par un chemin, ne pourroit pas dire qu'il y feroit entré avec intention de pofféder, quoiqu'il eût paffé réellement & corporellement fur le fonds (*).

Auffi celui qui a paffé par un chemin, penfant qu'il fût public ou qu'il ne lui appartînt pas, ne peut fe fervir utilement de cette poffeffion. Il en feroit de même fi fa poffeffion eût été secrette, & qu'il eût affecté de paffer à l'infçu du propriétaire (1).

Il est encore bon de fçavoir que non-feulement celui qui après contradiction ou prohibition, passe par un chemin, eft cenfé y paffer en fecret, mais encore que ce feroit la même chofe quand fes fermiers ou locataires y pafferoient croyant qu'il auroit ce droit (m). De même, fi quelqu'un de mes amis avoit paffé fur le fonds du yoifin pour aller fur celui qu'il croyoit lui appartenir, quoiqu'il fût

(f) Cod. de prefcript. trig. vel quadr. 1. 3. (5) Domat, Loix Civiles, tom. 1. tit.6. fect. 4. nomb. 19.

ff. Lib. 43. tit. 19. leg. 1. §. 7. & 4. (h) Dans les Coutumes qui admettent la prefcription en fait de fervitudes, il y en a qui n'exigent pas un fi fong délai; Metz, par exemple, ne demande que 20. ans, 20. jours.

(i) Servitutis ufus non videtur, nifi is qui fuo jure uti fe credidit: ideoque fi quis pro via publicá, vel pro alterius fervitute fus fit, nec interdictum, nec actio utiliter

competit. ff. Lib. 8. tit. 6. leg. 25.

Alexander, de fervit. p. 331.

Barraud, fur l'art. 272. de la Coutume de Poitou.

(*) Domat, Loix Civiles, tom. 1. liv. 3. tit. 7. fect. 5. art. 11.

(1) Code Henri IV. liv. 6. tit. 1. nomb. 276. & 27.

Bibliotheque du Droit François de Bouchel, tom. 3. lett. S.

Fromental, Décifions du Droit Civil verb. Servit. pag. 656.

() ft. Lib. 43. tit. 19. leg. 3. §. 1.

à moi, la jouiffance que mon ami auroit acquife, ne pourroit me fervir pour opposer la prescription (").

La poffeffion que l'on auroit auffi eue fur mon auteur,par force ou précairement, ne pourroit non plus faire courir la prescription, ni acquérir à celui qui oppoferoit cette poffeffion, un droit de fervitude contre moi (°).

Si Paul, fes enfans, fes amis, fes domeftiques ou fes fermiers avoient ufé du droit de fervitude fur autrui; en ce cas après le laps de tems néceffaire pour opérer la prescription, elle fe trouveroit acquife; mais fi un particulier qui auroit l'ufufruit du fonds de Paul avoit eu cette jouiffance, elle ne pourroit opérer la prescription (P).

Cependant, celui qui auroit acquis un champ au profit duquel fon vendeur auroit ufurpé un droit de paffage, pourroit joindre fa poffeffion à celle de fon vendeur, pour faire courir le tems de la prescription (9), pourvû toutefois qu'il ignorât l'ufurpation de fon vendeur (1).

Comme dans les Coutumes, & même en certains pays de Droit Ecrit, on fait une diftinction relativement à la prescription des fervitudes entre les abfens & les préfens, il eft bon d'observer qu'on regarde comme préfens, tous ceux qui font domiciliés dans les pays régis par la même Coutume ou Province; & comme abfens, ceux dont le domicile eft hors de la Province ou Coutume ($).

Or comme la bonne foi est requise pour pouvoir oppofer la prefcription, il eft certain que celui contre qui on veut ufer de cette voie, eft en droit de demander la preuve au contraire (1). Alors celui qui réclame,peut oppofer comme actes poffeffoires,les marques de la fervitude, telles par exemple, qu'un aquéduc, une ouverture de porte, une fenêtre, & autres chofes femblables qui établiroient que l'on n'a point usé de la fervitude par dol, fraude, furprise, violence, ni par droit de familiarité, mais publiquement, au vû & fçû du propriétaire de l'héritage affervi (")."

En fait de prescription immémoriale, ou prescription commen

(") ff. Lib. 43. tit. 19. leg. 1. §. 8.
(°) ff. Lib. 43. tit. 19. leg. 3. §. 2.
(P) ff. Lib. 43. tit. 19. leg. 3. §. 4.
Code Henri IV. liv. 3. tit. 2. nomb. 32.
(9) ff. De acquir. rer. dom. leg. 20.
f. Quemadmod. fervit. amitt. leg. 18. S.1.
(1) Cæpol. de fervit. cap. 20. num. 2.
(*) ff. Lib.50.tit.16.1.199. au princ. & S.1.
Cod. lib. 7. tit. 33. leg. 12.
Cout. de Calais, art, 108.
Melun, art. 171. -

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l'on

cée à die contradictionis, il n'eft pas néceffaire de prouver que n'a pas joui de la fervitude vi, clam, aut precariè, & celui qui prétendroit obliger à cette preuve, ne feroit pas écouté, parceque d'un côté la poffeffion immémoriale une fois admife, purge tous Ies défauts, & d'un autre, celle après contradiction ne peut être réputée fecrette ni précaire (*).

Je viens d'établir que pour fe fervir utilement de la prescription en fait de fervitude, il falloit que la jouiffance que l'on invoquoit, fût jure fervitutis, & non familiaritatis; mais ce qui pourroit faire de la difficulté, feroit de fçavoir comment on pourroit reconnoître & difcerner fi la poffeffion dérive d'une véritable fervitude, ou d'un pur ufage de familiarité. Pour en juger fainement, il convient de confidérer la nature & la qualité du fait, comme par exemple, lorfqu'un voifin paffe par l'héritage de fon voifin, pour abreuver fes beftiaux ou fes chevaux : il faut prendre garde fi cet héritage eft fitué proche un grand chemin, & fi ce n'a pas été dans la vue d'éviter un mauvais pas, que ce voifin a paffé par l'héritage de fon voifin; car dans cette efpece, toute préfomption de fervitude feroit exclufe par la nature & la qualité du fait. Auffi,le Grand fur l'art. 61. de la Coutume de Troyes, Glof. 2. verb. n'acquierent, foutient que c'est ainsi qu'on doit entendre la glofe fur la L. 1. §. 2. de fervit. & aq. Mais fi quelqu'un avoit paffé fouvent par l'héritage de fon voisin pour aller dans le fien fans contredit ni empêchement, alors probatâ frequentiâ, præfumitur quod jure fervitutis ufus eft: nam ex usu præfumitur animus poffidentis (Y).

Čependant comme la poffeffion de la fervitude ne prend pas fon commencement dès la premiere fois que l'on en a ufé, mais du tems que l'on en a fréquemment joui*; pour juger de la preuve, il faut bien prendre garde à ce que porte la dépofition des témoins: car ce ne feroit pas affez qu'ils foutinffent avoir vu Pierre paffer un certain jour par tel endroit, il faudroit encore qu'ils déclaraffent qu'en ce tems, Pierre paffoit ordinairement par-là. J

Il y a encore des circonftances dans lefquelles la mauvaise foi ne peut fe préfumer; par exemple, Pierre a acquis de Paul un champ, & dans le contrat de vente, Paul déclare qu'il eft dû à ce champ un droit de passage à travers celui de Louis. Or quand

(*) Capola, de fervit. urb. præd. cap. 161. tit. 4. glof. 2. nomb. 24.

19. nomb. 6.

Le Grand, fur l'art. 61. de la Cout. de 1. Troyes, glaf. 2. verb. n'acquierent.

* Faber, in §. aquæ inft. de act. & in leg. cod. de fervit. & aqua.

Le Grand, fur la Cout. de Troyes, art. (1) Le Grand fur la Cour. de Troyes, art. 161. tit. 4. glose 2, nomb, 25.

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