Et le préfent, & celui qui le donne.
En cas pareil nous faifons tous effort. Pour Vous, GRAND PRINCE, on n'en fçauroit trop faire ;
tel œuvre il faudroit un Homére. Moi qui de reins ne me fens affez fort, Bien mieux ferai de venir à l'histoire De vos Pâtez. Ils vinrent à bon port, Tous vingt & deux, fi j'ai bonne mémoire, Pas un ne fut perdu dans le Charroi; Malgré la crotte, & la pluye, & l'orage, Tout arriva fans déchet ni dommage, Tant prudemment fut conduit le Convoi. OR quand il vint terminer fa carriere Dans le College à qui LOUIS LE GRAND, Roi des François, & votre Augufte Pere, Donna fon Nom par grace finguliere,
Dieu fçait s'il fit du fracas en entrant. Parut alors le docte Abbé Boiffiere, Qui minutant quelque beau compliment, Beau pour le fûr, car d'autres n'en sçait faire, En Conducteur s'avança gravement. A fon afpect nous crûmes bonnement Qu'en qualité de Bibliothecaire
De VOTRE ALTESSE, il venoit de fa
Nous apporter Livres plein un brancart, Ou Manufcrits de Note non vulgaire : Vous euffiez yû nos Sçavans accourir ; Et tous voulant s'éclaircir de la chofe, Du Conducteur à l'envi s'enquerir,
Si c'étoit Grec ou Latin, Vers ou Profe? De quel volume? Et comme entre Sçavans, Sur tout cela les goûts font différents; le Grec opine,
pour l'Hébreu, tel pour
On s'échauffoit, & l'on difputoit fort, Quand le Convoi tirant vers la Cuifine, Mit fur ce point tous nos Sçavans d'accord. VERS eux alors le docte Abbé s'avance, Et d'un ton haut dit: Peres Reverends Point de débat, vous ferez tous contens Chacun de vous peut felon fa fcience Sur Livres tels exercer fes talens.
Tous font complets, & de bonne nature In folio, reliez à profit,
Dorez fur tranche, & fur la couverture Mieux n'auroit fait Boyer fans contredit. Point n'y verrez Livres de contrebande, N'en ayez peur; mais beaux & bons Journaux, Non de Leipfic, Angleterre ou Hollande,
Mais Journaux tels que l'on les fait à Seaux, Pour en juger doctement, SoN ALTESSE Aux Ecrivains de Trevoux les adreffe Feüilletez-les & direz avec nous,
Qu'ils font parfaits, & que
Ils valent bien ceux qu'on fait à Trevoux. QUAND l'Orateur eut exercé fa langue, En tels propos de chacun fort goûtez', On lui donna pour prix de fa harangue, Un des Journaux qu'il avoit apportez; A Tourneli grand Docteur de Sorbonne, Qui de Trevoux revife les Ecrits, Fut envoyé par difcrete perfonne Pareil Volume, & l'un des mieux fournis, Afin qu'il pût en dire fon Avis.
DE vingt & deux en bonne arithmetique, Qui deux retranche, il n'en refte que vingr C'étoit encore pour nous de la pratique, Pour partager le travail, il convint
Chercher fecours. D'abord au Grand la Chaize D'avis commun il en fut dépêchéi
Deux des plus beaux, pour les lire à fon aife; Bien que d'affaire il foit moult empêché.vvs no3⁄4 Point ne doutez qu'en homme prude & fage, Il n'ait trouvé du tems pour çet Ouvrage.
Il fuffifoit, PRIN CE, qu'il vînt de vous, Et l'on fçait bien, quelque foin qui le presse, Qu'il quitte tout pour fervir VOTRE ALTESSE, A fon exemple autant en faifons-nous
QUATRE pareils à la Manfe commune Furent livrez, ce qui vint bien à point, Car nos profès, gens tendres de pécune, De tels Journaux chez eux ne lifent point. Or encor bien, que par male fortune, L'âge à plusieurs affoiblissant les yeux, Leur ait rendu les paupieres moins nettes ; Soyez certain, PRINCE, que le plus vieux Les a pourtant fort bien lûs fans lunettes. POUR les petits Loyolas nouveaux-nez, Qui font à part leurs faintes caravanes, Sevrez du monde, & de tous foins profanes, Deux des Journaux ont été deftinez. Toute autre étude on fçait leur interdire ; Mais il eft bon, comme nous femble à tous, Qu'en ces Journaux dont nous fommes jaloux, Dès l'âge tendre ils apprennent à lire,
Jufques où va votre bonté pour nous.
DOUZE reftoient, douze pour le college; Deux tiers pour nous, un tiers pour les Préfets, C'est des aînez le droit & privilege ;
En maint païs un tiers pour les Cadets, Quelquefois rien, ou peu par avanture Mais nous avons trouvé la loi trop Ne voulant pas d'ailleurs très-prudemment, Que quand un jour on viendroit les femondre, De nous aider pour le remerciment, Comme autrefois ils pûffent nous répondre, Nefcio vos, qu'on venoit un peu tard, Leur demander, en leur faifant careffe, Vers bien tournez & polis avec art, Pour des Pâtez, ou mets de telle efpece, Dont ils n'auroient pourtant mangé le lard. APRE'S qu'ainfi l'on eut fait le partage, Convint vacquer aux aux huit pour nous reftez, Huit des plus beaux, fi les ai bien cottez; Les oublier eut été grand dommage, Et maint Sçavant les auroit regrettez ; De Livres tels ne faut perdre une page. A l'examen ils furent donc citez ;
Quand avec pompe on les eut apportez, Chacun fe mit de grand cœur à l'ouvrage; C'étoit un zele, une ardeur, un courage, Ne vîtes onc Journaux mieux feüilletez. EN feüilletant on fit à l'ordinaire, Sur le deffein, l'ordre & l'arrangement,
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