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Mainte Remarque, & maint beau Commentaire;
Quoique, pour moi, n'y fois Grec autrement
A tout hazard j'en fis pareillement,

Et je difois Faut avoüer l'affaire,

:

Princes toûjours dans ce qu'ils daignent faire,
Sçavent répandre un certain agrément
Au ftile, au tour qui paffe le vulgaire,
A ne fçai quoi qui plaît ne fçai comment,
On reconnoît toûjours leur caractere,
Tout ce qu'ils font, ils le font noblement.
COMME l'Ouvrage étoit de longue haleine,
Il y falut maintefois revenir,

19

Mais pour vous PRINCE,On ne plaint point fa peine.
On eût voulu pouvoir ne point finir;

On s'y portoit gaïment, & je vous jure
Que de ces doux & délicats Journaux,
Onc un moment n'ennuya la lecture,
Jeunes & vieux les trouverent fort beaux.
OR quand chacun en eut fa fourniture,
l'on vint à parler d'Ecriture,

Et que

A demander Madrigaux ou Sonnets
D'après Marot, ou bien d'après Voiture,
Pour celebrer & chanter vos bien-faits,
Maint s'excufoit fur un Si, fur un Mais;
Et dans l'ébat tel avoit fait merveille,

Qui commença lors à baiffer l'oreille.

Non que
chacun ne fentît dans le cœur
Tout le retour & la reconnoiffance,
Que méritoit votre Magnificence;
Mais l'entreprise à plus d'un faifoit peur.
Auffi n'étoit-ce une petite affaire;

Car quoiqu'on fût charmé de vos bontez
Rimer des Vers dignes d'être goûtez,

D'un Prince à qui l'excellent feul peut plaire,
Eft chofe, au moins, plus difficile à faire,
Que recevoir & manger des Pâtez.

QUE plût à Dieu, que de ce fel Attique,
Qu'en votre Cour on feme à pleine main
A notre Mufe écoliere & ruftique,
Dans les Pâtez fût venu quelque grain!
Que Malezieu, que Geneft le Lyrique
Qui des bons Vers ont trouvé la fabrique,
Euffent daigné de leur Art tout divin
Nous enfeigner la fçavante pratique,
Et nous prêter un peu de ce goût fin,
Qui fait partout priser leur Poëtique;
Euffiez été, fans crainte de critique,
Servi plûtôt aujourd'hui que demain.

Mais, PR INCE, helas ! comme bien pouvez croire,
A nous chetifs n'appartient telle gloire

Vers

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Vers bien rimez ne cherchez point ici,
Ettelle quelle agréez notre offrande,
Plus n'en fçavons ; peut-être de ceux-ci,
Où des Pâtez ai tracé la légende,
PRINCE, rirez, & la Princesse auffi
Or riez-en, ne vous en faites faute;
Car vous le dis, PRINCE, fi vous comptez
Avoir des Vers qui vaillent les Pâtéz,
Eft tout certain que comptez fans votre hôte.
Outre que l'Art chez nous ne va fi loin,
Trop bien fçavez, Prudent comme vous êtes,
Que dans ce tems, quoiqu'on cherche avec foin,
Est plus aifé de trouver au befoin

Bons Pâtiffiers, que trouver bons Poëtes.

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EPITRE III

A MONSEIGNEUR

L'EVÊQUE D'ANGERS.

Sur ce qu'il avoit mandé à l'Auteur, que n'entendant point parler de lui il l'avoit cû mort, & avoit dit nombre de De profundis à fon intention.

D

E vos nombreux & beaux De profundis,
Seigneur Prélat, bien grandmerci vous dis
Toûjours ai fait grand cas de vos prieres,
Toûjours de même en veux faire grand cas
Mais celles-ci font un peu meurtrieres,
J'en ai tremblé, je ne cele pas.

De ma frayeur, peut-être allez-vous rire,
Et vous direz que je m'alarme à tort;
A tout cela je n'ai qu'un mot à dire,
Deprofundis, femble appeller la mort ;
Et réciter dans la forme ordinaire
Avant le temps ce Pfeaume mortuaire,

C'eft réveiller, comme on dit, chat qui dort

Car que fçait-on ? la mort peu charitable,
Qui lors peut-être à moi ne pensoit pas,
Au trifte fon d'un Verfet lamentable,

Peut, revenant tout d'un

coup

fur fes pas,

Se raviser; & comme il n'est que

chance,

Si la camarde alloit, fans autre avis,
Dire en portant contre moi la fentence;
Hâpons toûjours celui-ci par avance,
Il eft loti de fes De profundis;

Seigneur Prélat, vous en auriez fans doute
Quelque regret, ou je vous connois mal
Et vous diriez dans le cœur il m'en coûte
Un ferviteur zelé, certe, & loyal.

Mais cependant j'en tiendrois pour mon compte,
Et quand là-bas la mort nous a reclus,
Ne faut penfer qu'ici haut on remonte;
Depuis long-tems la mode n'en eft plus.
Bien eft-il vrai, fi l'on en croit l'hiftoire,
Qu'aux tems paffez il s'eft vû des Prélats
A qui le Ciel pour couronner leur gloire
Permit d'ouvrir les
Aux faints devoirs, comme eux, toûjours fidele,
Vous poffedez leurs vertus & leur zele;
Comme eux auffi vous feriez, je le croi,

portes

du trépas.

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