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En un befoin quelque prodige infigne,
Du Toutpuissant l'assistance benigne
N'en voudroit pas démentir votre foi:
Mais s'il falloit, comme j'en fuis peu digne,
Que tel indult ne tombât pas fur moi,
Que mes méfaits y miffent quelque obstacle,
Je pourrois bien refter dans le grabat;
Pour le plus für mieux vaut, Seigneur Prélat,
Vous épargner la façon d'un miracle.

Laiffons la mort fans lui hocher le frein,
Paifiblement paffer fon droit chemin;
Affez déja fur nos jours elle

rogne:

De fes fourriers le dangereux effain

N'amenera que trop tôt notre fin,

Ne hâtons point, s'il vous plaît la befogne.
Dès qu'une fois, de fa fatale main,
La mort viendra terminer ma carriere,
Et que garni d'un furtout de fapin,
Elle m'aura, narguant le Medecin,
Tout de mon long mis dans fa gibéciere;
Chantez alors & Pfeaumes & Leçons
Répons, Verfets, & Profes, & Vigiles
Et Requiem de toutes les façons,
Pour les défunts ce font meubles utiles,

Et j'en veux bien quand le cas écherra,
Mais à préfent treve de Libera.

Graces au Ciel qui formant ma machine
Me prémunit d'un bon temperament,
Je ne connois eftomac ni poitrine,
Et rien encor chez moi ne fe dément,
Si c'est en moi la bile qui domine,

Si c'eft le fang, ou le flegme, & comment ?
Que qui voudra le cherche & l'examine,
Je ne m'en mets en peine nullement.
Toûjours mon pous de même pas chemine,
Et dans fon cours eft troublé rarement.
Contre la fiévre, & fa fureur mutine
Sans employer ni drogue ni racine,
La diete est tout mon retranchement,
J'honore fort toute la médecine,

Et

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par respect j'en use sobrement. Conclufion, je me porte à merveille;

T

Or fur cela, voici mon compliment:
Tant qu'ici-bas bien mangeant, bien dormant,
Je joüirai d'une fanté pareille,

De vos nombreux & beaux De profundis,
Seigneur Prélat, bien grandmerci vous dis,

21

Hadada da Hauðáð EPITRE IV

A MONSIEUR***.

'EN ai promis, le fait est tout conftant,

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De le nier je ferois grand scrupule,

Promis des Vers, bon ou mauvais, s'entend,

Tout de nouveau je les promets.

d'autant

Voire s'il faut, vous en ferai cedule;
Mais que cela foit de l'argent comptant,
Nenni Déa, non, ne foyez fi crédule.

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Ce font deux points que promettre & tenir ;
Quant au premier, j'y confens avec joye
Pour le prefent, comme pour l'avenir
Les prometteurs Dieu puiffe-t-il bénir
Promeffes font des paroles de foye,
Chiche n'en fuis, j'en ai toûjours en voye,
A tout venant je suis prêt d'en fournir
Onc pour fi peu ne me ferai honnir,

Tant qu'on voudra j'en donne & j'en envoye;
Mais à l'effet fi l'on prétend venir,

Je n'y fuis plus, c'est une autre monnoye,

Ah! quelle horreur, direz-vous à ces mots, Vous dont l'humeur eft fi franche & loyale, Peut-on tenir de femblables propos

Et débiter cette indigne morale ?

Quoi ! De promettre il fera donc permis,
Et de manquer quand on aura promis?
Homme d'honneur doit garder fa parole:
C'eft fort bien dit, les droits en font facrez;
Mais diftinguo, Signor, en quelle Ecole ;
Ne fçavez pas que j'ai pris mes dégrez
En Faculté de fine Normandie,

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Et fait mon Cours, dont j'ai de bons témoins:
Là de promettre, & même fur la vie,
Quand de tenir on n'auroit nulle envie,
On ne fait faute en fes petits befoins
L'honneur pourtant n'en fouffre nulle tache :
Qu'on ait fauffé fa parole vingt fois,
On n'en perd pas un poil à fa mouftache:
Chaque païs a fes Us & fes Loix.

Que fur cela votre courroux s'allume,
Moralifez, en févére Caton,

Je vous dirai tout net, c'est la coûtume;
Et, s'il vous plaît, comment la nomme-t-on,
Cette coûtume? On la nomme la fage

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Par excellence, en voici la raison :

C'eft qu'en tout lieu, comme en toute saison,
Il n'en eft point de plus utile usage,

Ni de plus fûr: on m'en a fait leçon
Sept ans entiers, fi ma mémoire eft bonne;
C'est droit acquis, je m'en fers quelquefois ;
Or bien fçavez qu'en ufant de fes droits,
On ne fait tort en ce monde à perfonne :
D'où je conclus, & crois conclure bien,
Après avoir vifé toutes les pièces,

Que, nonobftant tous fermens & promeffes,
Foi de Normand, je ne vous dois plus rien,
Fors le refpect, car ma Mufe eft discrete,
Et celui-là ne fe vend, ni s'achete.
Vous me direz, achetez-vous les Vers?
Je les achete; oui, n'en faites de doute,
Et qui pis eft, vû le prix qu'il m'en coûte,
Depuis un tems je les trouve fort chers.
Trouvez marchand à qui ma Muse agrée,
Je la lui vends, & lui vends de l'ennui,
Pour fes lecteurs auffi-bien que pour lui:
Mais je crois bien que pareille denrée
Trouvera peu de marchands aujourd'hui.
Telle qu'elle eft, fi je veux vous en croire,

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