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Il doit prononcer les Jugements par l'avis de l'affiftance, fuivant cet article. Terrien L. 10. des Jugements & Sentences, Chap. I rapporte Arrêt donné contre le fieur Baron, Lieutenant-Général du Bailli de Caux, par lequel la Sentence confirmée, il fut néanmoins mis en amende, pour l'avoir donnée contre l'opinion des affiftants; il faut, dit cet Auteur, fuivre la plus grande partie comme celle qui eft eftimée la meilleure. On voit au ftile qu'en Normandie les Jugements fe faifoient publiquement, tant en Affifes que Plaids, par l'opinion des fages Coutumiers & Praticiens; la Cour par les Arrêts de 1525, 1531, 1547, & 1548, fur le Requifitoire de M. le Procureur-Général, avoit enjoint & ordonné à tous Juges, de juger les procès en plein Auditoire, & donner leurs Sentences par opinion de l'affiftance, fuivant la Coutume & Arrêts, fur peine de nullité des Jugements donnés autrement, enregistrant l'Ordonnance de François I' de 1537. Ses modifications furent conformes à fes Arrêts, c'eft de cet ufage & defdits Arrêts, qu'on a formé l'art. ci-deffus, conune une Jurifprudence toujours fuivie en Normandie.

Godefroy prétend que le Bailli de St Sauveur-Lendelin, penfa perdre fon état pour avoir ordonné que la Sentence de condamnation de mort feroit exécutée, nonobftant l'appel, quoique par l'avis uniforme de l'affistance.

Bérault en rapporte un de 1606, contre des Juges qui avoient fait exécuter de même une Sentence de mort, nonobftant l'appel; ils furent interdits pendant un an de toutes fonctions, & condamnés en des amendes.

Godefroy en cite un autre, par lequel le Juge en chef fut condamné en trente liv. d'amende, dépens & reftitution de taxes, pour avoir remis au lendemain, aux fins d'avoir plus grande affiftance, vu le partage & pouvant le lever; ayant pris l'avis de l'affiftance, le Juge doit juger conformément, sauf si l'avis eft contraire au fien, à l'employer, fans différer à autre jour, ou envoyer à autre Siege, conformément aux Arrêts de 1539, & 1610, rapporté par Bérault.

Par un du 11 Mars de même année, & même Auteur, il fut ordonné au Vicomte d'Evreux, de juger tous les procès publiquement au Prétoire, tous les Juges appellés; à lui enjoint de faire les diftributions en préfence d'un des Lieutenants & d'un des Confeillers-Affeffeurs à tour de rôle, & où il ne s'en trouveroit pour tous à chaque diftribution, feroit commencé à la fubféquente par celui en tour fur le Regiftre des Clofions, les Dictums fignés par le Juge & le Rapporteur dans les trois jours, le rapport taxé raifonnablement par l'avis de l'affiftance, fans que le Préfident y prit aucune part, à peine de concuffion, les dépens taxés par le Rapporteur.

Cet Arrêt étoit conforme au Réglement de 1580, fait pour les Confeillers-Affeffeurs de la Province de Normandie, par fuite de leur création particuliere en 1575; ceux des autres Provinces n'ayant été créés que par Edit de 1578. Le 28 Janvier 1621, pareil Arrêt pour Verneuil, qui ordonne l'exécution du précédent, & d'un autre de 1615, pour être fuivis & obfervés par tous les Sieges de la Province, les Gens du Roi appellés dans les causes où le Roi & le Public n'auroient intérêt; les Lieutenants ayant un procès par préciput dans les diftributions, & un à tour de rôle, le furplus conforme à l'autre Arrêt, & de même en Bailliage; défenfes au Lieutenant du Bailli de délibérer information, décrets de prife de corps, ajournements perfonnels, appointements fur faits écrits, défauts & contu

maces,

maces, entérinement de féparation, bénéfices d'inventaires, délivrance de para→ phernaux, provifions d'aliments, fans afliftance, & ordonné que l'Arrêt feroit envoyé dans tous les Bailliages.

Par Arrêt de 1623, il fut enjoint aux Juges de Thorigni & autres Juges du reffort, de faire faire une Chambre du Confeil, pour procéder aux enquêtes & informations, interrogatoires, examens, délibérations, décrets, états & diftributions de deniers, examens de comptes & autres actes pareils, portés fur les Regiftres des Greffiers ; & enjoint aux Gens du Roi, de tenir un kegiftre du Parquet pour les affaires criminelles, fur lequel feroit dreflé l'état envoyé tous les fix mois.

Si le Juge voyoit que les affiftants opinaffent directement contre la Coutume, les Ordonnances, Arrêts & Réglements, l'ufage obfervé dans la Province, ou l'équité apparente, comme en l'Arrêt de 1606, rapporté ci-deffus; il ne devroit pas y déférer.

Sur un appel d'une provifion donnée par le Lieutenant-Criminel feul, il lui fut enjoint & à tous autres Juges Criminels de la Province, d'appeller l'affiftance dans tous les actes, par Arrêt du 2 Mars 1613 envoyé dans tous les Bailliages, & les Juges devant être dénommés dans toutes les Sentences, à peine de nullité; ec qui étoit conforme aux Ordonnances de Louis XII de 1493, art. 14. Moulins, art. 42 & 46.

Le 23 Décembre 1627, pareil Arrêt qui ordonna en outre, que les Juges affiftants & nommés dans les Jugements, les figneroient; & enjoint aux Juges faifant les inftructions criminelles, d'y appeller un Confeiller à tour de rôle, & de remettre le tout incontinent au Grefe, pour en être la diftribution faite par le Juge Criminel, appellé un ancien Confeiller & un jeune, l'Arrêt envoyé dans les Bailliages.

Le Lieutenant criminel ne peut décerner de provisions au plaintif, fans l'avis de l'affiftance, Arrêts des 3 Décembre 1695 & 11 Juin 1727.

M' de Roupnel dit qu'il eft de la prudence & du devoir d'un Juge en chef criminel d'appeller les autres au délibéré des informatations; que quelques Arrêts du Confeil les en ont difpenfés, mais qu'ils font d'une dangéreufe conféquence, & qu'il eft befoin d'un Réglement.

Par l'Ordonnance de 1670, tit. 25, art. 10 & 11, aux procès criminels à charge d'appel, il doit y avoir trois Juges au moins, & fept aux Jugements en dernier reffort; ne fe trouvant pas une affiftance fuffifante, le nombre doit être fuppléé aux frais du Roi, ou du Seigneur Haut-Jufticier.

Bafnage prétend que le Juge en chef ne peut juger fans affiftance que dans les matieres de comptes, liquidations & autres matieres légeres, rapportant Arrêt de 1650, par lequel, fur la prife à partie du Lieutenant du Vicomte de Domfront, pour n'avoir pas appellé d'affiftance dans une liquidation, il fut dit à tort, & le demandeur en prise à partie condamné en dix livres d'amende, & en intérêts modérés à cent livres.

Par Arrêt du 9 mars 1584 on caffa une curatelle faite un jour de Fête : on ne peut y juger, s'il n'y a éminent péril, ou caufe urgente..

Par autre du 3 Septembre 1688 il fut ordonné que tous décrets, états, comptes & tous procès civils & criminels, feroient diftribués à tour, jugés à l'ordinaire

Tom. I.

F

ART. XII. dans la Chambre du Confeil, & préfence de tous les Juges, fans en pouvoir juger à l'extraordinaire, ni par commiffion; défenfes de prendre autres droits, que les rapports, conformément à l'art. 17 de l'Ordonnance de 1673 & Arrêts du Confeil rendus en conféquence, les Arrêts & Réglements de la Cour fortiffants au furplus leur plein & entier effet, l'Arrêt envoyé dans tous les Bailliages & Jurifdictions.

Par autre Arrêt du 17 Mars 1747 la Cour ordonna que cet Arrêt feroit encore imprimé & envoyé dans tous les Sieges du reffort pour y être exécuté.

Quand une Sentence a été prononcée, rédigée & fignée fur le plumitif, fans aucune réclamation des affiftants, on ne peut faire récorder les Juges, vu les conféquences qui s'enfuivroient, Arrêt du 31 Juillet 1744 conforme à d'anciennes décifions de l'Echiquier.

Les Cours fouveraines ont feul le droit de faire des Réglements, & non les Juges inférieurs, auxquels il eft défendu de nommer ainfi leurs Sentences, fuivant un Arrêt de 1752; ils ne peuvent pas plus ordonner l'exécution des Edits & Déclarations non enregistrées à la Cour, ni les enregistrer: fans qu'au préalable elle l'ait ordonné, fuivant autre Arrêt de 1746.

Le Juge fachant certainement le contraire de ce qui eft rapporté par les témoins, doit s'abftenir & renvoyer à un autre Juge; mais demeurant Juge, il eft plus à propos qu'il s'attache aux preuves qu'à fes lumieres & à fes connoiffances particulieres, pour ne pas faire en même temps l'Office de Juge & de témoin il doit juger fecundùm allegata & probata.

Le Juge roturiérement tenant, peut connoître des caufes de fon Seigneur ; mais le vaffal noble n'en peut connoître, tenant à foi & hommage, fuivant l'Arrêt de 155 par Bérault.

Par autre de 1600 il fut enjoint aux Juges & Avocats de porter la Robe tant aux Jurifdictions qu'à l'Eglife & aux Cérémonies publiques; cet Arrêt a été fouvent renouvellé, & avec bien de l'équité; la dignité de l'état, la décence le demandent.

Bérault rapporte différents Arrêts contre des perfonnes prifes en volant dars les Jurifdictions, qui condamnent les uns à mort, les autres aux Galeres.

Une Sentence arbitrale fignifiée, le compromis durant encore, vaut comme fi elle avoit été prononcée; l'appel ne difpenferoit pas de payer le dédit, Arrêt du 8 Janvier 1700, & par autre du 13 Mars 1725, la Sentence arbitrale ne peut être appellée que le dédit ne foit payé.

leurs

Les Mineurs, les Femmes mariées, les Tuteurs, les Eccléfiaftiques pour Bénéfices ne peuvent compromettre, & on ne peut compromettre fur ceux qui en font exclus de droit; on le peut fur tous les Juges ordinaires, même des Cours fouveraines. M.M. du Parlement n'acceptent point de compromis; mais on obtient des Arrêts du Confeil, par lefquels le Roi attribue à ceux convenus, le droit de juger fouverainement.

ΧΙΙΙ.

Le Haut-Jufticier peut informer, connoître & juger de tous cas & crimes, hormis des cas royaux.

L'ORIGINE des Hautes-Juftices eft difficile à trouver; plufieurs favants Auteurs ont traité la matiere, & en ont fait voir les difficultés.

Loyfeau, dans fon Traité des Offices, les attribue à l'ufurpation des Seigneurs; M' de Montefquieu, 1. 30, chap. 20 & 21 de l'Efprit des Loix, dit que, pour qu'ils les euffent ufurpés de la façon dont Loyfeau le prétend, il faudroit qu'ils euffent été bien rafinés, de grands voleurs, & qu'ils fe fuffent tous accordés enfemble par tout le Royaume, pour former un fyftême général.

Il prétend au contraire qu'outre la compofition qui devoit être payée aux parents pour les meurtres, torts & injures, il falloit encore payer un droit appellé par le Code des Loix des Barbares Fredum, qui étoit la récompenfe de la protection accordée contre le droit de vengeance; c'étoit protéger le criminel contre celui qu'il avoit offenfé.

Ce Fredum étoit un droit local pour celui qui jugeoit dans fon territoire, fans qu'il pût l'exiger lui-même, fuivant la Loi des Ripuaires, il étoit porté à fon Fifc par celui qui avoit gagné fa cause.

La grandeur du Fredum fe proportionnoit à la grandeur de la protection, le Fredum de la protection du Roi étoit beaucoup plus grand que celui des Comtes & autres Juges.

C'eft dans ce Fredum que M' de Montefquieu voit naître les Juftices Seigneuriales, les Rois ne levant point fur les terres du partage des francs, encore moins fur les fiefs, les Seigneurs en avoient la jouiffance avec tous les fruits & émoluments.

Delà il fuivoit que celui qui avoit le fief, avoit auffi la Juftice, qui ne s'exerçoit que pour les compofitions aux parents, & les profits ou amendes aux Seigneurs, le prouvant par Chartres, Capitulaires & autres actes. D'où il conclut que les Juftices ne doivent point leur origine à l'ufurpation, mais dérivent du premier établiffement, & non de fa corruption.

Dès le temps de Charlemagne les Juftices patrimoniales étoient établies : le Royaume, loin d'être alors dans le défordre, étoit dans fon plus grand éclat. Les Fiefs furent établis par le partage fait entre les vainqueurs, & les Juftices en 'furent les principales prérogatives; fi elles n'en avoient pas été une dépendance, on ne verroit pas par-tout que le fervice de Fief étoit de fervir les Rois, ou les Seigneurs, & dans leurs Cours & dans leurs guerres.

Bafnage, après avoir traité favamment la matiere, & s'être trouvé embarassé, en revient à dire que les Fiefs dans leur origine n'étoient que des bénéfices dont les grands Seigneurs extorquerent dans la fuite la propriété à la foibleffe de nos Rois, & qu'on y avoit joint plufieurs droits, entr'autres celui de Jurisdiction. Dans les premiers temps il n'y avoit effectivement que quelques Fiefs qui fuffent aliénés à perpétuité pour des cas particuliers; les autres n'étoient qu'à vie. Les grands Fiefs n'étoient point à perpétuité; Charles le Chauve voulut néanmoins que les fils y fuccédaffent, & dès le temps de Charlemagne & de

Lothaire il y avoit de ces fortes de biens qui paffoient aux héritiers, & se partagoient entr'eux.

Les chofes en cet état, Raoul, en conféquence de la ceffion à lui faite par Charles le Simple, faifant le partage des terres en propriété à fes Officiers, qui étoient la plupart fes proches, ou d'anciens Neuftriens qui n'avoient pas pris la fuite comme les autres, pour s'attirer la bienveillance des uns & des autres, ne changea rien à la dignité des Fiefs déja établis avant lui; cette dignité s'étendit même à proportion de l'autorité & du crédit du poffeffeur.

L'ancienne Coutume fait mention de la Juftice fieffale à raifon des Fiefs: le titre de Cour donne au Duc le plaid de l'épée, s'il ne l'avoit octroyé à autre par chartres, longues années, échange, ou autre raison aperte.

Bafnage prétend que les Hautes-Juftices ont du commencer du temps des Ducs, & que les Jurifdictions ne fubfiftent que par une longue poffeffion vérifiée par un exercice continuel de la Juftice, & des aveux vérifiées en la Chambres des Comptes.

Les Officiers Royaux ne furent rendus perpétuels que par Louis XI, qui fit jurer à Charles VIII. fon fils, de le faire exécuter: Philippe de Valois l'avoit tenté inutilement ; mais la vénalité y a mis le dernier terme.

Le Parlement de Paris fondé fur l'Ordonnance de Rouffillon, conforme aux anciens ufages, a toujours autorifé la deftitution des Officiers des Seigneurs, qui n'étoient placés ni à titre onéreux, ni pour récompenfes de fervices; mais ad nutum.

Il en eft autrement pour la Normandie; on y a toujours regardé comme une maxime certaine que les Officiers Seigneuriaux ne font pas plus deftituables que les Royaux, quoique les Seigneurs employent le contraire dans leurs provifions; il n'y a que les Sénéchaux des Baffes-Juftices.

La nomination aux Offices étant un fruit civil, les ufufruitiers, l'acquéreur à faculté de réméré, & le titulaire du Bénéfice peuvent nommer aux Offices vacants, de fujets idoines, & fi la Haute-Juftice reffortit à la Cour, le Bailli doit, avant fa réception, juftifier de fa matricule, Déclaration de 1680.

Bafnage rapporte un Arrêt du 15 Juin 1657 qui maintint un pourvu par un acheteur à faculté de rachat après la remife de la terre, parce que l'acte étoit pleinement confommé, l'acheteur cenfé propriétaire, & l'Office un fruit qui lui appartenoit.

Les Seigneurs, leurs fucceffeurs, acheteurs, adjudicataires par décret, & autres ne peuvent jamais deftituer les Officiers fans causes, fuivant plusieurs Arrêts. Les Seigneurs Eccléfiaftiques pour leurs Hautes-Juftices temporelles, ne peuvent auffi deftituer leurs Officiers; & ces Officiers ne peuvent réfigner, quand même ils auroient payé pour pofféder leurs Offices, fauf à être indemnifés, s'il y échoit.

Les Eccléfiaftiques ne peuvent préjudicier leurs fucceffeurs pour la Jurifdiction Eccléfiaftique les Evêques peuvent deftituer leurs Officiaux, pouvant euxmêmes exercer cette Jurifdiction; ce que ne peuvent faire les Seigneurs Laïques, comme il a été jugé par plufieurs Arrêts & la Déclaration du 17 Août 1700.

Le Chapitre peut auffi les changer Sede vacante, & en placer d'autres, s'il en eft en poffeffion, faufà l'Evêque nouvellement élu à les conferver, ou en nom-,

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