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fe fervir de l'une pour un œil & de l'autre pour l'autre cil; parceque la première dont on s'est servi, ayant été mouillée de l'humeur aqueufe, quoi qu'effuyée enfuite, n'entreroit que tres difficilement, à caufe d'une petite croûte imperceptible & mucilagineuse qui reste deffus, & qui ne s'ôte qu'en la lavant, & on n'eft pas alors en un état à prendre cette précaution.

L

De la maniére d'abbaißer la Cataracte.

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CHAPITRE XII.

E malade étant préparé & le jour de l'operation venu le Chirurgien operateur fe doit rendre chez fon malade, fur les huit, neuf ou dix heures du matin, ou fur les trois, quatre ou cinq heures du foir, fi le tems du matin eft fombre & pluvieux : vifiter dabord le logis, pour choisir une chambre bien éclairée & fur les feneftres de laquelle le foleil ne donne pas, parceque fes rayons frapants l'œil malade en feroient trop refferrer la pupille, & incommoderoit auffi le malade quand la cataracte quitteroit.

Il doit faire préparer deux fiéges; un pour le malade qu'il fera poser vis-à-vis des fenestres, à une distance convenable & un peu de biais, afin que la lumière ne frape pas à plomb le vifage du malade, ce qui rendroit l'œil trop luifant & empêcheroit de bien diftinguer la cataracte, & l'éguille quand elle feroit dans l'œil, l'autre pour lui, qui doit être un peu plus élevé, & ce à proportion de la grandeur du malade ou de celle du Chirurgien, parcequ'il faut que le Chirurgien

foit toûjours un peu plus élevé que le malade, pour operer facilement.

Dans les villages ou chez les pauvres, où on ne rencontre pas toûjours fes commoditées, on fe fert d'un banc étroit, difpofé comme deffus, fur lequel on fait affeoir le malade, jambe deça, jambe de la, le Chirurgien s'afféyant de méme, & fe faifant mettre quelque chofe fous lui pour l'élever plus que le malade, en cas qu'il ne fe trouvât pas affez élevé.

Les fiéges étant préparez, on fait aprocher le malade: s'il n'y a qu'un oeil d'incommodé, on aplique fur le fain une compreffe en plufieurs doubles, que l'on contient avec une bande pofée obliquement, & cela pour deux raisons; la premiére pour empêcher cet œil de se remuer en regardant les affiftans ou les chofes voisines, ce qui obligeroit l'œil malade de se remuer de même; la feconde pour empêcher la pupille de fe refferrer, si le malade tournoit l'œil du côté du grand jour, ce qui arriveroit de même à la pupille de l'œil malade, parceque tous les mouvemens qui fe font dans un œil, fe font pareillement dans l'autre.

On fait affeoir le malade. Un ferviteur debout fe tient derriére, & fi prés, que de fes deux mains pofées fur les deux côtez de la tête du malade, il la puiffe tenir un peu renversée & appuyée fermement contre fa poitrine. Le Chirurgien s'affie auffi fur fon fiége vis-à-vis du malade, & s'aproche le plus prés qu'il peut de fes genoux & cuiffes, il embraffe les genoux & cuiffes du malade, & il le prie de tenir les mains abbaiffées fur fes genoux..

Il le prie auffi de tenir fon œil ouvert, de le tourner comme s'il vouloit regarder le bout du nez, & lui recommande de le tenir ferme & affûré autant qu'il le pourra en cette fituation. Il pofe enfuite le doigt indice de sa main droite, fi c'est l'œil droit fur lequel il ope re, au deffous du sourcil, & le poûce fur la pommette de la joie, pour en les écartant, entretenir les paupiéres ouvertes: & il remarque l'endroit qu'il veut piquer, qui est le blanc de l'œil du côté du petit angle, à deux lignes prefque du cercle extérieur de l'iris, ou un peu plus prés, ou un peu plus loin fuivant la groffeur de l'œil, & fur la ligne qu'on imagineroit être tirée d'un angle à l'autre, évitant les vaiffeaux s'il en paroît quel

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ques-uns.

On choifit cet endroit pour éviter de piquer dans celui ou l'uvée s'attache à la cornée par le moyen du cercle ciliaire; parceque fi on piquoit dans ce cercle, il y auroit à craindre dans les operations laborieuses, de féparer de ce côté là l'uvée de la cornée ; & fi cette féparation étoit confiderable, l'iris pourroit s'affaiffer & la pupille fe dilater & refferrer irreguliérement, l'infertion des fibres motrices de l'itis n'étant plus ftable dans ce lieu. Ce n'eft pas à dire qu'on ne réüffiffe fouvent, quoiqu'on pique plus prés de l'iris lorfque les operations ne fe rencontrent pas laborieuses; mais il vaut toûjours mieux s'en éloigner & choifir le lieu que j'ay marqué, tant pour la raifon dite, que pour mouvoir plus librement & dans une plus grande étenduë la pointe de l'éguille.

Le lieu choifi, le Chirurgien de la main gauche, si

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c'eft l'œil droit fur lequel il opere, & de la main droite fi c'est l'œil gauche, prend fon éguille qu'un ferviteur lui prefente, la tient par le milieu du manche avec le poûce, le doigt indice & le doit moyen, à peu prés comme on tient une plume pour écrire, appuye le petit doigt & l'annulaire fur la tempe pour empêcher fa main de vaciller, & pique hardiment, dans le lieu défigné, les membranes qui compofent le blanc de l'œil, la cornée & l'uvée : quand il a pénétré l'uvée, il couche un peu le manche de fon eguille du côté de la tempe & la pouffe doucement & en tournant jusques à ce qu'il en voye, au travers de la cornée transparente, la pointe parvenue aux deux tiers de la pupille: alors il la hauffe & l'abbaiffe pour voir fi les accompagnemens ne font point adhérents au bord de la pupille; ce qu'il connoît, quand il s'aperçoit qu'il meut l'iris & que la pupille change de figure à mesure qu'il meut fon éguille; en ce cas par ces mouvemens il les détacheroit doucement & petit à petit; finon, il porte la pointe de fon éguille vers la partie fupérieure de la cataracte ou cristallin alteré, & en l'apuyant un peu vers le centre de l'œil, il l'abbaiffe, & reitere ainfi jufques ce qu'il voye que la cataracte fe détache du lieu quell'e occupe: alors il gagne tout-à-fait le dessus, & en apuyant doucement, il l'abbaiffe entiérement au deffous de la pupille, ou elle fe fait place entre le corps vitré & l'uvée, le cercle ciliaire fe féparant même le plus fouvent en cet endroit de la membrane du corps vitré, comme je l'ay fait voir en l'article 5. de la obfervation du chapitre 3, cela ne fe pouvent presque

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faire autrement, parceque l'efpace qu'il y a du bord de la circonference de la pupille au cercle ciliaire n'est pas toûjours capable de loger le cristallin avec tous ces accompagnemens. Et quoique les fibres ciliaires fe trouvent rompus en cet endroit & en celui par lequel l'éguille a paffé, le corps vitré ne ceffe pas pour cela de recevoir de la nourriture autant qu'il lui en est néceffaire, parcequ'il refte encore affez d'autres fibres entieres pour lui en fournir.

a

Le Chirurgien tient la cataracte en cet état pendant un peu de tems, & relève enfuite la pointe de son éguille: fi la cataracte reste abbaiffée, à la bonne heure, l'operation cft faite: fi elle remonte & fait le pontlevis, il appuye derechef deffus & l'abbaisse un peu plus que la premiére fois, & la contient ainfi pendant un peu plus de tems : il relève encore la pointe de fon éguille, & fi la cataracte remonte encore, il l'abbaisse comme deffus, jufques à ce quelle demeure.

Pendant tout ce tems, fi le bras du Chirurgien fe fatigue, il fe le fait foûtenir par un ferviteur affûré, afin de s'empêcher de vaciller.

La cataracte étant reftée au bas de la pupille, le Chirurgien retire fon éguille doucement & dans le même ordre qu'il l'a introduite. Il n'eft pas néceffaire de prefenter quelques objets au malade, pour les lui faire diftinguer & faire connoître aux afliftants qu'il void : les malades eux-mêmes ont affez d'empreffement. de le dire, & le Chirurgien le connoît fuffisamment par la noirceur & la netteté de la prunelle. Au contraire il faut les prier de ne point parler, & de ne re

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