de draperies ferrées: il ne faut donc pas s'étonner fi les draperies larges n'auroient pas toujours réuffi à leurs yeux. C'est par la même raifon qu'on en voit peu dans leur peinture : la Noce Aldobrandine, peinture ancienne, eft compofée & drapée précisément comme les statues & les bas-reliefs du même temps.

Nous avons un fujet de Coriolan, gravé d'après une peinture antique trouvée dans les thermes de Titus, dont les figures font très fymmétriquement arrangées; l'ordre & le goût des plis y font traités comme dans les ftatues antiques.

Les peintures & les fculptures trouvées à Herculanum font d'un même style.

Si l'on avoit encore des doutes fur la réuffite dés draperies larges, on pourroit voir, pour fe raffurer, les figures de le Gros, de Rufconi, d'Angelo-Roffi, qui font à Rome dans Saint-Jean de Latran; le faint André de François Flamand, dans S. Pierre ; la fainte Thérefe du Bernin, dont l'habillement de carmélite paroîtroit se refuser à l'effet & au jeu d'une draperie qui annonce les mouvements divers du corps humain ; en un mot, tant d'autres figures dont les draperies larges font unanimement admirées. Si ces sculpteurs avoient fervilement imité les anciens, & qu'ils n'euffent ofé effayer quelque chofe d'eux-mêmes, de combien de beautés ne ferions-nous pas privés? Ce qui eft aujourd'hui fort ancien, fut autrefois nouveau, pouvoient-ils dire avec Tacite, & ce

que nous faifons fans exemple, fervira d'exemple: Annal. l. 11, C. 24 (a).

(a) Si j'ai donné quelques éloges à la fculpture, on ne m'accufera pas de les avoir outrés, &, par exemple, de l'avoir placée avant la poéfie, comme a fait un peintre anglois. Voici ce qu'il dit : » L'hiftoire commence; la poéfie s'éleve plus haut ;

la fculpture onchérit encore fur la poéfie; mais il n'y a que » la peinture qui acheve & qui perfectionne le tout. Là, il faut s'arrêter; ce font là les limites que la capacité humaine ne fauroit paffer, pour ce qui regarde la communication des idées ». (Richardon pere, Difcours fur la fcience d'un connoiffeur, page 141.)

L'académie royale de peinture & de fculpture, qui eft auffi compofée de connoiffeurs, n'a pas fu faire cette heureuse diftinction. Elle a fimplement adopté fur fon jetton, en 1764, une légende honnête & vraie: Amica quamvis amula.

SUR

"

LA STATUE DE MARC-AURELE.

Ut enim de pictore, fculptore, fitore, nifi artifex judicare, ita nifi fapiens non poteft perfpicere fapientem.

„NIHIL IHIL pejus eft iis qui paulum aliquid ultra primas litteras progreffi, falfam fibi fcientiæ perfuafionem induerunt. Nam & cedere præcipiendi peritis indignantur, & velut jure quodam potef» tatis, quo ferè hoc hominum genus intumefcit, imperiofi atque interim fævientes ftultitiam fuam perdocent ».

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QUINTIL. Orat. inftit. l. 1, c. 1.

Il n'y a rien de pire que ceux qui, ayant quelque légere teinture d'une fcience, fe perfuadent fauffement qu'ils font favants. Car ils fe révoltcnt contre ceux qui feroient en état de les inftruire, & prenant un ton d'autorité, ce qui eft fort familier à cette ef pece de de gens, ils débitent leurs fottifes avec hauteur, quelquefois même avec humeur, contre ceux qui ofent les contredire.

J

des

E préviens ceux entre les mains de qui pourra tomber cet écrit, que s'ils ne veulent lire que ouvrages où l'enchaînement heureux des raisonnements la fineffe des tranfitions & la magie du

style répondent à l'ordonnance & à la disposition méthodique du plan, ils peuvent s'épargner la peine de lire celui-ci. Ce n'eft pas un littérateur qui écrit, c'est un artiste qui ne peut donner aux lettres que les moments d'intervalle que lui laiffent les occupations de fon état. Si les réflexions qu'il a jettées fur le papier, à mesure qu'elles lui ont été fuggérées par la vue des objets, les converfations & fes lec tures, ont quelque jufteffe; fi elles peuvent être de quelque avantage aux arts, il aura atteint le but auquel il s'eft borné, qui a été d'être utile plutôt que de plaire. Quanquam ó!... fed placeant quibus hoc, Minerva, dedifti,

SUR

LA STATUE DE MARC-AURELE.

Qu

le ta

UAN D nous difputions fur le tableau de Polygnote, nous rêvions tout à notre aife; mais à notre réveil nous n'avons trouvé qu'une defcription de Paufanias, peut-être plus froide encore que bleau, qui n'eft plus depuis plufieurs fiecles. Aujourd'hui l'objet que je vous propofe eft bien exiftant & bien admiré, non feulement par cette foule qui regarde affez volontiers fans voir, & qui vient vous dire après, Nous l'avons vu, c'est une merveille; mais encore par quelques artistes (a). Ainfi

(a) » Paul Ucello, peintre florentin, a fait un cheval qui » leve en même temps les jambes d'un seul côté, ce que les » chevaux ne font point, parcequ'ils tomberoient. Cette erreur vient peut-être de ce que l'artiste n'avoit pas étudié les » chevaux, comme il avoit fait les autres animaux. D'ail» leurs la proportion de ce cheval eft très grande, elle est très » belle, & l'ouvrage est encore regardé comme très beau » Voyez Vafari, Vita di Paulo Ucello.

On ne dira pas que Vafari est un ignorant, un mauvais juge des ouvrages de l'art; cependant voyez comme il raisonne, quand il parle d'un objet qu'il n'a pas étudié. Un peintre fait un cheval & le fait marcher d'une maniere impoffible parcequ'il n'a pas étudié les chevaux : il en fait pourtant affez pour