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Qu'aifément je ne pûffe en quelque Ode infipide, 10 T'exalter aux dépens & de Mars & d'Alcide: Te livrer le Bofphore, & d'un Vers incivil Propofer au Sultan de Te céder le Nil. Mais pour te bien loüer, une raison sévere Me dit qu'il faut fortir de la route vulgaire :

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REMARQUES.

Prince en 1663. pour une penfion, qu'il en avoit obtenue. C'est ainfi que ce grand Poëte s'exprime en parlant au Roi de fon Génie & de fes Vers:

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Par eux de l'Andromede il fçut ouvrir la Scène;

On y vit le Soleil inftruire Melpomène,

Et lui dire qu'un jour Alexandre & Cefar

Seroient, comme vaincus, attachés à ton char".

Ces Vers fe trouvant dans une Pièce fugitive, pouvoient fort bien être échappés à M. Despréaux, quoique les deux qu'il a mis dans fon Epitre, paroiffent parodiés en quelque façon de ceux de Corneille. Il fe peut fort bien qu'il n'ait penfé qu'à faire voir le ridicule d'une loüange triviale, qu'il voyoit tous les jours mife en œuvre par les plus méchans Poëtes. DE ST. MARC.

CHANG. Ibid. Ce n'est pas qu'aifément, &c.] C'eft dans l'Edition de 1701. que ce Vers & les deux fuivans ont paru pour la premiere fois tels qu'ils font ici. Dans toutes les Editions, qui ont précédé, le Poëte avoit mis:

Ce n'est pas que ma main, comme une autre à ton char,
GRAND ROI, ne pút lier Alexandre & Céfar,

Ne pút, fans fe peiner dans quelque Ode infipide,
T'exalter aux dépens, &c.
BROSSETTE.

L'Auteur a bien fenti qu'il y avoit un défaut de juftefle à dire de la main qu'elle exalte quelqu'un dans une Ode

15 Qu'après avoir joüé tant d'Auteurs différens, Phébus même auroit peur, s'il entroit fur les rangs :

REMARQUES.

C'est ce qui a produit le changement qu'il fit dans l'Edition de 1701. DE ST. MARC.

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VERS 15. Qu'après avoir joué, &c.] Des Marets dans fa Defenfe du Poëme Iléroïque Dial. 4. foit par inattention, foit par malice, donne à ce Vers & au fuivant un fens bien ridicule. Ce qui eft... admirable, dit-il, c'est ,, qu'en fe mocquant de l'ambition des Conquérans, il (M. Despréaux) eft lui-même fi ambitieux, qu'avec tant de méchans Vers, il prétend s'élever au-deffus de tous les Poëtes, lefquels il croit faire trembler Même il dit qu'il fait trembler Apollon le Dieu des Poëtes, en difant de lui-même:

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دو

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دو

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Qu'après avoir joüé tant d'Auteurs différens,

Phébus même auroit peur, s'il entroit fur les rangs

Il faut n'avoir pas la moindre idée de la Conftruction Françoife, pour donner un pareil fens à ces deux Vers: & M. Despréaux dut bien rire de l'extravagance de cette Critique. M. Broffette accufe Des Marets d'avoir affecté de donner un faux fens à cet endroit, pour pouvoir accufer l'Auteur d'orgueil & de préfomption; &prétend au contraire que le Poëte ne pouvoit pas donner une plus grande marque de modeftie, qu'en difant qu'il doit fortir de la route vulgaire pour bien lower le Roi, & que fi Apollon lui-même entroit fur les rangs pour louer ce Prince, il feroit effrayé d'une fi grande entreprife". Il ajoûte que c'eft-là le véritable fens de l'Auteur. Il le rend mal; mais il l'a com pris. En quoi il fe trompe, c'elt en prenant pour preu ve de modeftie, ce qui n'annonce que la crainte, avec laquelle le Poëte entreprenoit de louer le Roi. M. Du Monteil contredit ici M. Broffette, pour le feul plaisir de faire une très-longue Note, où je n'ai vu d'utile que les Paroles de Des Marêts, que j'ai copiées au commencement de cette Remarque. D'ailleurs il ne dit rien que de fort déraisonnable, à l'exception peut-être de la prolize explication qu'il fait des deux Vers en queftion. Ils font clairs; mais parce qu'ils ont arrêté les Critis

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Que par des vers tout neufs, avoüés du Parnaffe,
Il faut de mes dégoûts juftifier l'audace;

Et fi ma Muse enfin n'eft égale à mon Roi,
20 Que je prête aux Cotins des armes contre moi.
Eft-ce-là cet Auteur, l'effroi de la Pucelle,
Qui devoit des bons vers nous tracer le modele,
Ce Cenfeur, diront-ils, qui nous réformoit tous?
Quoi? ce Critique affreux n'en fçait pas plus que nous?
25 N'avons-nous pas cent fois, en faveur de la France,
Comme lui, dans nos Vers, pris Memphis & Byzance;
Sur les bords de l'Euphrate abattu le Turban,
Et coupé, pour rimer, les Cèdres du Liban?

REMARQUES.

ques & les Commentateurs, les voici réduits en profe, en y fuppléant feulement ce que l'Ellipfe a fait difparoître de la phrafe. Phébus même, après avoir joué autant d'Auteurs, que j'en ai joué, auroit peur s'il entroit fur les rangs. Et pourquoi Phebus auroit-il peur? Le Poëte en énonce très-clairement la raifon dans ces quatre Vers, qui fuivent:

Que par des Vers tout neufs, avoüés du Parnale

Il faut de mes dégoûts juflifier l'audace;

Et, fi ma Mufe enfin n'est égale à mon Roi,
Que je préte aux Cotins des armes contre moi.

DE ST. MARC.

VERS 21. Peffroi de la Pucelle.] POEME de Chapelain, dont il eft parlé en divers endroits des Satires. Voyez au fujet de ce Vers & des trois fuivans, l'Ept. tre 11. Vers 5.

VERS 28. Et coupé, pour rimer, les Cèdres du Liban.] Dans ce Vers & les deux précédens, l'Auteur fe moc

De quel front aujourd'hui vient-il sur nos brifées, 30 Se revêtir encor de nos phrases usées?

Que répondrois-je alors? Honteux & rebuté J'aurois beau me complaire en ma propre beauté, Et de mes triftes vers admirateur unique,

REMARQUES.

que des mauvais Imitateurs de Malherbe, qui croyoient
l'avoir bien imité, quand ils avoient employé ces for-
tes de Rimes, qui fe trouvent en plufieurs endroits de
fes Ouvrages: il fait allufion fur-tout à cette Stance
d'une Ode de ce fameux Poëte:

O combien lors aura de Veuves
La Gent qui porte le Turban!
Que de fang rougira les fleuves
Qui lavent les piés du Liban!
Que le Bofphore en ces deux rives
Aura de Sultanes captives!
Et que de meres à Memphis,
En pleurant, diront la vaillance
De fon courage & de fa lance,

Aux funérailles de leurs fils!

THEOPHILE, qui n'aimoit point Malherbe, lui avoit, avant M. Despréaux, reproché fon goût pour ces Rimes extraordinaires, qui font affez fouvent le recours des Efprits froids & ftériles, tel qu'étoit Malherbe, felon M. de St. Marc, qui ajoute ce petit trait à la Re marque du Commentateur. Voici ce que dit THEOPHILE

Ils travaillent un mois à chercher comme à Fis
Pourra s'apparier la rime de Memphis;
Ce Liban, ce Turban, & ces rivieres mornes,
Ont fouvent de la peine à retrouver leurs bornes

Plaindre en les relifant l'ignorance publique.

35 Quelque orgueil en fecret dont s'aveugle un Auteur, Il est fâcheux, GRAND ROI, de fe voir fans Lecteur, Et d'aller du recit de ta gloire immortelle,

Habiller chez Francœur le fucre & la canelle. Ainfi, craignant toujours un funefte accident, 40 J'imite de Conrart le filence prudent:

REMARQUES.

VERS 38. Habiller chez Francœur le fucre & la canelle.] Fameux Epicier. DESP.

Claude Julienne, dit Francœur, demeuroit dans la Rue Saint Honoré, devant la Croix du Trahoir, à l'enfeigne du Franc-cœur. L'Auteur à employé le nom de cet Epicier, parce qu'il fourniffoit la Maifon du Roi, dont il étoit connu. L'un de fes Ancêtres étant Fruitier d'Henri III. ce Roi fut fi content de l'affection & de la franchife avec laquelle cet Officier le fervoit, qu'il dit un jour, Julienne est un franc-cœur. Ce furnom demeu ra à Julienne, & fes Defcendans en ont hérité. M. Despréaux ignoroit cette particularité. C'eft à propos de ce fait & de quelques autres femblables, qu'il me dit un jour: A l'air dont vous y allez, vous faurez mieux Votre Boileau que moi-même. BROSS.

IMIT. Ibid. Habiller le fucre & la canelle.] SAINTGENIEZ qu'on a déja cité fur le Vers 261. de la Satire IX. & de qui l'on a oublié de dire, qu'il étoit né à Avignon le 12. Septembre 1606. & qu'il mourut à Orange, dont il étoit Chanoine, le 25. Juin 1663. âgé de près de 57. ans, dit dans fon Idylle III. intitulée Euterpe.

Et piper aut halec und veftire papyro. DE ST. MARC. VERS 40. J'imite de Conrart le filence prudent.] Fameux Académicien, qui n'a jamais écrit. DESP.

Valentin Conrart, étoit né à Paris en 1603. & fut nommé Valentin, parce que fon Pere & fes Ancêtres étant de Valencienne en Flandres, fes parens voulurent conferver le fouvenir du lieu de leur origine. Il étoit Secrétaire du Roi: & c'eft chez lui que commencerent

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