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160 Sans elles un Héros n'eft pas long-temps Héros. Bientôt, quoi qu'il ait fait, la mort d'une ombre noire Enveloppe avec lui fon nom & fon hiftoire.

En vain pour s'exemter de l'oubli du cercueil,
Achille mit vingt fois tout Ilion en deuil.

165 En vain, malgré les vents, aux bords de l'Hefpérie Enée enfin porta fes Dieux & fa Patrie.

Sans le fecours des vers, leurs noms tant publiés
Seroient depuis mille ans avec eux oubliés.

Non, à quelques hauts faits que Ton deftin Trappelle,
170 Sans le fecours foigneux d'une Mufe fidelle,
Pour T'immortalifer Tu fais de vains efforts.
Apollon te la doit: ouvre-lui Tes tréfors.
En Poëtes fameux rends nos climats fertiles.
Un Augufte aifément peut faire des Virgiles.
175 Que d'illuftres témoins de Ta vaste bonté
Vont pour Toi dépofer à la postérité!

REMARQUES.

IMIT. Vers 160. Sans elles un Héros n'eft pas long temps Héros, &c.] M. Du Monteil avertit, que c'eft ici une Imitation d'Horace, qui dit, Liv. IV. Ode IX Vers 25.

Vixere fortes ante Agamemnona
Muiti, fed omnes illacrymabiles
Urgentur, ignotique longa"

Nocle, carent quia vate facro.

IMIT. Vers 174. Un Augufte aifément peut faire des Virgiles.] MARTIAL. Liv. VIII. Epigr. 56. donne à un Mecenas le même pouvoir que l'on attribue ici à un Auguste,

Sint Mecanates, non deerunt, Flacce, Marones.

Pour moi, qui fur Ton nom déja brûlant d'écrire, Sens au bout de ma plume expirer la Satire, Je n'ofe de mes vers vanter ici le prix. 180 Toutefois, fi quelqu'un de mes foibles écrits Des ans injurieux peut éviter l'outrage, Peut-être pour Ta gloire aura-t-il fon ufage. Et comme Tes exploits étonnant les Lecteurs, Seront à peine crus fur la foi des Auteurs; 185 Si quelque Esprit malin les veut traiter de fables, On dira quelque jour, pour les rendre croyables; Boileau qui dans fes vers pleins de fincérité, Tadis à tout fon fiècle a dit la vérité;

Qui mit à tout blâmer fon étude & fa gloire, 190 A pourtant de ce Roi parlé comme l'Histoire.

REMARQUES.

VERS 177. Pour moi, qui fur Ton nom déjà brûlant de crire, &c.] On a comparé cet endroit avec un autre de l'Epitre Vill. Il s'agit de décider, qui l'emporte_des deux. L'Auteur en a jugé lui-même, &, ce me femble, avec beaucoup de jufteffe. Voyez la Remarque fur le Vers 65. de l'Epitre VIII. DE ST. MARC.

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LeAuteur ne compofa fa feconde Epitre, que pour

conferver la Fâble de l'Huître & des Plaideurs, qu'il avoit retranchée de la fin de l'Epître précédente.

L'Abbé Des Roches, auquel il adreffe celle-ci, fe nommoit, Jean-François-Armand Fumée. Il étoit fils de François Fumée, Seigneur des Roches, & defcendoit d'Adam Fumée, premier Médecin de Charles VII. L'Abbé Des Roches mourut en 1711, ágé d'environ 75. ans. C'est à lui que Gabriel Guéret a dédié fon Parnaffe Réformé,

A M. L'ABBE' DES ROCHES.

A

QUOI bon réveiller mes Mufes endormies, Pour tracer aux Auteurs des régles ennemies? Penses-tu qu'aucun d'eux veuille subir mes loix, Ni fuivre une raison qui parle par ma voix? 5 O le plaifant Docteur, qui, fur les pas d'Horace, Vient prêcher, diront-ils, la réforme au Parnaffe!

REMARQUES.

VERS 1. A quoi bon réveiller, &c.] Les fix premiers Vers font connoître que l'Auteur travailloit alors à fon Art Poëtique.

IMIT. Vers 5. O le plaifant Docteur, &c.] A l'occafion de ce Vers & des deux qui le fuivent, il eft à remarquer que M. Despréaux s'eft imité lui-même. Il avoit dit dans l'Ep. I. Vers 21.

Eft-ce-là cet Auteur l'effroi de la Pucelle,

Qui devoit des bons Vers nous tracer le modele, Ce Cenfeur, diront-ils, qui nous réformoit tous ? Quoi? ce Critique affreux n'en fçait pas plus que nous ? Saint-Geniez, en finiffant fon Euterpe déja citée plus d'une fois, avoit employé la même penfée, mais avec un tour différent, & fur lequel notre Auteur a beaucoup enchéri.

ego cùm culpem ftudium hoc, aliofque Poëtas Exagitem, feclique frequens incommoda clamem: Cùm fit Scriptorum reprensa licentia verbis

Nos écrits font mauvais, les fiens valent-ils mieux ?
J'entens déja d'ici Liniere furieux,

Qui m'appelle au combat, fans prendre un plus long

terme.

10 De l'encre, du papier, dit-il: qu'on nous enferme.
Voyons qui de nous deux plus aifé dans fes vers,
Aura plus tôt rempli la page & le revers?
Moi donc qui fuis peu fait à ce genre d'efcrime,
Je le laiffe tout feul verfer rime fur rime,
15 Et fouvent de dépit contre moi s'exerçant,
Punir de mes défauts le papier innocent.

Mais toi qui ne crains point qu'un Rimeur te noirciffe,
Que fais-tu cependant feul en ton Bénéfice?

REMARQUES.

Tanta meis, cùm librorum faftidia præ me

Tanta feram, in numero tamen ut fim molior ifto.

DE ST. MARC.

VERS 8. J'entens déja d'ici Liniere furieux.] Le Poëte Liniere avoit beaucoup de facilité à faire des Vers médiocres. Notre Auteur l'avoit pourtant nommé honorablement dans la Satire IX. Vers 236. Mais Liniere s'avila de faire une Critique très-offenfante de l'Epttre IV. qui avoit été faite avant celle-ci. Pour toute vengeance, M. Despréaux mit le nom de ce Poëte en cet endroit, & dans quelques autres de fes Ouvrages. Voyez Epit. VII. y. 89. Art Poët. Chant II. Vers 194.

IMIT. Ibid. F'entens déja d'ici Liniere furieux.] HORA-
CE a dit de même, Livre I. Satire IV. Vers 24.

Crifpinus minimo me provocat accipe, fi vis,
Accipe jam tabulas, detur nobis locus, hora,
Cuftodes: videamus uter plus fcribere poffit.

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